PAPE FRANÇOIS
MÉDITATION MATINALE EN LA CHAPELLE DE LA
MAISON SAINTE-MARTHE
Mardi 12 janvier 2016
(L'Osservatore Romano, Édition hebdomadaire n° 3 du 21 janvier 2016)
Lutte avec Dieu
La force de la prière, véritable moteur de l’Église, a été au centre de l’homélie du Pape François. Sa réflexion s’est inspirée de la lecture de l’extrait du premier livre de Samuel (1, 9-20), dans lesquels sont cités trois protagonistes : Anne, le prêtre Éli et le Seigneur. La femme, a expliqué le Pape, « avec sa famille, avec son mari montait, chaque année, au temple pour adorer Dieu ». Anne était une femme dévote et pieuse, pleine de foi, qui toutefois « portait en elle une croix qui la faisait beaucoup souffrir : elle était stérile. Elle voulait un enfant ». La description de la prière affligée d’Anne montre qu’elle « lutte presque avec le Seigneur », en prolongeant son imploration avec « l’âme amère, en pleurant beaucoup ». Une prière qui se résout dans un vœu : « O Yahvé Sabaot ! Si tu voulais considérer la misère de ta servante, te souvenir de moi, ne pas oublier ta servante et lui donner un petit homme, alors je le donnerai à Yahvé pour toute sa vie ». Avec grande humilité, en se reconnaissant « misérable » et « servante », elle a fait « le vœu d’offrir son enfant ». À cet égard, le Souverain Pontife a déclaré que dans l’Église, il y a « tant de femmes aussi bonnes », qui « vont prier comme si c’était un pari », et il a rappelé, par exemple, la figure de sainte Monique, la mère d'Augustin, « qui, avec ses larmes, a réussi à avoir la grâce de la conversion de son fils ». Il a ensuite analysé le personnage d’Éli, pas méchant, mais « un pauvre homme », en révélant entre autres qu’il éprouvait pour lui « une sympathie certaine », car « en moi aussi je trouve des défauts qui me rapprochent de lui et qui font que je le comprends bien ». Ce vieux prêtre « était tombé dans la tiédeur, il avait perdu la dévotion » et « n’avait pas la force d’arrêter ses deux fils » qui étaient prêtres « mais délinquants », et eux étaient vraiment mauvais, ils « exploitaient les gens ». Éli est, en somme, « un pauvre homme sans force » et, pour cela, incapable de « comprendre le cœur de cette femme. Ainsi, en voyant Anne remuer les lèvres, angoissée, il pense « Cette femme a trop bu ! ». Et l’épisode recèle un enseignement pour nous tous : « avec quelle facilité jugeons-nous les personnes, avec quelle facilité n’avons-nous pas le respect de dire : “Mais qu’a-t-elle dans son cœur ? Je ne sais pas, mais je ne dis rien” ». Et il a ajouté : « Comme la pitié manque dans le cœur, l’on pense toujours mal, l’on juge mal, sans doute pour nous justifier nous-mêmes ». La mauvaise interprétation d’Éli est telle qu’« au bout du compte, il lui dit : “Jusqu'à quand seras-tu dans l'ivresse ?” ». Elle lui explique au contraire : « Je suis une femme affligée, je n’ai bu ni vin ni boisson fermentée, j’épanche mon âme devant Yahvé. Ne juge pas ta servante comme une vaurienne : c’est par excès de peine et de dépit que j’ai parlé jusqu'à maintenant ». François a cité à cet égard un épisode qui s’est produit au sanctuaire de Luján, à Buenos Aires, où il y avait une famille avec une petite fille de neuf ans très malade. « Après des semaines de soins, elle n’était pas parvenue à sortir de la maladie, son état avait empiré et les médecins, vers 6 heures de l’après-midi », avaient dit aux parents qu’il lui restait quelques heures à vivre. Alors « le papa, un homme humble, un travailleur, est tout de suite sorti de l’hôpital et s’est rendu au sanctuaire de la Vierge, à Luján », à soixante-dix kilomètres de là. Étant « arrivé vers 10 heures du soir, tout était fermé, et il s’est agrippé à la grille du portail et a prié la Vierge et il a lutté dans la prière. Cela est un fait réel, du temps où j’étais là-bas. Et ainsi, il est resté jusqu'à 5 heures du matin ». Cet homme « priait, pleurait pour sa fille, luttait avec Dieu par l’intercession de la Vierge pour sa fille. Puis il est rentré, il est arrivé à l’hôpital vers 7 ou 8 heures, il est allé chercher sa femme et elle pleurait et l’homme pensa que la petite était morte mais elle lui dit : “Je ne comprends pas, je ne comprends pas... Les médecins sont venus et ils nous ont dit qu’ils ne comprenaient pas ce qui est arrivé”. Et la petite fille rentra chez elle ». Concrètement avec « cette foi, cette prière devant Dieu, convaincu qu’il est capable de tout, car il est Seigneur », le père de Buenos Aires n’est pas sans rappeler la femme du texte biblique. Celle-ci n’a pas seulement obtenu « le miracle d’avoir un enfant après un an, comme le dit la Bible et d’en avoir eu beaucoup d’autres », mais elle est également parvenue au « miracle de réveiller un peu l’âme tiède de ce prêtre ». Voici alors l’enseignement conclusif. « La prière fait des miracles ».
Copyright © Dicastero per la Comunicazione - Libreria Editrice Vaticana