PAPE FRANÇOIS
MÉDITATION MATINALE
EN LA CHAPELLE DE LA MAISON SAINTE-MARTHE
Mardi 16 juin 2015
(L'Osservatore Romano, Édition hebdomadaire n° 27 du 2 juin 2015)
Richesse et pauvreté
La «théologie de la pauvreté» est le nœud central de la réflexion du Pape, qui est partie de l’extrait de la deuxième Epître aux Corinthiens (8, 1-9), dans lequel saint Paul «est en train d’organiser dans l’Eglise de Corinthe une collecte pour l’Eglise de Jérusalem, qui vit des moments difficiles de pauvreté». Pour éviter que la récolte ne soit faite de la mauvaise façon, l’apôtre «fait quelques considérations», une sorte de «théologie de la pauvreté», justement. Des précisions nécessaires car le mot «pauvreté» est un mot «qui met toujours dans l’embarras». Bien souvent en effet, nous avons entendu dire: «Mais ce prêtre parle trop de pauvreté, cet évêque parle de pauvreté, ce chrétien, cette sœur, parlent de pauvreté... Mais ils sont un peu communistes, non?». Et au contraire, «la pauvreté est précisément au centre de l’Evangile», si bien que «si nous ôtions la pauvreté de l’Evangile, l’on ne comprendrait rien au message de Jésus». Paul s’adresse à l’Eglise de Corinthe: «Et comme vous êtes riches, pensez à eux, à l’Eglise de Jérusalem». Mais de quelle richesse Paul parle-t-il? La réponse se lit immédiatement après: «Vous êtes riches en tout, foi, parole, science, empressement de toute nature, charité que nous vous avons communiquée». Et elle est suivie par une exhortation: «ainsi il vous faut aussi exceller en cette libéralité». Faites plus précisément «en sorte que cette richesse si grande — le zèle, la charité, la Parole de Dieu, la connaissance de Dieu — parvienne jusque dans les poches». Car «quand la foi n’arrive pas jusqu’aux poches, ce n’est pas une foi authentique», et cela est «une règle d’or» dont on doit se souvenir. De l’extrait de Paul émerge, ensuite, une «opposition entre richesse et pauvreté. L’Eglise de Jérusalem est pauvre, en difficulté économique, mais elle est riche, car elle possède le trésor de l’annonce évangélique». Et c’est précisément «cette Eglise de Jérusalem, pauvre», qui a enrichi l’Eglise de Corinthe «avec l’annonce évangélique: elle lui a donné la richesse de l’Evangile». Ceux qui étaient économiquement riches étaient en réalité pauvres «sans l’annonce de l’Evangile». Il y a «un échange mutuel» et ainsi «de la pauvreté vient la richesse». C’est alors que «Paul, par sa pensée, arrive au fondement de ce que nous pouvons appeler “la théologie de la pauvreté” et pourquoi la pauvreté est au centre de l’Evangile». En considérant l’aspect concret de la vie quotidienne, le Pape a expliqué que «quand nous apportons une aide aux pauvres, nous ne faisons pas des œuvres de bienfaisance chrétiennes». Nous sommes face à un acte «bon», un acte «humain», mais «cela n’est pas la pauvreté chrétienne, que veut Paul, que prêche Paul». Parce que pauvreté chrétienne signifie «que je donne ce qui est à moi et pas le superflu, et même le nécessaire au pauvre, parce que je sais qu’il m’enrichit». Et pourquoi est-ce que le pauvre m’enrichit? «Parce que Jésus a dit que lui-même est dans le pauvre». Voilà pourquoi la pauvreté «n’est pas une idéologie». La pauvreté «est au centre de l’Evangile». Dans la «théologie de la pauvreté», nous trouvons «le mystère du Christ qui s’est abaissé, s’est humilié, s’est appauvri pour nous enrichir». On comprend ainsi «pourquoi la première des béatitudes est: “Heureux les pauvres d’esprit”». Et «être pauvre d’esprit signifie aller sur cette voie du Seigneur», qui «s’abaisse tant» qu’il se fait «pain pour nous» dans le sacrifice eucharistique. C’est-à-dire que Jésus «continue de s’abaisser dans l’histoire de l’Eglise, dans le mémorial de sa passion, dans le mémorial de son humiliation, dans le mémorial de son abaissement, dans le mémorial de sa pauvreté, et il nous enrichit de ce “pain”».
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