LINEAMENTA
CITÉ DU VATICAN
1997
© Secrétairerie Générale du Synode des Évêques et Libreria Editrice Vaticana.
Ce texte peut être reproduit par les Conférences épiscopales ou avec leur autorisation à condition que son contenu ne soit pas modifié et que deux exemplaires de la publication soient envoyés à la Secrétairerie Générale du Synode des Évêques, 00120 Cité du Vatican.
PRÉFACE
Au n· 38 de sa Lettre apostolique Tertio Millennio Advenientedu 10 novembre 1994, le Pape Jean-Paul II annonçait son intention de convoquer une Assemblée Spéciale du Synode des Évêques pour l'Océanie. Peu après cette annonce, le Saint-Père nommait un Conseil Pré-Synodal de la Secrétairerie Générale du Synode des Évêques pour l'Assemblée Spéciale pour l'Océanie, composé en grande partie par des évêques de ce continent. La Secrétairerie Générale a immédiatement entamé le processus de préparation de cette assemblée synodale spéciale en envoyant une lettre-questionnaire à tous les évêques en activité en Océanie, qu'ils appartiennent aux Églises orientales ou à l'Église latine, ainsi qu'aux Dicastères de la Curie Romaine et à l'Union des Supérieurs Généraux: cette consultation voulait aboutir à définir un thème d'importance contemporaine, d'intérêt universel et d'une urgence toute particulière à traiter au cours de cette Assemblée Spéciale du Synode. Les résultats furent d'abord discutés, puis utilisés par le Conseil Pré-Synodal pour l'Assemblée Spéciale pour l'Océanie afin de formuler un thème à soumettre au Saint-Père.
Parmi les thèmes avancés par le Conseil, le Saint-Père a ensuite choisi pour cette Assemblée Spéciale : Jésus-Christ: suivre Son chemin, proclamer Sa vérité, vivre Sa vie: un appel pour les peuples d'Océanie. Ce sujet constitue un appel, d'abord et avant tout, à tous les membres de l'Église en Océanie et, ensuite, à toutes les populations du Pacifique, à se tourner vers Jésus-Christ, Celui qui dit qu'Il est «le chemin, la vérité et la vie» (Jn 14,6). En s'efforçant de marcher sur les pas du Seigneur, de proclamer Sa vérité et d'y adhérer, et de rester chaque jour en communion avec Lui et avec ses frères, l'Église espère trouver une réponse appropriée et opportune - en paroles et en faits - aux circonstances uniques existant au sein de l'Église en Océanie ; elle espère aussi contribuer de façon positive au bien de toutes les populations et de toutes les cultures de la région, comme partie du programme de l'Église pour l'évangélisation en vue du Grand Jubilé de l'An 2000.
Afin de présenter ce sujet synodal de façon générale, la Secrétairerie Générale, en coopération avec les membres de ce même Conseil Pré-Synodal et avec des théologiens de l'Océanie, a rédigé des Lineamenta, le premier d'une série de documents relatifs à l'Assemblée Spéciale pour l'Océanie. Comme son nom le suggère, le document actuel est proposé comme une vaste «esquisse» du thème. Il a uniquement pour but d'encourager une réflexion et une prière communes sur le sujet et de provoquer des suggestions et des observations. C'est dans ce sens qu'une série de Questions a été insérée à la fin du document.
Il est souhaité que ces Lineamenta engendrent une grande richesse de réponses dans toute l'Église en Océanie afin que les évêques des Églises orientales et latine puissent disposer des informations nécessaires pour une première rédaction de leurs réponses officielles. Par conséquent, en eux-mêmes, les Lineamenta ne sont pas inclus dans l'Ordre du Jour de l'Assemblée Spéciale. Un «document de travail», ou Instrumentum laboris, sera préparé ensuite sur la base des réponses officielles envoyées par les évêques d'Océanie, les différents Dicastères de la Curie Romaine et l'Union des Supérieurs Généraux. C'est donc à eux qu'il reviendra d'utiliser les contributions qu'ils auront reçues pour rédiger leurs réponses officielles qui, à leur tour, seront remises à la Secrétairerie Générale. Une grande richesse de réponses assurera aux Pères Synodaux, réunis en Assemblée Spéciale, de disposer du matériel nécessaire pour pouvoir traiter en profondeur un thème d'une grande importance pour l'Église en Océanie.
Par conséquent, c'est toute l'Église en Océanie qui est invitée à participer à cette consultation: prêtres diocésains et religieux, religieux et religieuses, laïcs et laïques, séminaires et facultés de théologie, conseils pastoraux, mouvements et groupes catholiques, communautés paroissiales et toutes les organisations ecclésiales. Plus nombreuses seront les réponses, plus complète et substantielle sera l'information proposée à ceux qui auront la responsabilité de rédiger leurs réponses officielles. Cela conférera également un caractère substantiel et complet au texte de l'Instrumentum laboris, ce document qui sera au centre de l'attention et de la discussion durant l'Assemblée Spéciale du Synode des Évêques pour l'Océanie.
Dans l'élaboration des réponses aux Lineamenta, il faudra avoir présents à l'esprit les points suivants. La quantité et la diversité des questions proposées à la fin du présent document ont été choisies délibérément pour constituer un guide à la structuration des réflexions sur le thème de l'Assemblée Spéciale pour l'Océanie. Ce sont donc ces questions, et non pas le texte des Lineamenta, qui devront servir de base à toutes les réponses. À cet égard, toutes les observations avancées devront faire explicitement référence aux questions concernées. Par ailleurs, les questions ne doivent pas nécessairement toutes recevoir une réponse. Selon les circonstances particulières, les personnes ou organismes répondants sont libres de répondre uniquement aux questions qui leur semblent les plus importantes.
Dans la région du Pacifique, les réponses venant des communautés et des groupes ecclésiaux à l'intérieur d'un diocèse ou d'un archidiocèse sont envoyées à l'évêque local qui emploiera ces informations pour rédiger sa réponse officielle. Contrairement à la procédure synodale habituelle, cette réponse officielle ne sera pas transmise à la Conférence épiscopale dont dépend l'évêque, mais directement à la Secrétairerie Générale. Les réponses officielles de ces évêques, individuellement, et celles de la Curie Romaine et de l'Union des Supérieurs Généraux devront parvenir à la Secrétairerie Générale du Synode avant le 1er février 1998. Tous ceux qui désirent contribuer, de quelque façon, à ce processus de réflexion, devront bien avoir cette date limite présente à l'esprit.
Avec la publication des Lineamenta commence une étape cruciale de la préparation de l'Assemblée Spéciale, une étape qui s'appuie sur la coopération et les prières de chaque membre de l'Église. Le mystère de la communion enseigne que l'Église s'étend au-delà des limites d'une nation, d'un continent ou d'une région donnés du globe - au-delà du monde tel que nous le connaissons - dans le temps au coeur de l'éternité. En se préparant à cette célébration spéciale de la communion des évêques, l'Église en Océanie le fait en union mystique avec l'Église tout entière. Dans cet esprit, pendant cette période de préparation, elle se trouve soutenue par les prières et les bonnes oeuvres de tous les membres de l'Église, en particulier ceux de la communauté céleste des Saints et des Martyrs de l'Océanie. Et, comme dans toutes les initiatives difficiles, elle se tourne vers la Vierge Marie pour lui demander son soutien infaillible.
Jan P. Cardinal Schotte, C.I.C.M.
Secrétaire Général
INTRODUCTION
JÉSUS-CHRIST ET LES PEUPLES D'OCÉANIE
L'Océanie et ses populations
1. Sur la carte géographique du monde l'Océanie est classée comme la cinquième grande division du globe. À cause de la distance qui la sépare des autres pays, elle fut la dernière zone à être découverte par les navigateurs européens dans leurs voyages d'exploration. Mais les derniers découverts sont maintenant les nouveaux arrivés en qui l'Église se réjouit. L'Océanie, en raison de son immensité, a constitué un défi tant pour les explorateurs et les missionnaires que pour ses indigènes eux-mêmes. Elle couvre plusieurs millions de kilomètres carrés du plus grand océan de la terre ainsi que le bloc continental de l'Australie. Son nom, bien évidemment, vient de l'océan qui regroupe les îles et les blocs continentaux en une unique zone géographique. Les premiers navigateurs constatèrent, qu'à cause de son «caractère pacifique», après une terrible tempête ils pouvaient subir une accalmie les laissant immobiles sur l'océan, sans vent pour gonfler leurs voiles. Ainsi ce grand océan devint l'Océan Pacifique.
Cependant, le mot «pacifique» est plus qu'un nom : il peut aussi être employé pour caractériser le mode de vie des populations de la région. Le «mode pacifique» se réfère souvent à la façon typique dont les gens de la région traitent leurs problèmes. Mais, bien plus que tout cela, il indique combien les gens sont attachés à la paix et combien ils la désirent. La paix engendrée par le dialogue et le consentement est, de façon générale, préférée aux solutions violentes. Bien que ce sentiment de paix ait été violé à de nombreuses reprises dans l'histoire et dans les luttes successives pour l'auto-suffisance, il persiste encore en tant que règle et idéal traditionnels pour nombre de populations de la région. Depuis la fin de la Deuxième Guerre Mondiale, d'importants changements politiques et économiques se sont vérifiés dans la région. Dans certains cas, de grands changements s'effectuent en Océanie de manière relativement pacifique. Dans d'autres cas, on voit croître la tendance à employer la force et la violence, comme en témoigne tristement le cas de la Papouasie - Nouvelle-Guinée.(1)
L'Océanie est le centre d'une grande variété de populations. Dans le cadre de l'Assemblée Synodale, le mot «Océanie» se réfère à toutes les populations vivant dans la zone géographique de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande et des Îles du Pacifique réunies, comme la Mélanésie, la Polynésie et la Micronésie. (2) Certains groupes ethniques, comme les Indiens, les Chinois, les Vietnamiens, les Coréens, les Philippins et les Javanais qui, à l'origine, étaient arrivés en tant que travailleurs immigrés importés ou sous contrat, sont désormais des citoyens à part entière en Océanie. Même après plusieurs années de résidence, parfois plus d'un siècle, chaque groupe conserve encore son identité caractéristique originelle. Nombre d'habitants des Îles se sont rendus en Australie ou en Nouvelle-Zélande et ont constitué leurs propres groupes culturels. Les populations originelles d'Australie - les Aborigènes - et de Nouvelle-Zélande - les Maoris (qui appellent leur pays Aotearoa) - se trouvent maintenant en minorité dans leurs propres pays, situation due à la colonisation de ces deux pays par des colons européens, principalement venus d'Angleterre, d'Irlande et d'Écosse. De nombreux Européens se sont également installés dans diverses îles du Pacifique. Au cours des cinquante dernières années, différents autres groupes ethniques venus d'Europe et d'Asie ont immigré en Océanie.
Du point de vue de la découverte historique, l'Océanie - à l'exception des Îles Mariannes, colonisées et christianisées au XVIème siècle - a été la dernière zone géographique à être touchée par la colonisation européenne et par l'activité missionnaire chrétienne. Les puissances coloniales avaient conscience de ce que la découverte d'un continent au-dessous de la Croix du Sud aurait complété leur carte géographique du monde. Elles le nommèrent «la Terre du Sud (Terra Australis) de l'Esprit Saint», en se référant à Celui qui complète la communion de la Trinité. Le service généreux de tant de missionnaires poussés par l'Esprit Saint a contribué à apporter l'Évangile du Christ dans la région, rendant de la sorte manifeste la présence de l'Esprit en Océanie, et Ses nombreux fruits parmi les populations locales.
Aujourd'hui, les populations de l'Océanie se trouvent à affronter des changements significatifs, qui ont commencé depuis la Deuxième Guerre Mondiale, alors que le Pacifique se transformait en terrain de bataille et en zone militaire stratégique. Jusqu'alors, tous les gens de la région avaient vécu relativement en paix, sans trop se soucier du monde extérieur. Conséquence de cette Grande Guerre, la situation commença à changer, lentement mais de façon inévitable. L'idée de démocratie fut introduite, de nombreuses petites îles devinrent politiquement indépendantes, la Guerre Froide se termina et la Ceinture du Pacifique vit grandir son importance économique. Dans de nombreux cas, l'Océanie essaie actuellement de trouver sa propre identité dans ses relations avec l'Europe, l'Amérique et l'Asie. Après de nombreuses années de dépendance des puissances coloniales, la région cherche comment réaliser une plus grande autosufisance de ses habitants, grâce à l'unité dans la diversité, à la coopération au sein d'une concurrence amicale et à une interdépendance accompagnée d'autonomie. Toutefois, pour parler de façon réaliste, nombreux sont ceux qui se rendent compte qu'une véritable autonomie politique et économique, ainsi qu'une identité culturelle propre, doivent prendre en considération les autres zones du globe et leurs habitants.
Un Synode pour l'Océanie
2. Le mouvement synodal est un processus de communion dynamique qui se réalise à plusieurs niveaux. L'assemblée synodale actuelle rassemble une partie des évêques de l'Église cum et sub Petro, «avec Pierre et sous sa direction», en la personne du Saint-Père, dans une expression de communion en tant que collège épiscopal, en ligne de succession directe du collège des Apôtres, guidé par son Chef, Saint Pierre. Le mystère de la communion se manifeste et agit particulièrement dans l'Église locale où tous les évêques sont appelés à participer au processus synodal, que ce soit au sein de leurs Églises particulières en engageant tous les niveaux de la communauté dans des initiatives de collaboration au cours des différentes phases du synode, ou bien sur une dimension plus vaste, en coopérant et en collaborant avec les structures épiscopales régionales, nationales et internationales qui, à leur niveau, essaient d'impliquer les structures et les organismes ecclésiaux dans la participation au processus synodal. Il est demandé à tous les membres de l'Église de répondre à l'appel synodal à la communion et à la participation au processus synodal, chacun selon son état et sa vocation au sein de l'Église. De cette manière, le synode reste authentique à sa signification éthymologique de «marcher ensemble» dans l'unité, unité d'esprit, d'âme et d'objectif.
Jésus-Christ est la source de l'unité de l'Église et le Chemin qui conduit à une plus grande communion. C'est pourquoi, Il est le Chemin que, tous, dans l'Église, doivent nécessairement emprunter. Son Esprit incite l'Église tout entière à une communion plus profonde avec Dieu, en tant que Trinité, et avec les uns et les autres. Comme signe et principe d'unité dans l'Église locale, l'évêque a le devoir de stimuler la communion, particulièrement à travers le sacrement de l'Eucharistie. Les évêques ont aussi la responsabilité de promouvoir la communion entre eux. Par conséquent, le Synode des Évêques est une structure de grande importance pour les évêques car il est l'expression et l'instrument de la communion parmi eux et avec l'Évêque de Rome, successeur de l'Apôtre Pierre. Dans les Assemblées générales ordinaires, les évêques viennent du monde entier pour célébrer ensemble cette communion, et par la prière et le débat sur des sujets d'importance pastorale pour l'Église.
En commençant par l'Assemblée Spéciale du Synode des Évêques pour l'Afrique, le Saint-Père a jugé opportun de convoquer des Assemblées Spéciales au niveau continental : Amérique, Asie et Europe. Ces synodes continentaux - y compris l'Assemblée Spéciale du Synode des Évêques pour l'Océanie - constitue une partie de la préparation de l'Église au Grand Jubilé de l'An 2000. Mis à part ce caractère spécial, ils manifestent et souvent encouragent la communion parmi les évêques et, en conséquence, dans l'Église tout entière.
Les évêques d'Océanie peuvent compter sur diverses institutions ecclésiales qui les soutiennent dans leur ministère épiscopal d'attention et d'intérêt pour leurs Églises particulières et qui expriment leur communion et leur collégialité. Parmi celles-ci, les quatre Conférences épiscopales de la Région : la Conférence des Évêques catholiques d'Australie, la Conférence épiscopale de Nouvelle-Zélande, la Conferentia Episcopalis Pacifici (C.E.PAC.) et la Conférence des Évêques catholiques de Papouasie - Nouvelle-Guinée et des Îles Salomon. Tout récemment, les évêques ont ultérieurement renforcé leur communion et leur collaboration en instituant une structure plus large de coordination : la Fédération des Conférences des Évêques Catholiques d'Océanie (F.C.B.C.O.). Ainsi, ils ont davantage de possibilités pour relever les défis que l'Église doit affronter dans toute la région de l'Océanie.
Afin de renforcer la communion ecclésiale - non seulement parmi les évêques mais aussi dans tout le peuple de Dieu de la région - le Pape Jean-Paul II a effectué plusieurs visites pastorales en Océanie, dans le sillage de son prédécesseur Paul VI qui, en 1970, visita l'Australie et les Samoa Occidentales. En 1981, sur sa route vers le Japon, le Saint-Père a visité Guam pour la béatification de Diego Luis de San Vitores. Trois ans plus tard, il se rendit en Papouasie - Nouvelle-Guinée et dans les Îles Salomon. Deux ans après, il revint en Océanie pour visiter les Îles Fiji, la Nouvelle-Zélande et l'Australie. En 1995, il visita à nouveau la Papouasie - Nouvelle-Guinée, cette fois pour béatifier le catéchiste Peter To Rot. Il alla également béatifier Mère Mary McKillop, en Australie. En toutes ces occasions, le Saint-Père n'a jamais hésité à encourager toutes les populations d'Océanie à s'ouvrir à tous les nouveaux défis à l'annonce de l'Évangile de Jésus-Christ et à être fidèles à ce qu'il y a de meilleur dans leurs traditions culturelles. Les fidèles catholiques, d'autres chrétiens et de nombreuses personnes de bonne volonté en Océanie ont profondément apprécié ces visites et exprimé leur joie dans des chants et des danses. Le Saint-Père, reconnaissant pour leur bon accueil, a exhorté les catholiques à être des messagers de la paix, de la justice et de la joie qu'ils ont reçues dans le Christ Jésus. (3)
L'Assemblée Spéciale pour l'Océanie rassemblera les Évêques catholiques en communion avec l'Évêque de Rome, sous la conduite de l'Esprit Saint. Dans l'actuelle période de son histoire, l'Église en Océanie doit affronter des défis importants. C'est pourquoi l'occasion offerte par le Synode peut constituer un appel puissant à tous les membres de l'Église en Océanie - et même de tous les hommes de bonne volonté de la région - pour qu'ils redécouvrent les valeurs humaines et chrétiennes, traditionnelles et nouvelles, qui caractérisent l'Océanie, et qu'ils fassent en sorte que ces valeurs soient insérées dans la vie. L'histoire de l'Église en Océanie dans le passé a témoigné des succès importants et offert des exemples merveilleux de communion et de vie chrétienne, ce qui est un motif de profonde reconnaissance envers Dieu, à travers Jésus-Christ, et d'encouragement pour affronter les défis contemporains.
Notre époque donc, est celle de l'opportunité, le tempus opportunum, le kairos dont parlent les Écritures (cf. 2 Co 6,2). Pour l'Océanie, c'est l'époque pour de nouveaux efforts, de nouvelles chances et de nouvelles grâces. L'Esprit Saint ne manquera pas d'inspirer l'Église de cette partie du monde qui porte son nom. Inspiré et guidé par l'Esprit, le mouvement synodal en Océanie peut fournir l'occasion d'une renaissance et d'un renouveau dans le programme de l'Église pour une nouvelle évangélisation à la lumière du Troisième Millénaire. Dans un certain sens, le mouvement synodal peut également servir comme un moyen de retrouver la paix - l'un des fruits de l'Esprit Saint - une paix qui caractérise aussi bien la région elle-même que la façon de vivre des populations et leur manière de résoudre les difficultés. Cette paix renouvelée ne peut exister qu'en se tournant vers Celui qui est la paix de Dieu et le salut du monde : Jésus-Christ.
Jésus-Christ : le Chemin, la Vérité et la Vie
3. Lorsque Jésus parle de Lui comme «le Chemin, la Vérité et la Vie» (Jn 14,6), Ses mots sont, pour ses disciples - et même pour tous ceux qui les écoutent - une invitation à L'accepter comme étant l'instrument du salut, la vérité qui comble tous les hommes, la vie qui doit être vécue. (4) Cet acte de foi n'est pas quelque chose de réalisé par un individu, de façon isolée des autres. Bien que l'acceptation de Jésus dans sa vie comme le Chemin, la Vérité et la Vie est toujours un choix ou un acte personnel, celui-ci est effectué dans le contexte de la communauté de croyants par la célébration du sacrement du Baptême. Tout comme l'individu, la communauté ecclésiale accueille dans la foi la présence salvifique de Jésus. En ses membres l'Église suit le Chemin, reçoit et enseigne la Vérité et vit la Vie, dons de Dieu, le Père, à tous les hommes. Ne s'agit-il pas là des mêmes dons que ceux qui sont présentés dans l'Esprit Saint, Lui-même Don inépuisable de Dieu, un don qui embrasse tout ?
Accepter Jésus comme le Chemin, la Vérité et la Vie n'a pas seulement pour but de réaliser les désirs intenses du coeur de Ses disciples et d'être le fondement de leur unité. Cette acceptation de Jésus doit aussi être vécue de façon à ce que Sa présence salvifique soit offerte à tous ceux qui ne croient pas encore, ou ne croient plus, en Lui. Le Chemin de Jésus doit être parcouru, Sa Vérité doit être reçue et enseignée, Sa Vie doit être vécue de façon à ce que les croyants deviennent des témoins de Jésus aux yeux du monde (cf. Jn 15,27). En témoignant de Jésus-Christ de façon authentique et crédible, les chrétiens seront eux-mêmes une invitation à autrui à partager leur foi et leur joie dans le Seigneur. La foi en Jésus implique que les croyants s'engagent activement à Son service pour le salut des autres. Ils sont appelés à parcourir Son Chemin dans un esprit de mission. En allant dans le monde, ils rencontreront d'autres personnes pour les conduire à Jésus, le Chemin, la Vérité et la Vie.
L'activité véritablement évangélisatrice n'est jamais séparée des actes de charité. En soi, proclamer l'Évangile aux hommes est un acte de charité. Mais la charité va au-delà, en inspirant aux disciples de Jésus à se mettre au service de chaque personne qu'ils rencontrent, et plus particulièrement des pauvres, des marginalisés, des opprimés ; bref, de ceux qui, dans le monde, sont les moins lotis. Par la communion personnelle avec Jésus, ils sont exhortés par Son amour à pratiquer les oeuvres de miséricorde corporelles et spirituelles. Une telle réponse constituera en elle-même une invitation, adressée à autrui, à participer au «banquet du salut» (cf. Mt 22,9-10). Parcourir le chemin de la charité apporte aux autres hommes la présence de l'amour de Jésus qui illumine, qui guérit et qui fortifie. De cette manière, Jésus sera véritablement le Chemin, la Vérité et la Vie, non seulement pour Ses disciples, mais aussi pour tous les hommes de bonne volonté, et donc pour le monde entier.
PREMIÈRE PARTIE
SUIVRE LE CHEMIN DE JÉSUS-CHRIST
Introduction : suivre le chemin de la Mission
4. Suivre le chemin de Jésus-Christ implique que tous Ses disciples acceptent la mission que le Seigneur a confié à Son Église. Jésus, le Fils de Dieu, a été envoyé par le Père dans le monde pour y être le Verbe Incarné, l'expression ineffable de Son amour salvifique. Pendant Sa vie publique, Il a parcouru le pays pour apporter la Bonne Nouvelle de la venue du Royaume de Dieu. À l'esprit brisé des hommes, Il a apporté la puissance de Sa miséricorde qui guérit et Il a rassemblé dans la communion avec Dieu et avec eux-mêmes ceux qui étaient égarés et rejetés. Jésus a été envoyé en mission pour renouveler et transformer un peuple, afin qu'il soit pleinement le véritable peuple de Dieu, marchant dans la justice et agissant avec miséricorde.
Tout de suite après le début de Son ministère public, Jésus a appelé d'autres hommes à Le suivre. Alors, Il n'a plus marché seul, Il était accompagné de Ses disciples. Parmi eux, Il en a choisi douze pour être le Nouvel Israël, le Nouveau Peuple de Dieu. Il les a envoyés en tant qu'Apôtres, suivis ensuite de soixante-douze autres (cf. Lc 1,10 ss.). Ces premiers missionnaires visitèrent nombre de villages et de villes pour diffuser largement la Bonne Nouvelle du Royaume de Dieu et apporter la puissance de guérison de l'amour de Dieu aux personnes et aux communautés. Jésus les envoya deux par deux car eux non plus ne devaient pas marcher seuls, mais en compagnie d'autres hommes, afin d'apporter un témoignage plus efficace. De cette façon, ils ont exprimé dans l'action leur communion avec les autres hommes grâce à leur union avec Jésus. Cette communion missionnaire fut la piste qui conduisit à la communion plus large et plus profonde qui unit tout le Peuple de Dieu.
En diverses occasions, Jésus rencontrait des hommes et des femmes qui n'appartenaient pas à Son Peuple : le centurion romain (cf. Mt 8,5), la Samaritaine (cf. Jn 4,8-42) et la Syrophénicienne (cf. Mc 7,26). Ils sont venus à Lui et Il les a rencontrés sur Son chemin, comme s'ils avaient été envoyés par le Père pour élargir et étendre le champ de la mission. Plus tard, la communauté de Ses disciples allait poursuivre cette mission sous la conduite puissante de l'Esprit Saint.
Poussés par leur foi juive, les gens venaient à Jérusalem en pèlerinage et s'approchaient des disciples, entrant ainsi en contact avec Jésus. C'est dans une telle occasion que Jésus prédit Sa mort sur la croix, en décrivant l'accomplissement de Sa mission : Il serait élevé de terre et attirerait tous les hommes à Lui (cf. Jn 12,32). Par le mystère de Sa mort et de Sa résurrection, Jésus allait devenir, non plus pour un seul peuple mais pour tous les peuples du monde et pour chaque personne, le Chemin, la Vérité et la Vie.
Immédiatement après la résurrection du Christ, l'Esprit Saint fut envoyé à l'Église, incitant les disciples, par la miséricorde toute-puissante de Dieu, à être les témoins du Christ, à Jérusalem tout d'abord, puis dans d'autres parties du monde. Pour eux, parcourir le Chemin de Jésus, c'était marcher ensemble en tant que missionnaires à travers de nombreux pays et entrer en rapport avec de nombreux peuples de façon à proclamer la Bonne Nouvelle. On connaît bien l'étendue du magnifique exemple provocateur de l'activité missionnaire réalisée par saint Paul, l'Apôtre des Gentils. Avec ses compagnons, il a voyagé très loin, dans le monde connu à cet époque, afin de proclamer Jésus comme le Messie attendu et d'annoncer la fraternité des hommes en Lui. Ceux qui l'écoutèrent dans la foi et acceptèrent le Christ par le sacrement du Baptême furent transformés par la grâce de Dieu et reçurent le pouvoir de vivre selon une justice nouvelle, basée sur la réconciliation, la vérité et l'amour. Il en résulta que, dans ces premières communautés chrétiennes, de nombreuses barrières furent brisées et remplacées par la charité et la fraternité.
C'est à Antioche que les nouveaux convertis reçurent tout d'abord le nom de «chrétiens» (cf. Ac 11,26). Déjà à cette époque, ils étaient reconnus comme ceux qui suivaient le Chemin et furent persécutés à cause de cela (cf. Ac 9,2). Ce Chemin, suivi par les chrétiens et leurs communautés, consistait à croire en Jésus, le Seigneur, et à témoigner de l'Évangile. Paul et les autres Apôtres ont proclamé ce Chemin non seulement par leurs paroles, mais aussi par leur vie, les guérisons qu'ils accomplissaient, leur communion et leur direction. Leur itinéraire missionnaire les a conduits vers d'autres hommes qui n'avaient pas encore la foi. Leur action évangélisatrice a ouvert à un grand nombre de personnes la voie royale qui porte à Dieu et à Son Royaume.
L'activité missionnaire commencée par l'Église primitive a été poursuivie au cours des âges par de nombreuses générations de chrétiens, de sorte que les hommes appelés à suivre la voie de Jésus-Christ ont été toujours plus nombreux. Ils ont délibérément suivi l'appel missionnaire et se sont exposés pour en entraîner d'autres à les suivre sur le Chemin, car le message de Dieu doit atteindre la terre tout entière. Dieu veut que chaque homme puisse entendre la Bonne Nouvelle et prendre en compte Sa Parole salvifique. C'est un processus qui se poursuit jusqu'à la fin des temps. Il n'y a pas de limite à la grâce salvifique de Dieu.
CHAPITRE I
LE CHEMIN DU CHRISTIANISME EN OCÉANIE
Premiers contacts et premiers efforts missionnaires
5. Tout au long de l'histoire de l'Église, beaucoup de siècles ont passé avant que l'Évangile soit prêché dans toutes les régions de la terre, même les plus reculées. L'une des dernières à avoir été atteinte par les missionnaires chrétiens a été l'Océanie. Au XVIIème siècle, l'Europe a entrepris de grands efforts pour explorer et coloniser la région du Pacifique, les accentuant encore au XIXème siècle. À cette époque, l'Église a envoyé des missionnaires effectuer ces traversées non seulement pour répondre aux besoins spirituels des explorateurs et des colons, mais aussi pour évangéliser les populations autochtones. Là où l'Église a profité du passage et de la protection assurés par l'exploration et la colonisation européenne, l'évangélisation n'a pas toujours été en rapport direct avec ces événements. En Australie, par exemple, les efforts missionnaires de l'Église ne sont aucunement liés à l'exploration et à la colonisation. Bien que cela soit difficile à croire, ce n'est qu'après la Deuxième Guerre Mondiale que certaines populations des Îles du Pacifique sont venues en contact avec des explorateurs étrangers et des missionnaires chrétiens. En fait, l'Évangile avait atteint l'Océanie bien avant. Toutefois, une fois accueilli, il a commencé à porter des fruits, justement appelés les «fruits de l'Esprit Saint». Il en résulta que cette partie du monde devint, comme son nom originel le suggérait, la grande Terre méridionale de l'Esprit Saint. Tout comme les étoiles de la Croix du Sud étincelaient dans le ciel de la nuit au-dessus du continent et des îles, de même la Croix du Christ, Lumière du Monde, répandait sa lumière sur la vie de nombreux peuples de l'Océanie.
Les premiers contacts de la chrétienté avec les populations de l'Océanie ont eu lieu pendant les expéditions espagnoles parties d'Amérique du Sud et se dirigeant vers les Philippines, au XVIème siècle. Les explorateurs espagnols et leurs équipages étaient accompagnés par des aumôniers franciscains. Parfois, ils jetaient l'ancre dans la baie de l'une des îles qu'ils rencontraient sur leur chemin et célébraient une Messe sur le rivage. On sait qu'en 1595, une Messe fut célébrée sur l'une des Îles Salomon. La première initiative missionnaire organisée en Océanie fut commandée par la Reine d'Espagne, Marianne, en 1668. Elle envoya des Jésuites des Philippines vers Guam, aux Îles Mariannes. L'entreprise espagnole n'était pas dénuée d'intentions militaires. Une initiative semblable fut ultérieurement lancée vers Tahiti, mais sans succès.
Ces premiers efforts indiquaient ce qui allait devenir un phénomène commun. Tandis que l'Église poursuivait un programme missionnaire s'étendant jusqu'aux confins de la terre, les organisateurs politiques et commerciaux des expéditions coloniales n'étaient que bien peu motivés par des intérêts religieux. Souvent, l'activité missionnaire de l'Église n'était accueillie et tolérée que lorsqu'elle servait l'intérêt stratégique, commercial ou politique de la nation colonisatrice. Après les interventions espagnoles dans la région, ce fut au tour de la Grande-Bretagne, de la France, de l'Allemagne et, plus tard, des États-Unis d'Amérique, de faire valoir leurs intérêts nationaux dans leurs politiques et leurs attitudes coloniales, pour ce qui est des efforts missionnaires en Océanie.
Initiatives du Saint-Siège
6. Une expansion missionnaire de l'Église Catholique en Océanie fut programmée sur grande échelle à la fin du XVIIIème siècle mais ne commença qu'au début du XIXème. Les Souverains Pontifes et la Congrégation pour la Propagation de la Foi (actuellement appelée «Congrégation pour l'Évangélisation des Peuples») prit l'initiative et projeta courageusement l'envoi de missionnaires en Océanie.
Un premier essai fut réalisé en 1827, quand le Pape Léon XII demanda à la Société des Sacrés-Coeurs de Jésus et Marie (SS.C.C.) d'installer des missions à Hawaï. Bien que les premiers prêtres, arrivés en 1831, furent immédiatement déportés du fait de la présence protestante dans ces lieux, ils revinrent s'installer en 1833. Progressivement, les missionnaires pénètrèrent dans les autres îles et en Nouvelle-Zélande, tout d'abord à partir d'Hawaï et de Tahiti, ensuite directement à partir de l'Europe. Il s'en suivit une vaste expansion des postes de missions. Dans ce contexte, il n'y que peu d'événements originaux à mentionner. En 1837, S.E. Mgr Pompallier et les premiers Maristes français atteignirent les Îles Wallis et Futuna. Quelques mois plus tard, ils débarquèrent en Nouvelle-Zélande. Des efforts furent faits pour établir une mission en Nouvelle-Bretagne en 1881. Un an après, sous la conduite du P. Navarre, les Missionnaires du Sacré-Coeur firent un second essai, établissant avec succès les fondations d'une mission en Nouvelle-Guinée. En 1882, le P. Verjus, leur confrère, en compagnie de quelques autres missionnaires, débarqua sur l'Île Yule, où ils commencèrent à prêcher la foi sur la côte de Papouasie. En 1896, le P. Limbrock conduisit, avec succès, un groupe de missionnaires de la Société du Verbe Divin venus fonder une mission sur la côte de Nouvelle-Guinée.
La première hiérarchie en Océanie fut établie en Australie en 1842. Le Vicariat apostolique de Nouvelle-Hollande était déjà créé en 1834 et confié aux Bénédictins anglais. Ceux-ci devaient s'occuper des nécessités religieuses des prisonniers et des colons, dont la plupart était Irlandais et catholiques. Les «hommes de 37» étaient un groupe de prêtres irlandais qui débarquèrent en Australie cette année-là pour établir l'ossature de ce qui devint le système paroissial dans le pays. Les besoins spirituels des chrétiens d'autres dénominations étaient déjà pris en charge par du clergé venant de Grande-Bretagne. Les missionnaires catholiques n'étaient guère bien accueillis en Australie. Les premiers temps les autorités coloniales souvent les persécutaient ou entravaient leurs efforts au service des populations catholiques.
Après le succès des efforts missionnaires des Communautés protestantes d'Europe et d'Amérique dans les Îles du Pacifique, les missionnaires catholiques arrivèrent. Souvent en ayant surmonté d'énormes difficultés, ces missionnaires avaient réussi à établir des contacts avec les populations indigènes et à obtenir des conversions. Il virent l'importance non seulement de convertir à la foi en Jésus-Christ les peuples d'Océanie qui croyaient en des dieux et des esprits qui leur étaient propres, mais surtout de leur enseigner la doctrine catholique et de les accueillir dans la communion de l'Église catholique, avec ses sacrements, sa liturgie et ses dévotions. Là où, au début, les relations entre les responsables chrétiens de ces tentatives missionnaires étaient difficiles, il y a présentement un esprit oecuménique de coopération plus large et un mouvement vers la communion selon la prière et le désir de Jésus.
Activité des Congrégations et des Instituts missionnaires
7. Ceux qui ont le plus travaillé pour les missions en Océanie ont principalement été des membres des congrégations et des ordres religieux. Les premiers furent les Franciscains espagnols et les Jésuites, au XVIIème siècle. Au XIXème, les Bénédictins anglais débarquèrent en Australie. À la fin du siècle, les congrégations apostoliques nouvellement fondées, en particulier celles originaires de France, commencèrent à envoyer leurs missionnaires, prêtres, religieuses et frères en Océanie. Les efforts pionniers des Franciscains, des Jésuites, de la Société de Marie (Maristes), de l'Institut Pontifical pour les Missions Étrangères de Milan (PIME), les Missionnaires du Sacré-Coeur et ceux de la Société du Verbe Divin furent soutenus par l'action missionnaires de bien d'autres congrégations de religieux et religieuses en rapport avec ces premiers groupes, et par l'arrivée de personnes disposées à se sacrifier et venant d'autres congrégations et ordres religieux.
En 1672, après quatre ans de travail missionnaire sur les côtes de Guam, le bienheureux Diego Luis de San Vitores, prêtre jésuite espagnol, fut assassiné pour avoir baptisé la fille mourante d'un chef local. Il est considéré comme le protomartyr des Mariannes. Un prêtre mariste français, saint Pierre Chanel, fut martyrisé à Futuna, en 1841, après un bref apostolat dans l'île. Il est considéré comme le premier saint et le patron de l'Océanie. Un autre missionnaire de l'Océanie, le bienheureux Giovanni Mazzucconi, de l'Institut Pontifical pour les Missions Étrangères de Milan (PIME), fut martyrisé en 1855 dans l'Île Woodlark en Papouasie - Nouvelle-Guinée. S.E. Mgr Jean-Baptiste Épalle, premier Vicaire apostolique de Mélanésie, Mariste, fut le premier évêque à être victime de la violence. Après avoir essuyé une attaque des tribus indigènes sur l'île, il mourut en 1844 sur le bateau qui le ramènait à San Isabel, dans les Îles Salomon.
Le martyre de ces missionnaires sont des exemples des nombreux sacrifices endurés par nombre d'hommes et de femmes dans leurs efforts de diffuser le Royaume de Dieu : des voyages en mer longs et difficiles, la séparation de leur patrie souvent très éloignée, l'isolement et la solitude, le climat tropical et ses maladies dévastantes, les forêts épaisses et les terrains montagneux, la nourriture inhabituelle et le logement précaire, ainsi que la violence des tribus indigènes sont parmi les éléments qui conduisirent souvent à une mort prématurée. Plusieurs missionnaires se noyèrent en essayant de traverser les fleuves et les mers pour apporter les sacrements ou une assistance médicale à ceux qui en avaient besoin.
Actuellement, les congrégations et les ordres internationaux, qui comptent souvent des membres indigènes, continuent de travailler côte à côte avec les congrégations indigènes dans différentes régions de l'Océanie, et de contribuer à la croissance et à la vitalité de l'Église et de sa mission envers la société humaine. Mère Mary McKillop (1842-1909), Australienne, béatifiée en 1995, constitue un magnifique exemple d'activité apostolique et de vie religieuse. Fondatrice des Soeurs de Saint-Joseph du Sacré-Coeur, avec ses religieuses et au côté de nombreux autres religieuses et religieux - en particulier originaires d'Irlande, d'Angleterre et de France-, elle répondit avec générosité à l'immense besoin d'une éducation catholique en Australie et dans les colonies de la région. Jusque bien après la Deuxième Guerre Mondiale, le système éducatif catholique en Océanie fut presque entièrement assuré par des religieux et des religieuses.
Bien d'autres encore - connus ou inconnus - illustrèrent par leurs vies et leurs travaux l'héroïsme des missionnaires, en fondant et en servant l'Église catholique en Océanie. Nombreux furent ceux qui moururent ou souffrirent profondément au service de l'évangélisation, en vivant des temps de grandes difficultés, dont les plus récents remontent à la Deuxième Guerre Mondiale. Leur vie de sacrifice et de générosité restera toujours dans le souvenir des chrétiens de tous les âges comme des exemples qui encouragent à vivre la foi, et leur prière d'intercession sera un soutien solide pour la préparation et la célébration de notre Assemblée Spéciale du Synode des Évêques pour l'Océanie.
Les Océaniens en tant que missionnaires
8. Depuis le début des efforts missionnaires de l'Église dans la région, les missionnaires étrangers ont eu besoin et demandé le soutien des autochtones, femmes et hommes. Ils ont formé des catéchistes afin que ceux-ci travaillent à leurs côtés pour traduire leurs sermons et leurs instructions, pour préparer les populations aux sacrements, pour leur enseigner à prier et pour servir les communautés chrétiennes locales grâce à leur direction spirituelle. Il arriva souvent qu'accompagnés de leurs familles, ces autochtones partent avec les missionnaires pour créer de nouvelles missions en d'autres régions d'Océanie. Tous comme les missionnaires venus d'Europe ont suivi l'exemple missionnaire de Jésus-Christ, ils ont quitté leur maison et leurs familles pour vivre parmi d'autres cultures et d'autres populations étrangères.
Un magnifique exemple de ces catéchistes dévoués est représenté par Peter To Rot, de la Nouvelle-Bretagne (Papouasie - Nouvelle-Guinée), béatifié en 1996. Pendant la Deuxième Guerre Mondiale, nombre de missionnaires furent emprisonnés par les forces d'occupation japonaises. Beaucoup d'entre eux furent tués ou moururent à la suite de blessures ou de maladies tropicales. À l'époque, il était interdit aux catéchistes d'assurer leurs activités parmi les populations indigènes. Peter To Rot perdit la vie parce qu'il refusa de ne plus enseigner et de ne plus assister religieusement les nouveaux convertis.
Tout de suite après 1840, c'est à S.E. Mgr Pierre Bataillon, Vicaire apostolique pour l'Océanie centrale, que sont dûs les premiers efforts pour former le clergé local dans les îles. Bien que le modèle européen de formation s'avérât souvent comme étant trop difficile pour les séminaristes, aboutissant initialement à quelques échecs, de plus en plus de candidats locaux - diocésains et religieux - furent formés et ordonnés prêtres. Encouragés par les exemples de plusieurs prêtres et évêques indigènes remarquables, ils s'unirent à leurs frères missionnaires nés à l'étranger. Et depuis plusieurs années maintenant, nombreux sont les religieuses, les religieux -frères et prêtres- et les prêtres locaux qui, à travers l'Océanie, se sont mis au service de leurs peuples.
En prenant à coeur l'Évangile dans un esprit de foi et en recevant les sacrements avec ferveur, les personnes prennent toujours plus conscience de l'appel missionnaire adressé à l'Église tout entière. À cet égard, les familles chrétiennes ont une grande responsabilité. Les parents chrétiens ont un rôle important à jouer en encourageant leurs fils et leurs filles et en les soutenant dans leur désir de devenir missionnaires non seulement dans l'Église locale mais dans d'autres parties du monde. De nombreux hommes et femmes nés en Océanie ont rejoint les rangs missionnaires des congrégations locales ou internationales, travaillant dans d'autres régions de l'Océanie et dans d'autres pays à travers le monde. De cette façon, les Églises locales d'Océanie manifestent le défi continuel qui consiste à agir en solidarité avec l'Église catholique universelle, afin d'apporter la Bonne Nouvelle aux autres nations et de suivre ainsi le chemin de Jésus, leur Maître et Modèle.
Ce que Paul VI a dit aux catholiques d'Australie, pour qu'ils considèrent l'Océanie tout entière comme leur terrain de mission, peut être repris à l'intention de tous les catholiques d'Océanie : «Levez les yeux et regardez cette immense moisson qui attend d'être cueillie par les ouvriers (cf. Jn 4,35). Comment se peut-il que votre communauté qui a eu la grande chance de recevoir la grâce de l'Évangile, qui a répondu avec ferveur à l'enseignement de vos prêtres et qui offre au monde un remarquable témoignage de foi, de fidélité à la doctrine et de générosité pour le soutien des oeuvres de l'Apostolat, comment est-il possible qu'elle ne soit pas, en même temps, une terre de missionnaires ?».(5)
CHAPITRE II
LE CHEMIN VERS LES NOMBREUSES CULTURES
Introduction
9. Chaque fois que la vie des hommes est touchée par l'Évangile et par la grâce de Jésus-Christ, ceux-ci s'en trouvent transformés. Cet effet n'est pas limité aux seules personnes qui ont été converties. Plus les gens accueillent le christianisme et le vivent dans leur vie, plus la société et la culture s'en trouvent également transformés. De par sa nature, chaque personne est obligatoirement membre de la société humaine. Les valeurs défendues par les membres de cette société, les coutumes qui sont les leurs, leurs croyances, leurs langages, les histoires qu'ils racontent, leur façon d'organiser leur travail et leur temps, et surtout leur façon d'exprimer leurs convictions idéologiques et religieuses, tout cela forme leur façon de vivre, leur culture. L'Église respecte profondément toutes les cultures. En même temps, l'Évangile qu'elle prêche présente des défis uniques pour ce qui est de la culture, en essayant de l'élever, de l'enrichir et de la purifier. En étant reçu dans une culture particulière, l'Évangile s'exprime et est vécu d'une certaine façon, qui devient elle-même un moyen de proclamer l'Évangile à autrui.
La diversité culturelle
10. L'Océanie est caractérisée par la variété de ses cultures. Des populations de diverses cultures vivent ensemble, sur le même territoire, souvent très proches les unes des autres. Ces cultures ne sont pas seulement celles, indigènes, des Îles du Pacifique, de la Nouvelle-Zélande et de l'Australie, mais aussi celles importées de l'Europe et celles développées durant les années de colonisation, de migrations et de lutte pour l'autonomie. Cette variété culturelle peut être illustrée de manière éloquente par les langages. Outre les centaines de langues indigènes, certaines se sont développées et ont été acceptées comme langues communes. L'anglais et le français, bien qu'héritées de l'Europe occidentale, sont maintenant acceptés quasiment partout comme langues officielles en Océanie, chacune étant appropriée d'une manière propre. En Mélanésie, les langues pidgin, avec leur saveur et leur richesse d'expression propres, se sont développées et servent de pont entre les langues européennes et celles du lieu.
Cette même variété de cultures se constate aussi dans l'Église. Les missionnaires ont apporté une foi catholique liée à diverses nations et cultures, principalement européennes. Par la force des choses, ils ont enseigné la foi suivant ces modèles culturels et formés les convertis à exprimer leur foi de la même façon. Dans un climat oecuménique positif, les différentes cultures religieuses d'autres dénominations ont eu une influence sur les communautés catholiques qui vivaient près d'elles. Ces nombreuses cultures influencent la vie de l'Église, non seulement dans les mots, dans les rites et les chants de la liturgie, dans les prières et les pratiques des dévotions, mais aussi dans la prédication, dans l'expression des concepts théologique, dans l'organisation et la direction des communautés.
L'Église catholique s'efforce de respecter la variété des cultures. Voici ce que disait Paul VI à ce sujet : «Loin d'étouffer ce qu'il y a de bon et d'original dans chaque culture, dans chaque forme de culture humaine, l'Église accepte, respecte et met en pratique le génie de chaque groupe humain, conférant variété et beauté la tunique sans couture de l'Église du Christ».(6) L'Église se trouve devant le grand défi qui consiste à accueillir et à incorporer en elle cette variété de cultures qu'elle doit conduire à l'unité et à l'harmonie, grâce au mystère de la communion. Là où les cultures sont respectées, le contact des unes avec les autres peut être enrichissant. Chaque culture peut apprendre des autres, en s'enrichissant souvent et en en recevant même une amélioration.
L'inculturation
11. Le message de Jésus et l'Évangile tels qu'ils étaient prêchés à l'origine les Apôtres étaient profondément marqué par la culture juive de l'époque. Mais en même temps, leur enseignement était différent de cette culture car, avec ses valeurs et ses priorités empreintes de nouveauté, il représentait un défi pour les pratiques et les croyances habituelles. Partout où la Parole de Dieu est prêchée et bien accueillie, cette dynamique dualiste est là aussi présente. Avec ses aspects positifs, sa «semence de la foi»,(7) ses germes de vérité et de justice, la culture existante était promue comme un nouveau langage traduisant la Parole de Dieu. En même temps, elle se trouvait provoquée par l'Évangile, et convertie progressivement. Les éléments positifs de cette culture procuraient ensuite l'aide nécessaire à la poursuite de l'annonce du message de Dieu au peuple de la même culture.
Ce processus d'inculturation fait partie de l'oeuvre évangélisatrice de l'Église dans toutes les cultures de l'Océanie. Dans son «Allocution aux Aborigènes d'Australie», le Pape Jean-Paul II a déclaré : «L'Évangile de Notre Seigneur Jésus-Christ parle toutes les langues. Il estime et embrasse toutes les cultures. Il les soutient dans chaque être humain et au besoin les purifie. Toujours et partout, l'Évangile élève et enrichit les cultures par le message révélé d'un Dieu aimant et miséricordieux».(8)
L'Évangile a été proclamé en Océanie au moyen d'expressions culturelles européennes qui étaient étrangères aux populations indigènes. Certaines formes et certains éléments de cet Évangile inculturé ont disparu et ont laissé la place à des formes et des éléments indigènes. Aujourd'hui, la tendance est de tenir compte de ces formes et de ces éléments culturels, en essayant de voir s'ils peuvent être traduits et transformés de façon créative afin de fournir à l'Église locale une occasion de se renouveler. À l'origine, lorsqu'il fut prêché en Océanie, l'Évangile a contesté les éléments imparfaits ou négatifs de la culture locale. Une grande sagesse a été, et est toujours, nécessaire pour discerner les éléments positifs et négatifs dans le processus d'inculturation. Selon le Pape Jean-Paul II les deux critères à suivre pour une saine inculturation sont : 1) la compatibilité avec les éléments fondamentaux de l'Évangile et 2) la promotion de la communion avec l'Église universelle.(9)
Nombreuses sont les valeurs traditionnelles positives qui sont présentes en Océanie et influencent la vie de l'Église. En même temps, certains développement modernes se trouvent à menacer ces valeurs traditionnelles. D'autres développements, lorsqu'ils sont estimés et traités de façon critique ont le pouvoir d'insuffler une vie nouvelle dans ces valeurs. De telles valeurs positives -anciennes ou nouvelles - enrichissent et améliorent la vie humaine et la culture en Océanie.
La façon dont l'Église exprime sa vie de foi dans des symboles et des rites est liée à la culture des personnes qui reçoivent l'Évangile de Jésus-Christ. Les récits, symboles, musiques, danses, rites et célébrations traditionnelles - qui sont tous des expressions de la mémoire et de l'imagination humaine - font profondément partie des cultures de l'Océanie. En pratiquant une inculturation adaptée, l'Église s'efforce d'incorporer les éléments d'une culture particulière dans sa liturgie, sa pratique des dévotions, sa catéchèse et ses arts sacrés. Elle exprime ainsi la foi en Dieu et la communion parmi les fidèles. Alors que les traditions culturelles locales peuvent être mises en valeur si, par la dynamique dualiste de l'inculturation, elles se trouvent rehaussées par l'Église, elles peuvent également être purifiées de leurs éléments négatifs au cours du processus.
Un défi particulier que doit affronter l'Église en Mélanésie est la tradition indigène est le «cargo cult» (le culte de ce qui tombe du ciel). Le développement économique et les changements politiques et sociaux des époques récentes ont apporté le progrès aux populations indigènes, mais aussi un certain nombre de difficultés culturelles. Les histoires traditionnelles de prospérité, perdue ou supprimée, sont liées aux promesses bibliques d'un nouveau monde de justice et de richesse. La pensée du «cargo cult» s'exprime parfois en des mouvements sociaux, politiques et religieux dangereux. Ce phénomène constitue un défi particulier pour l'Église, dans sa catéchèse et dans sa pastorale des populations indigènes.
La pensée théologique en Océanie ne se réfère pas seulement de manière critique au contexte culturel traditionnel, mais elle prend aussi en compte les développements modernes, comme l'industrialisation, la sécularisation, le dialogue oecuménique et le contact enrichissant avec d'autres religions et philosophies. Nombreux sont les théologiens et les écrivains religieux en Océanie dont l'oeuvre est reconnue au plan international. Leurs contributions à la recherche théologique et à la réflexion religieuse assument une grande importance pour la croissance de l'Église dans cette zone géographique.
Une partie de la mission évangélisatrice en Océanie exige des chrétiens engagés qu'ils dépassent leur culture propre et entrent en contact avec les différentes autres cultures de la région. En partageant avec ces cultures la puissance salvifique de la vérité, de la grâce et de l'amour de Dieu, ils accroissent aussi en eux leur appréciation et leur compréhension de ces mêmes dons, ce qui leur permet de continuer à suivre fidèlement le chemin de Jésus-Christ.
Les minorités ethniques et les populations indigènes
12. Parmi les divers groupes culturels d'Océanie, certaines communautés ethniques se trouvent en minorité. À l'origine, plusieurs d'entre elles formaient des populations mais sont devenues minoritaires à la suite de vagues successives d'immigration comme, par exemple, les Aborigènes en Australie et les Maoris en Nouvelle-Zélande. Certaines ne constituent pas vraiment une minorité mais se sentent injustement traitées comme, par exemple, les Canaques en Nouvelle-Calédonie. Dans certains cas, deux groupements humains formant, en parties égales, une population donnée, se sentent menacés l'un par l'autre ; par exemple, les Fidjiens indigènes et les Fidjiens d'origine indienne dans les Îles Fidji. D'autres groupes minoritaires sont formés par des rassemblements d'immigrés ou de réfugiés récents.
L'Église reconnaît la responsabilité qui est la sienne dans ce domaine et s'engage activement à soutenir ceux qui, au plan social, subissent des injustices. Une attention particulière aux groupes minoritaires est bien la conséquence de l'option préférentielle pour les pauvres dans l'Évangile de Jésus-Christ. Bien que l'Église ne soit pas une entité politique, elle a un rôle à jouer en formant ses fidèles à sa doctrine sociale. Elle enseigne et encourage non seulement ses membres mais aussi toutes les autorités civiles à avoir conscience de leur responsabilité dans le redressement des injustices sociales touchant les minorités ethniques.(10)
Certains groupes ethniques minoritaires luttent avec mille difficultés pour préserver ou faire revivre leur culture. Le Pape Jean-Paul II s'est adressé à eux avec des mots d'encouragement. Bien qu'ils fussent destinés à l'origine aux populations aborigènes et employassent l'imagerie traditionnelle, ils peuvent tout aussi bien s'appliquer à d'autres groupes culturels : «Si vous restez étroitement unis, vous serez comme un arbre qui se dresse au milieu d'un feu de buisson qui fait rage dans brousse. Les feuilles sont roussies et l'écorce dure est cicatrisée et brûlée ; mais, à l'intérieur de l'arbre, la sève coule toujours et sous la terre les racines sont toujours fermes. Comme cet arbre, vous avez enduré les flammes et vous avez toujours la force de renaître. Le temps de cette renaissance est venu».(11) Faire en sorte que l'Évangile touche les problèmes sociaux et culturels est la conséquence pratique et réelle du fait de suivre le chemin de Jésus-Christ.
Les migrations et le tourisme
13. Dans les siècles passés, les populations des îles de l'Océanie étaient réputées pour leurs mouvements de migration. Parfois, les personnes se déplaçaient de leur propre chef, pour réaliser leurs désirs de conquêtes, pour éviter la surpopulation ou encore pour échapper à la violence. D'autres fois, elles étaient contraintes à quitter leurs terres pour aller travailler dans les plantations ou dans les mines sur d'autres îles. Dans les dernières années, ces travailleurs étaient recrutés dans d'autres régions du territoire colonial, principalement en Asie. La tendance traditionnelle des peuples polynésiens à se déplacer d'une île à l'autre fut certainement une aide appréciable lorsque les missionnaires cherchaient des assistants locaux pour installer de nouvelles missions dans d'autres régions de l'Océanie.
Aujourd'hui, on assiste à un important mouvement migratoire non seulement à l'intérieur de la région, mais également à partir de l'étranger. De nombreux habitants des Îles partent en Australie ou en Nouvelle-Zélande pour des raisons sociales ou économiques. D'autres le font parce qu'attirés par de meilleures perspectives dans le domaine de l'éducation et de l'emploi, par une plus grande disponibilité de commodités modernes ou bien davantage de liberté et de respect des droits de l'homme. Ce sont la Nouvelle-Zélande et l'Australie qui, tradition-nellement, ont attiré les immigrants venant d'Europe, et plus spécialement depuis la fin de la Deuxième Guerre Mondiale. Actuellement, les deux pays voient arriver davantage d'immigrants asiatiques, ce qui contribue à une variété croissante de cultures. Parmi ces immigrants, se trouvent des réfugiés économiques ou politiques à la recherche de liberté, de justice et de prospérité. Certains trouvent dans l'Église et ses structures un environnement familier et une source de sécurité et d'identité.
En plusieurs endroits, le nombre croissant d'immigrants dans des sociétés multiculturelles exige une attention de la part de l'Église. Dans le passé, l'Église s'est toujours efforcée de mettre en pratique une pastorale à l'intention des migrants. Il importe que ces immigrants soient considérés comme faisant véritablement partie de la communauté locale dans une Église et une société multiculturelle. Tout programme pastoral aura à préciser si ces immigrants se trouvent «à la périphérie» et attendent d'être assimilés dans la culture dominante, ou bien s'ils constituent une partie permanente de culture et ont besoin de leurs propres ministres, c'est-à-dire de paroisses nationales ou de paroisses choisies qui, dans le cadre de leurs ministères, proposent un apostolat s'adressant aux groupes ethniques. Dans certaines régions de l'Océanie, résultant de ces migrations, l'existence d'Églises catholiques orientales avec leurs propres éparchies, paroisses et traditions, est une source d'enrichissement pour le témoignage de l'Église et sa présence dans la société dans le domaine de la culture.
En Océanie, un autre phénomène social significatif en croissance qui est en rapport avec la mobilité humaine est le tourisme. Le tourisme moderne n'est plus une activité réservée à une minorité, mais bien une industrie dans laquelle sont impliquées des milliers de personnes. Pour les touristes eux-mêmes, c'est un service qui est fourni par cette industrie ; pour les nombreux employés du secteur, c'est un travail et un revenu. En Australie et en Nouvelle-Zélande, sans parler des nombreuses îles du Pacifique avec leurs splendides caractéristiques naturelles et leur culture traditionnelle de l'hospitalité, nombreux sont les endroits qui attirent maintenant les touristes. Alors que l'influence d'une telle industrie sur l'économie locale présente des avantages notables, elle n'est pas toujours aussi bénéfique pour l'environnement, la culture ou les valeurs spirituelles et morales des autochtones.
En proclamant un Évangile d'espoir et de joie authentique, l'Église en Océanie veut s'adresser à ces réalités modernes de la migration et du tourisme. Lorsqu'ils ne sont pas inclus dans le système pastoral traditionnel des paroisses et des aumôneries, ces mouvements de population peuvent aisément donner naissance à des secteurs sociaux auxquels l'Église n'a que peu accès.
Urbanisation et industrialisation
14. Toutes proportions gardées, l'Australie est l'un des pays les plus industrialisés du monde. La Nouvelle-Zélande également compte de vastes zones urbaines, et nombre de pays des Îles du Pacifique voient se développer leurs capitales. Ces zones urbaines attirent toujours davantage de populations qui croient y trouver enfin la suprême liberté, une variété illimitée et une large prospérité. Cependant, lorsque ces rêves ne sont pas réalisés, ces villes souffrent alors d'un accroissement rapide de la population mais aussi du taux des chômeurs et des pauvres. Certaines personnes ne réussisent pas à supporter les situations dues au chômage, à la pauvreté, à l'individualisme, à travers la compétition et parfois une éducation inappropriée pour réaliser les objectifs. Certains jeunes, venus de villages en zone rurale, trouvent dans ces zones urbaines une solution facile à leurs problèmes en s'insérant dans des bandes criminelles ou en pratiquant des professions immorales, comme la prostitution.
Après s'être transférées dans les villes, nombre de personnes désertent l'Église, qu'elles perçoivent comme une communauté réservée à l'élite de la société. Dans la situation qui est la leur, elles ont le sentiment de n'appartenir à aucune classe. Suivre Jésus, qui se fit pauvre Lui-même, pour rencontrer les pauvres des villes est la préoccupation de chacun des membres de l'Église. Là où la communauté ecclésiale offre traditionnellement une assistance matérielle aux pauvres, l'Église dénonce aussi l'injustice de certains développement socio-économiques. Les citoyens et les politiciens catholiques ont le devoir de mettre en oeuvre la Doctrine sociale de l'Église par les moyens appropriés pour affronter les problèmes socio-économiques. C'est de cette manière que les chrétiens individuellement et les communautés chrétiennes ensemble peuvent suivre la voie de Jésus-Christ et répondre aux besoins des pauvres.
De nos jours, en Océanie, l'urbanisation progresse de concert avec la sécularisation. En Australie et en Nouvelle-Zélande, de culture fondamen- talement occidentale, et dans de nombreuses nations des Îles du Pacifique, parmi les populations semble exister une tendance à adopter un mode de vie où la religion occupe une place marginale. On constate une grande différence entre le mode de vie sécularisé dans les grandes villes et celui des villages traditionnels ou le style de vie rural. Cette tendance à la sécularisation porte de plus en plus les gens vers un subjectivisme et une indépendance vis-à-vis des autorités religieuses dans de nombreux domaines de la culture comme le mariage et la vie familiale, la moralité, l'éducation, la politique, l'économie, les communications sociales et l'expression artistique. Pour nombre de personnes, ce mouvement du village vers la ville porte à une perte de la foi et de la pratique religieuse traditionnelle. À propos de la sécularisation, le Pape Jean-Paul II a déclaré en s'adressant aux évêques de Nouvelle-Zélande : «Le sens de Dieu et de son amoureuse Providence a perdu de sa force pour nombre de personnes et même pour des secteurs entiers de la société».(12)
Bien que créant des problèmes et des défis à la foi et à la pratique chrétienne, la sécularisation fournit également de nouvelles opportunités. L'augmentation de la liberté personnelle et sociale invite à un majeur sens des responsabilités et à des prises de décision plus mûres. Cette situation exige des approches théologiques créatives, un culte et des rites emplis de signification, une pratique équilibrée de la spiritualité et de la dévotion, une droiture personnelle, une application de l'enseignement social de l'Église, une organisation religieuse responsable, une action charitable appropriée et une étude plus approfondie d'un éventail plus large des formes contemporaines de ministères. Si elle veut affronter cette nouvelle réalité culturelle de façon adéquate, l'Église doit suivre le chemin de Jésus-Christ, avec courage, patience et sagesse.
DEUXIÈME PARTIE
PROCLAMER LA VÉRITÉ DE JÉSUS-CHRIST
Introduction : le Christ, la Vérité
15. La question qui torturait la conscience de Pilate était «Qu'est-ce que la vérité ?» (Jn 18, 38). La vérité est la question qui agite toute conscience humaine, car c'est en trouvant la vérité qu'une personne découvre une raison de vivre et se propose un mode de vie digne d'être suivi. La vie chrétienne commence par le Baptême qui introduit la personne à la foi. C'est cette foi qui répond à la question de Pilate «Qu'est-ce que la vérité ?» et c'est la seule réponse satisfaisante à la question que pose Paul sur la route de Damas, «Qui es-tu, Seigneur ?» (Ac 9, 4). La réponse à la question sur la vérité est «personnelle» et ceci non seulement pour le fait qu'elle suscite chez une «personne» un engagement à suivre un ensemble d'idées, une philosophie de vie ou un programme déterminé pour un auto-accomplissement, mais aussi parce qu'elle comprend la «Personne» de Jésus-Christ. Avant même de prononcer la moindre parole, le Christ a donné Sa réponse à la question de Pilate, car Il est Lui-même la Vérité. «Je ne suis né, et je ne suis venu dans le monde, que pour rendre témoignage à la vérité. Quiconque est de la vérité écoute ma voix» (Jn 18, 37). La voix du Christ s'adressait directement à Paul, «de personne à personne», l'invitant à changer sa vie en donnant un nouvelle direction à toute son existence : «Je suis Jésus que tu persécutes» (Ac 9, 5). La vérité donc n'est rien d'autre que Jésus Lui-même: «Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie» (Jn 14, 6).
Aujourd'hui, le rôle de l'Église est de poursuivre la mission du Christ en tant que témoin de la vérité. Le défi que l'Église lance au monde entier est de dire Sa vérité en prêchant Sa Bonne Nouvelle, afin que Son appel à la foi, à la conversion et à la plénitude de la vie en Dieu puisse être de nouveau entendu en ces temps qui précèdent le Troisième Millénaire. «En vérité, le mystère de l'homme ne s'éclaire vraiment que dans le mystère du Verbe Incarné [...] Le Christ Seigneur manifeste pleinement l'homme à lui-même et lui découvre la sublimité de sa vocation».(13) L'appel Jean-Paul II à «une nouvelle évangélisation» vise à faire connaître le Christ de par le monde entier.
Une étape cruciale dans ce programme est constituée par l'Assemblée Spéciale du Synode des Évêques pour l'Océanie, afin que l'Église de la région puisse dire avec saint Paul, «... à raison même de la fermeté qu'a prise en vous le témoignage du Christ. Aussi ne manquez-vous d'aucun don de la grâce, dans l'attente où vous êtes de la Révélation de notre Seigneur Jésus-Christ» (1 Co 1, 6-7). Avec les yeux fixés sur le Seigneur de l'Histoire, qui ne sera révélé en totalité qu'à la fin des temps, l'Église en Océanie veut évaluer sa fidélité à l'Évangile et continuer le renouvellement mis en marche par le Concile Vatican II, et tout cela à la lumière du Troisième Millénaire. Le Pape Paul VI a expliqué la raison pour laquelle l'évangélisation - disant la vérité de l'Évangile - doit constituer aujourd'hui pour l'Église la première priorité. «Les conditions de la société nous obligent tous à réviser les méthodes, à chercher par tous les moyens à étudier comment faire arriver à l'homme moderne le message chrétien dans lequel il peut trouver la réponse à ses interrogations et la force pour son engagement de solidarité humaine».(14)
Le but de l'Assemblée Spéciale est d'utiliser l'énergie de l'Évangile pour renouveler la vie de l'Église en Océanie afin de «porter des fruits pour la vie du monde».(15) Le pouvoir de l'Évangile peut pénétrer non seulement dans la conscience des individus, mais il peut également transformer les cultures et les structures sociales qui sont à leur base. Dans ce processus, chaque Église particulière est «une communauté évangélisée et évangélisatrice».(16)
CHAPITRE I
L'ÉVANGÉLISATION
Proclamer l'Évangile
16. L'évangélisation est l'activité consistant à diffuser l'Évangile dans le monde entier, tout comme notre Seigneur Ressuscité l'a ordonné aux disciples (cf. Mc 16, 15). Il s'agit essentiellement de proclamer la vérité de Jésus en tant que voie pour le salut de l'humanité. L'Évangile est annoncé quotidiennement sous sa forme la plus simple : le témoignage de vie de chaque chrétien. En d'autres termes, quand la vie d'un croyant est en accord avec l'Évangile, quand elle a un accent de vérité et qu'elle est authentique, ceux qui n'ont jamais rencontré le Christ sont portés à s'interroger sur la signification ultime de la vie, sur leur destin final et pourquoi le Christ fait une telle différence dans la vie de Ses disciples.
Le témoignage de vie exige aussi que l'Évangile du Christ soit proclamé de façon explicite comme «la raison de l'espérance qui est en vous (1 P 3, 15). Par le pouvoir du Saint-Esprit, la proclamation de la parole de vie appelle les hommes à la foi et à la conversion. Le Christ est le fondement (cf. 1 Co 3, 11 ; Col 2, 7) sur lequel l'Église, en tant que communauté de croyants, est bâtie. Cette expression de la vérité de Jésus proclamée publiquement constitue l'évangélisation au sens le plus strict du terme. L'Église évangélise ses membres à travers la célébration des sacrements, en particulier du sacrement de l'Eucharistie, et, ravivée par cette union intime avec le Christ, elle irradie le message chrétien dans le monde. «Le test de la vérité»,(17) dit le Pape Paul VI, est que soit la communauté évangélisée évangélise les autres, soit elle introduit les autres dans le Royaume du Fils bien-aimé de Dieu, par la puissance de l'Esprit.
Les Églises particulières d'Océanie ont été créées, pour la plupart, par des missionnaires venant d'Europe et d'Amérique. Elles font partie du patrimoine de ces continents, mais elles ne sont ni des Églises particulières «européennes» ni des Églises particulières «américaines». Il est parfois difficile, pour les habitants de l'Europe ou de l'Amérique, d'apprécier le don relativement récent et magnifique de Dieu à ces Églises plus jeunes, nées sous la Croix du Sud. Elles ne sont pas les simples reproductions d'une chrétienté étrangère à la région. Ces Églises particulières ont leur propre unicité et leur propre culture. Elles ont montré leur propre vitalité et leur capacités créatives propres en affrontant une société sécularisée, ainsi que leur propre expansion missionnaire dans le Pacifique, dans la Papouasie Nouvelle-Guinée, dans l'Asie du Sud-Est, en Amérique Latine et en Afrique, en forgeant leur identité intemporelle dans les termes des cultures des nations où elles s'établissaient.
Le moment actuel est crucial car les plus jeunes pays de la région sont dans la phase de la recherche d'un renforcement de leur identité dans les domaines politique, culturel et religieux. Ceci signifie qu'ils assument de plus en plus de nouveaux droits et de nouvelles obligations. Dans ce processus, l'Église a l'opportunité et le devoir de fournir des orientations morales. Une grande opportunité dans le programme d'évangélisation sera perdue si les Églises locales ne saissent pas l'occasion de permettre à l'Évangile de résonner dans chaque milieu culturel.
Les défis présents
17. L'activité missionnaire connaît aujourd'hui dans plusieurs régions un certain déclin et est parfois remise en cause. Cet état de choses a été abordé par le Pape Jean-Paul II dans son Encyclique Redemptoris missio. «Dans l'histoire de l'Église, en effet», écrit il, «le dynamisme missionnaire a toujours été un signe de vitalité de même que son affaiblissement est le signe d'une crise de la foi».(18) Saint Paul souligne la nécessité d'affirmer la vérité de Jésus-Christ pour que tous les peuples du monde, quelque soit leur culture - traditionnelle ou séculière - puissent venir à la foi et en témoigner dans leur vie. «Mais comment l'invoquer sans d'abord croire en lui ? Et comment croire sans d'abord l'entendre ? Et comment entendre sans prédicateur ?» (Rm 10, 14). Si l'Évangile doit croître dans les cultures de l'Océanie, chacun dans l'Église doit devenir plus conscient de la nature missionnaire de l'Église et trouver les moyens de participer à cette mission ecclésiale. Pour quelques hommes et femmes généreux, cela signifie répondre à l'appel à la vocation missionnaire pour faire en sorte que la vérité de Jésus-Christ soit entendue par tous.
Concrètement, il y a encore un grand besoin de missionnaires dans plusieurs régions, pour aider les Églises les plus jeunes à atteindre une plus grande autonomie pour ce qui est de la direction et du personnel autochtones, des infrastructures et des finances. Les pays développés ont eux aussi besoin d'évangélisateurs ayant un esprit missionnaire pour affirmer la vérité de Jésus-Christ, afin que leurs cultures séculières puissent entendre Sa voix, comme si c'était la première fois, avec joie, l'accueillant avec les paroles du psaume, «Chantez au Seigneur un chant nouveau ! Chantez au Seigneur, toute la terre ! » (Ps 96, 1).
Les problèmes de l'évangélisation constatés dans les pays en voie de développement et dans ceux développés de l'Océanie ne sont pas tellement différents. La sécularisation qui affecte les pays développés influence également les communautés indigènes et celles des îles. La plupart de ces régions maintiennent leur identité culturelle locale, dont l'évangélisation doit tenir compte, mais elles doivent aussi subir les tendances de la sécularisation moderne. Ces deux types de société ont besoin de missionnaires capables de s'adresser à chaque situation distincte.
Les difficultés que l'évangélisation doit affronter ne proviennent pas seulement de la foi mais aussi de la culture. Comme conséquence inévitable de la vie de l'Église dans un milieu culturel particulier, au moment où, dans cette expérience culturelle, les institutions sociales changent, l'Église doit elle aussi affronter le défi. Les principaux changements qui se vérifient actuellement dans la société et qui posent de réels défis à l'évangélisation, sont les suivants : l'impact grandissant du gouvernement et de l'économie sur la vie ; l'emphase excessive mise sur la démocratie et le choix personnel ; les abus de l'économie de marché ; la philosophie de type libéral ou individualiste ; les pressions exercées sur le mariage et sur la vie de la famille ; la perte du sens du spirituel; l'influence négative des médias sur les coutumes individuelles et sociales, etc.
Pour faire face à ces défis de la société, l'Église dispose de la vérité de l'Évangile et du mandat du Christ de prêcher l'Évangile à toutes les créatures. Son histoire est celle de générations d'évêques, de membres du clergé, de religieux et de laïcs qui se sont consacrées à proclamer la Bonne Nouvelle. Elle a crée d'innombrables institutions, et notamment le système scolaire catholique, pour propager la foi. Ses hôpitaux et ses programmes sanitaires constituent un exemple de comment l'Évangile de la charité est vécu de façon à aller à l'encontre des nécessités des hommes, de la souffrance et de la mort. Il existe «une nuée de témoins» (He 12, 1) des valeurs de l'Évangile à la maison, dans les lieux de travail, dans les diverses professions et dans la vie civile. Néanmoins, sous différentes manières, l'Église connait l'effort de transmettre l'Évangile à ce monde nouveau en évolution.
Le kérygme ou la première annonce de l'Évangile
18. La première proclamation de la vérité de l'Évangile a été l'appel du Christ à la conversion qui se trouve au début de l'Évangile de Marc : «Les temps sont accomplis et le Royaume de Dieu est tout proche : repentez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle» (Mc 1, 14). Le Royaume de Dieu, c'est maintenant. Le moment est venu pour les hommes de tendre leur main pour saisir leur propre salut. Néanmoins, certaines barrières dressées par la société elle-même, peuvent frustrer les tentatives de beaucoup d'hommes de bonne volonté pour répondre à l'appel à la conversion. Dans ce sens, les difficultés dues à la culture impliquent des difficultés pour la foi, défiant l'Église à entreprendre une «nouvelle évangélisation» de la culture.
Au moment où l'Église entreprend cette tâche de la proclamation initiale de la Vérité, ses efforts rencontrent parfois de la résistance, et même une hostilité ouverte. D'autres fois encore, de puissantes forces sociales essayent d'inventer des moyens de reléguer l'Église dans le domaine de la vie privée afin que sa prédication ne puisse avoir aucune influence sur la vie politique et sur la politique publique. C'est ce qui a été défini comme le divorce du Christ et de la culture. Dans certaines régions de l'Océanie, des philosophies de vie sont décidées à neutraliser le message chrétien et ses effets sur la loi, les institutions sociales et les coutumes, pour que la société puisse fonctionner de façon complètement indépendante de la foi chrétienne.
Cet état des choses ne manque pas d'avoir des effets sur les membres de l'Église, qui sont nécessairement influencés par la culture et dont la formation dépend en partie. Souvent les fidèles ne connaissent l'Évangile que selon l'interprétation qu'en fait la société et non pas comme l'Église et sa Tradition l'entendent. La question est ultérieurement compliquée par les nombreuses philosophies «en vente» sur la place du marché intellectuel, des philosophies qui sont totalement incompatibles avec l'Évangile. La confusion qui résulte de cette situation évoque l'histoire de Babel que nous rapporte l'Ancien Testament (cf. Gn 11, 9). Le besoin d'Esprit qui existe dans ces cultures peut être illustré de façon dramatique dans la vie morale et la conscience de beaucoup d'hommes. Le Pape Jean-Paul II souligne que «c'est au plus intime de la conscience morale que s'accomplit l'éclipse du sens de Dieu et du sens de l'homme, avec toutes ses nombreuses et funestes conséquences sur la vie».(19)
Un tel pluralisme dans les valeurs ne peut que mener à un relativisme éthique, avec un impact destructif sur l'évangélisation.(20) Nombreux sont ceux qui, dans leur recherche d'une signification de la vie, expérimentent toutes sortes de systèmes de valeurs. Ils recherchent un guide moral sûr mais ils sont incertains sur la manière de résoudre leur interrogation. Cette confusion qui pénètre dans les sociétés pluralistes peut parfois être illustrée par la diminution de la participation à la Messe, par l'abandon de la pratique des sacrements et par d'autres manifestations. Nombeux sont ceux qui ne réalisent pas l'indéniable rapport existant entre la foi de l'Église en Jésus-Christ et sa mission sociale visant à développer et à améliorer la société. Malheureusement, les statistiques montrent qu'en certains pays développés le nombre de ceux qui abandonnent la religion institutionnalisée et même qui se déclarent athées - on n'appartenant à aucune religion, va en augmentant.
Le Concile Vatican II
19. Le renouvellement commencé par le Concile Vatican II indique le chemin le plus sûr à suivre en vue de la nouvelle évangélisation de l'Église, un programme qui a déjà connu des résultats très positifs. Le Concile peut être considéré comme «une nouvelle Pentecôte» pour l'Église, un nouvel épanchement du Saint-Esprit sur l'Église, pour la raviver, la guider et la renforcer au moment où elle cherche des chemins pour apporter la Vérité à la culture moderne. Par exemple, la Constitution Pastorale sur l'Église dans le monde moderne et le Décret sur la liberté religieuse ont promu une compréhension de la foi en tant qu'engagement conscient, libre et mûr au Christ, engagement qui doit être vécu dans un monde en perpétuel changement. «Et vous connaîtrez la vérité et la vérité vous libérera» (Jn 8, 32).
L'erreur de séparer la foi de la vie ne subsiste pas pour ceux qui ont compris correctement le message du Concile. L'Esprit est véritablement présent et agit en Océanie en indiquant de nouveaux chemins à l'Église pour dire la vérité de Jésus-Christ dans une société séculière : une liturgie renouvelée dans les langues du pays ; des efforts constants, au niveau national et diocésain, pour améliorer la présentation de la foi ; de nouveaux textes catéchétiques et des cours pour catéchistes ; l'introduction de l'éducation à la foi pour les adultes et l'engagement de nombreux catéchistes dévoués dans la préparation de la prochaine génération de catholiques, en particulier pour ce qui concerne les sacrements ; de nouveaux mouvements spirituels et la multiplication de centres de retraite et de maisons de prière ; la possibilité d'une éducation universitaire en théologie pour les laïcs et les religieux ; des groupes d'étude et d'action sur l'enseignement social de l'Église ; les déclarations des évêques sur les questions sociales et l'engagement des organisations ecclésiales dans les initiatives en faveur de la justice et de la paix dans la société en général ; une conscience de l'importance des cultures indigènes pour la religion et la spiritualité ; une réflexion théologique systématique sur les réalités locales.
La catéchèse : grandir dans la foi
20. Dans l'oeuvre de l'évangélisation, le programme de formation grâce à laquelle les personnes grandissent et approfondissent leur connaissance de la foi est dénommé catéchèse. Pour accomplir cette tâche à l'intention de ses membres, l'Église en Océanie, comme toute Église locale dans le monde, cherche de nouveaux chemins d'expression de la foi qui soient l'expression des sensibilités positives de la culture moderne tout en restant fidèles aux Écritures, à la doctrine de l'Église et à la Tradition. Le Catéchisme de l'Église catholique est considéré par beaucoup comme une source bienvenue de conseils pour déterminer le contenu de la catéchèse, et comme un instrument utile pour aider les personnes à mieux approfondir la signification de la foi. Ce travail est considéré d'une très grande importance pour certaines zones de l'Église en Océanie où, apparamment, l'enseignement de l'Église n'est pas connu de façon adéquate.
S'inspirant des paroles de saint Jérôme, qui dit que «l'ignorance des Écritures est l'ignorance du Christ»,(21) la tendance actuelle est de donner une plus grande importance à l'Écriture dans la catéchèse. Le Concile Vatican II met l'accent sur son caractère essentiel : «la prédication ecclésiastique tout entière, tout comme la religion chrétienne elle-même, il faut donc qu'elle soit nourrie et guidée par la Sainte Écriture».(22)
Dans certaines zones de l'Océanie, des problèmes existent à cause du manque d'une catéchèse appropriée. Dans ces situations, les personnes peuvent porter le nom de «catholiques» sans vraiment chercher à approfondir la foi dans leurs vies personnelles. L'appel à la foi demande nécessairement à être suivi par une explication plus approfondie de la signification de la foi. À cet égard, un grand travail reste encore à faire dans la rédaction des catéchismes nationaux et locaux.
Le dissentiment de certains individus ou groupes vis-à-vis de l'enseignement officiel de l'Église, comme par exemple dans le cas de la contraception, de la fécondation in vitro ou d'autres enseignements moraux, constitue un contre-témoignage à la seule et unique vérité de l'Évangile. Cela peut avoir différents effets négatifs sur les fidèles, rendant obscur quelquefois la proclamation de Jésus-Christ comme Sauveur. En catéchèse, une approche unifiée de la part du clergé, des religieux et des laïcs aideraient grandement dans la lutte contre le dissentiment, ainsi que contre ses effets néfastes.
Un autre facteur d'inquiétude dans le domaine de la catéchèse est constitué par la situation de nombreux jeunes gens qui fréquentaient les sacrements à l'école primaire mais qui abandonnent la pratique religieuse durant l'enseignement secondaire, en opposant, dans certains cas, une forte résistance à la catéchèse. Si parfois ces personnes se tournent à nouveau vers l'Église à l'occasion de la préparation au sacrement du mariage ou des cours concernant l'attribution des sacrements à leurs enfants, un grand nombreux d'entre eux, à cause de facteurs culturels, n'ont que peu d'occasions de contact avec l'Église. Ce type de situation appelle tous les membres de l'Église, en particulier ceux qui sont en famille, dans les paroisses et dans la catéchèse, à témoigner de l'amour du Christ, le Bon Pasteur (cf. Jn 10, 11 s.).
Dans le monde actuel, l'Église est constamment défiée à toucher les hommes qui ont été formés dans une société à l'unisson avec les valeurs séculières. Il est souvent difficile pour l'Église de trouver une tribune dans la société civile pour présenter son message de salut. Les médias, et particulièrement la presse et la télévision, sont précisément conçus comme étant les moyens désignés pour atteindre tous les niveaux et tous les groupes de la société d'aujourd'hui. Malheureusement, leur usage est parfois limité aux seuls intérêts économiques. L'Église cherche à tirer parti, dans son programme d'évangélisation, des diverses technologies modernes offertes par les masses-médias. Même si les médias ont souvent une attitude ouvertement critique vis-à-vis de l'Église, l'utilisation des diverses formes de communication sociale est une nécessité pour prêcher le Christ à de vastes communautés, qu'elles soient catholiques ou non-catholiques, croyantes ou non croyantes.
Les moyens pour annoncer la vérité de Jésus-Christ dans une culture fondamentalement séculière doivent être encore soigneusement élaborés. Le Christ a promis sa présence à ses disciples, «Je suis avec vous pour toujours» (Mt 28, 20) par Son Esprit pour les «introduire dans la vérité tout entière» (Jn 16, 12). L'Assemblée Spéciale pour l'Océanie est un don spécial de Dieu pour que l'Église de l'Océanie puisse «entendre ce que l'Esprit dit aux Églises» (Ap 2, 7) pour aller à la rencontre des défis actuels.
CHAPITRE II
OECUMÉNISME ET DIALOGUE INTER-RELIGIEUX
L'Oecuménisme
21. L'oecuménisme est aux toutes premières places dans l'échelle des priorités pour l'Église en Océanie. Le Concile Vatican II a souligné comment le manque d'unité entre les disciples du Christ a un effet négatif sur l'oeuvre d'évangélisation. «Plusieurs Communions chrétiennes se présentent aux hommes comme les véritables héritières de Jésus-Christ. Tous certes, confessent qu'ils sont les disciples du Seigneur ; mais ils ont des attitudes différentes. Ils suivent des chemins divers, comme si le Christ lui-même était partagé. Il est certain qu'une telle division s'oppose ouvertement à la volonté du Christ. Elle est pour le monde un objet de scandale et elle fait obstacle à la plus sainte des causes : la prédication de l'Évangile à toute créature».(23) Récemment le Saint-Père a renouvelé l'engagement de l'Église dans sa Lettre encyclique Ut unum sint où il traite des divers aspects du désir d'une plus grande unité entre les chrétiens et du mouvement vers celle-ci.(24)
En réponse à la prière du Christ, «pour qu'ils soient un comme nous sommes un» (Jn 17, 22), les évêques d'Océanie ont cherché de différentes manières à avoir un contact et à nouer des relations amicales avec les chefs et les fidèles d'autres communautés chrétiennes. Ceci a été fait au moyen de visites personnelles, de commissions mixtes, de sessions d'études et de projets communs d'action. Au niveau mondial, les évêques ont pris part au dialogue et à l'étude de la doctrine avec, entre autres, des anglicans, des méthodistes, etc., sous la conduite du Saint-Siège. Dans plusieurs régions de l'Océanie, l'Église catholique est devenue membre du Conseil des Églises local ou régional.
Le contact au niveau local entre les Églises a toujours été très efficace pour opérer une compréhension de l'usage des Écritures, des traditions liturgiques et spirituelles des différentes Églises et a abouti à un support mutuel dans la foi. Le défi de l'Église - qui est en même temps une opportunité - se présente quand des personnes unies dans une culture commune sont divisées par des croyances et des formes différentes de culte. Dans certains cas, il existe pour les communautés des possibilités de prier ensemble, de visiter les services respectifs et de s'unir parfois dans des projets communs d'évangélisation et d'action sociale. Pour une compréhension mutuelle, les ressources ont été parfois partagées pour assurer la formation des leaders laïcs, des catéchistes et même du clergé et des religieux. L'Église catholique a été enrichie de diverses manières par cette expérience et a été encouragée à proclamer le Christ de concert avec ses frères et soeurs dans la foi. Travailler pour trouver un accord sur les problèmes brûlants tels que l'avortement ou l'euthanasie et, si possible, pour avoir une politique commune afin de proposer ces positions aux gouvernements et à l'ensemble de la société, est une autre façon de travailler en vue de renforcer des liens oecuméniques tout en témoignant de la vérité.
Dans une société toujours plus séculière où des tentatives sont faites pour marginaliser le christianisme, et où la foi est individualiste et la moralité est rendue relative, la collaboration oecuménique apporte des bénéfices non seulement à la crédibilité des communautés respectives, mais aussi à la santé morale et spirituelle des nations. L'association entre l'Église et les communautés chrétiennes en Océanie semble avoir provoqué des effets positifs dans la société civile. La rancoeur et le préjugé religieux ont largement disparu, aidant ainsi à témoigner l'unité voulue par le Christ (cf. Jn 17, 22). La charité chrétienne a été très appréciée par les populations en général et s'est également traduite en une amélioration des relations sociales.
Malgré ses effets positifs en nombre de régions de l'Océanie, l'oecuménisme reste encore un défi. Le sentiment qui prévaut est que le projet de l'unité des chrétiens, qui obéit à la volonté du Christ, ne se réalise pas assez rapidement et certains pensent même que c'est un échec. Dans certains milieux, on constate des signes d'impatience de voir des signaux réels d'unité sacramentelle entre les Églises. «Un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême» (Ep 4, 5). Certains ne peuvent pas comprendre pourquoi des différences de doctrine provoquent encore une profonde division et ne peuvent être réconciliées. Des problèmes pratiques existent toujours en ce qui concerne l'admission aux sacrements de la part des autres chrétiens, par exemple dans les mariages oecuméniques. La présence de vastes communautés de chrétiens orthodoxes dans les grandes villes, avec un nombre considérable de leurs étudiants fréquentant les écoles catholiques, fournit des opportunités de rechercher de meilleures relations entre les Églises.
Le Dialogue interreligieux
22. Les relations avec les religions non chrétiennes constitue une question pressante dans certaines régions. Par exemple, les chefs de la communauté chrétienne et ceux de la communauté juive se rencontrent souvent et ont des discussions très fructueuses. Ce dialogue théologique a eu comme résultat une meilleure compréhension de la tradition et de la pratique juives. En même temps, de vastes groupes de musulmans ou d'hindous, vivant dans les quartiers, dans les villes ou dans les pays, ne sont souvent pas compris par la plus grande partie de la communauté ni par les chrétiens. Le dialogue serait un moyen très utile pour abattre les barrières de la méfiance. Les religions traditionnelles des populations de l'Océanie ne constituent pas seulement une cause d'intérêt mais aussi une source d'inspiration. Néanmoins, il arrive que parfois elle peuvent, dans une zone donnée, devenir une force rivale du christianisme. Dans certains cas, le danger du syncrétisme existe dans le mélange libéral de la religion traditionnelle et du christianisme. Mais en même temps, l'étude des valeurs religieuses de ces populations a amené certains chrétiens à mieux apprécier ces cultures. Les aborigènes australiens ont une forme de religion qui est probablement la plus ancienne que l'humanité connaisse. Elle a des caractéristiques monothéistes qui la rendent très importante pour l'Église dans sa compréhension des cultures indigènes et sa mission évangélisatrice.(25)
CHAPITRE III
LES SECTES
Vision d'ensemble
23. Les sectes et les nouveaux mouvements religieux constituent une caractéristique commune du monde actuel. En collaboration avec d'autres Dicastères de la Curie romaine, le Conseil Pontifical pour le Dialogue Inter-religieux a dû les inclure dans le vaste domaine de ses centres d'intérêts.(26) En Océanie, ce phénomène concerne de près l'Église car leurs fausses doctrines attirent un grand nombre de personnes impressionnables et sans méfiance aussi bien dans l'Église que dans la société, soumettant de cette façon un grand nombre de familles, et même parfois de communautés entières, à la division et aux difficultés.
Il semble que récemment ce phénomène ait atteint de nouvelles proportions, en particulier en ce qui concerne l'Église. Dans différentes régions de l'Océanie, les groupes compacts des sectes semblent offrir une expérience intense et émotionnelle à certains catholiques qui n'ont jamais été capables d'atteindre une expérience semblable à l'intérieur des services liturgiques de l'Église. La musique, les chants, les révélations privées, les visions et le fait de parler des langues nouvelles jouent un rôle déterminant dans l'attraction qu'éprouvent les personnes, et en particulier les jeunes, vis-à-vis de ces sectes. Pour des individus à la recherche d'une stabilité dans un monde qui connaît une évolution rapide, ces sectes enseignent des doctrines fondamentalistes qui offrent souvent une fausse sécurité dans des codes moraux de conduite rigidement inflexibles. Certaines de ces sectes visent d'une façon agressive et délibérée l'Église catholique et s'emparent des plus faibles de ses membres qui, par exemple, peuvent se sentir «perdus» dans les vastes assemblées d'Église dont la dimension peut parfois limiter le contact personnel. Une fois assimilées dans une secte, les personnes chercheront à y entraîner leurs familles et leurs amis. Ceci entraîne généralement une déchirure très profonde dans la famille et dans la communauté.
Vu la situation, le défi qui se pose à l'Église en Océanie est de chercher des façons de contrecarrer l'effet de ces sectes et de ces nouveaux mouvements religieux : en promouvant une plus grande communion au sein des communautés ecclésiastiques en proposant des ministères de guérison qui permettent aux blessés, aux aliénés et à ceux qui ont été lésés dans leurs sentiments de réintégrer leurs vies à travers des expériences de conversion à l'intérieur de la communauté catholique ; une meilleure catéchèse dans la foi qui offre aux personnes non seulement une plus grande connaissance de la foi, mais aussi de la fausseté des doctrines des sectes et des nouveaux mouvements religieux.
De nombreuses sectes utilisent des messages et des images apocalyptiques. Les rêves et les aspirations sont mis en relation avec des messages bibliques utilisés tout à fait en dehors de leur contexte originel. Un fondamentalisme biblique déforme une compréhension authentique et riche en signification de la vérité de Jésus-Christ. Par leur utilisation d'expressions et de symboles chrétiens, ces sectes faussent les aspirations des personnes et leur besoin de salut. L'existence même de ces sectes montre quel effort devrait être fait, de façon profonde et libératrice, pour proclamer la vérité de Jésus-Christ suivant les meilleures traditions de l'Église.
Points spécifiques
24. Les sectes et les nouveaux mouvements religieux d'Océanie n'ont pas tous des racines chrétiennes. Parmi les formes les plus populaires de progrès personnels qui se réfèrent aux traditions orientales on compte le yoga et la méditation bouddhiste. Des ashrams et des centres de Zen ou de méditation bouddhiste peuvent être vus comme des refuges contre la course frénétique de la vie dans les grandes villes. Dans leurs formes les plus acceptables, ces types d'expériences peuvent souvent offrir une aide véritable à des personnes qui en ont besoin. Elles peuvent néanmoins représenter la cause d'un éloignement des catholiques de leur foi, pour des raisons différentes.
La forme la plus répandue d'un nouveau type de spiritualité est le New Age. Lié au processus de sécularisation ce mouvement tire des éléments des traditions juives et chrétiennes comme du gnosticisme et des religions orientales. Ses adeptes croient qu'une nouvelle conscience a surgi sur la planète, qui rendra toute religion et toute philosophie surpassées. Cela semble être la réaction la plus radicale au nihilisme et à l'absence de valeurs qui ont fini par caractériser une culture industrialisée et technologique de consommation et de communication de masse.
Certaines sectes et certains nouveaux mouvements religieux utilisent des tactiques agressives dans leur prosélytisme vis-à-vis de nouveaux adhérents choisis parmi les baptisés, en leur causant ainsi souvent des injustices. D'autres laissent leurs adeptes avec de sérieux problèmes psychologiques. Souvent, lorsque certains parviennent à quitter une secte ou un nouveau mouvement religieux, il leur est très difficile de rentrer dans la société. Ces groupes représentant essentiellement un phénomène qui exprime la peur qu'ont les personnes à l'égard d'un monde qu'il leur est difficile d'affronter, ils sont surtout renfermés sur eux-mêmes. Au contraire, l'Église à qui le Seigneur a promis d'encourager son peuple, «mais gardez courage ! J'ai vaincu le monde» (Jn 16, 33), offre à ses membres l'optimisme chrétien pour faire face à la vie dans le monde.
Avec leur influence croissante, les sectes et les nouveaux mouvements religieux constituent, sous plusieurs aspects, un défi pour l'Église. Une réponse adéquate à ce défi exige une proclamation initiale de l'Évangile aux personnes et une catéchèse des membres de l'Église se référant aux expériences et aux désirs locaux, et qui soit concentrée sur les vérités fondamentales plutôt que sur les théories secondaires. Dans la planification et dans la célébration de ses liturgies et de ses pratiques de dévotion, l'Église doit prendre en considération des éléments tels que : les besoins émotionnels des participants, les formes inculturées, les dévotions populaires, etc.
CHAPITRE IV
JUSTICE ET PAIX
Travailler pour instaurer le Royaume de Dieu
25. En avançant sur le Chemin qu'est le Christ, en proclamant Sa Vérité et en vivant Sa Vie, l'Église contribue à la construction d'une «civilisation de l'amour», où règnent la justice et la paix. En se donnant de tout coeur à cette tâche dans le monde actuel, l'Église attend, avec une espérance joyeuse la venue du Royaume final, quand toute injustice sera effacée et toute souffrance disparaîtra de la création «afin que Dieu soit tout en tous» (1 Co 15, 28). Le Concile Vatican II l'affirme, «la mission propre que le Christ a confiée à son Église n'est ni d'ordre politique, ni d'ordre économique ou social : le but qu'Il lui a assigné est d'ordre religieux».(27) Par la prédication de l'Église, la Lumière de l'Évangile brille sur les hommes, de sorte qu'en devenant croyants dans le Christ la Lumière salvifique puisse, à travers eux, pénétrer et illuminer les réalités séculières.
La mission de l'Église dans le monde se résume dans l'affirmation suivante : «L'Église, en poursuivant la fin salvifique qui lui est propre, ne communique pas seulement à l'homme la vie divine ; elle répand aussi, et d'une certaine façon dans le monde entier, la lumière que cette vie divine irradie, notamment en guérissant et en élevant la dignité de la personne humaine, en affermissant la cohésion de la société et en procurant à l'activité quotidienne des hommes un sens plus profond, la pénétrant d'une signification plus haute».(28) Les membres de l'Église doivent être le levain de façon à en renouveler et à en transformer, selon la volonté du Christ, toutes les parties qui en sont dignes. «De cette mission religieuse découlent une fonction, des lumières et des forces qui peuvent servir à constituer et à affermir la communauté des hommes selon la loi divine».(29)
Nombreux sont les éléments qui indiquent que l'Église en Océanie a pris à coeur sa mission de transformer la société et ses structures sociales par la puissance de l'Évangile. La création de nombreuses commissions «Justice et Paix» au niveau local et national ont conduit à la réalisation de programmes pour expliquer et diffuser la doctrine sociale de l'Église. Au plan pratique, ces commissions ont défendu la dignité humaine de la personne, condamné la discrimination raciale et encouragé les programmes de développement humain. Elles ont, en outre, formulé des propositions aux Gouvernements, particulièrement en faveur des pauvres et des marginalisés, et ont signalé les causes d'injustices politiques, sociales et économiques. En même temps, elles ont affrontés certains thèmes spécifiques à l'Océanie, tels que les accords internationaux, qui sont désavantageux d'un point de vue économique et politique pour les pays les plus petits ou les plus faibles ; la discrimination économique, une situation où une nation ou un secteur de la société tire des bénéfices aux dépens des autres ; le problème, dans les pays développés, d'une différence toujours croissante entre les riches et les pauvres ; la nécessité d'une éthique de la responsabilité et de la justice sociale dans l'industrie, le commerce et la banque, surtout en ce qui concerne les salaires des travailleurs par rapport aux marchés mondiaux, et les attitudes et les pratiques des pays les plus développés vis-à-vis de ceux moins développés en rapport avec les économies globalisées. Au plan concret, les organismes d'aide sociale de l'Église dans la région ont fourni une assistance financière et matérielle à de nombreux pays, groupes, familles et individus, surtout à la suite des désastres naturels.
Si le phénomène d'une économie globalisée entraîne des bénéfices sociaux et culturels pour de nombreuses régions de l'Océanie, il provoque également d'importants changements dans la vie des personnes, dont certains sont difficiles à affronter. Par exemple, le chômage et le manque de possibilités de travail augmentent dans beaucoup de zones de l'Océanie et provoquent des privations pour des personnes, des familles et des communautés entières. Les jeunes sont particulièrement affectés par ce problème : il peut leur arriver facilement de grandir dans le découragement et dans la désillusion, qui se transforment par conséquent en des formes de comportement contraires à l'éthique ou même en suicide, un phénomème qui est en augmentation dans quelques régions de l'Océanie. La doctrine sociale de l'Église a beaucoup à offrir aux gouvernements et aux entreprises dans leur travail avec les autres pour formuler de saines politiques et des programmes d'éducation sur les pratiques de l'emploi dont peuvent bénéficier non seulement les personnes mais aussi la société.
L'événement le plus significatif de l'histoire récente de l'Océanie a été la Deuxième Guerre Mondiale qui a provoqué beaucoup de changements dans la région. Ainsi, des régions de l'Océanie, à cause de leur situation géographique, maintiennent encore des liens politiques, économiques et stratégiques avec les U.S.A., le Japon et l'Asie du Sud-Est. Dans le même temps, les pays de la région collaborent de plus en plus entre eux et avec d'autres pays dans des plans de développement. Dans ces plans visant au développement, l'Église, suivant les paroles du Pape Jean-Paul II,(30) ajoute au facteur de l'économie, ceux des valeurs humaines et du développement humain intégral, c'est-à-dire la considération du bien-être de la personne et des populations entières au niveau spirituel, religieux, social, éducatif, culturel ainsi que matériel.
Dans certaines régions de l'Océanie, l'Église joue un rôle particulier et véritablement de premier plan dans le maintien de la paix. Sa médiation est invoquée dans les cas de disputes entre les groupes tribaux ou raciaux, parfois entre les gouvernements centraux et les mouvements séparatistes, et parfois dans les cas de grève ou de litiges à propos de l'emploi. Quand cela est possible, au nom de l'Évangile, l'Église offre ses bons services pour apporter la paix aux communautés à travers le message de réconciliation et de pardon du Christ. Le Christ, «Notre paix» (Ep 2, 14), celui qui peut «créer en lui-même un homme nouveau» (Ep 2, 15) à travers la puissance de Sa Croix, en abattant les murs de division entre les peuples.
Responsabilité dans la Création
26. La Justice et la Paix ne concernent pas seulement les circonstances affectant la personne ou les groupes de personnes. La création, c'est-à-dire toute la vie présente sur la planète et les conditions matérielles qui la soutiennent, sont concernées par le comportement humain, en particulier les activités économiques telles que l'industrialisation, les mines, l'exploitation du pétrole, les habitations, l'agriculture, etc. Si elles ne sont pas contrôlées, ces activités peuvent parfois endommager ou même détruire des parties entières de l'environnement. En Océanie, un grand nombre d'animaux et d'espèces de plantes ont déjà été détruits et d'autres sont en danger. Dans son enseignement sur la destination universelle des biens, l'Église enseigne le respect et la responsabilité dans l'utilisation de la création.
Outre les inquiétudes concernant l'environnement, les gouvernements et les entreprises doivent aussi prendre en considération, dans leurs politiques et pratiques économiques, la culture et à les coutumes des diverses populations du Pacifique, par exemple pour les pasteurs de troupeaux de bovins, les éleveurs de moutons, les producteurs de céréales, les bûcherons, les pêcheurs, etc. Dans ses programmes pastoraux, l'Église cherche à venir au-devant de leurs besoins particuliers dus aux circonstances de leurs vies telles que les sentiments d'isolement et de solitude, les grandes distances qui les séparent les uns des autres, leurs modes de vie menacés, la pression économique, etc.
La pollution de l'environnement en tant qu'effet secondaire d'une société industrielle constitue également une préoccupation, spécialement pour une région comme l'Océanie où certaines zones sont encore à l'état naturel. Actuellement, à cause du développement de l'industrie, la contamination des fleuves, de la mer et de la terre ne cesse d'augmenter. Les principales villes doivent faire face aux effets nuisibles des gaz d'échappement sur la santé de la population. Les hommes de science ont soulevé le problème critique de l'épuisement de la couche d'ozone sur l'Antarctique et sur les Océans du Sud, un problème qui ne concerne pas seulement les peuples d'Océanie mais la population mondiale tout entière. Il reste encore à évaluer les effets à long terme des tests nucléaires dans la région.
TROISIÈME PARTIE
VIVANT LA VIE DE JÉSUS-CHRIST
Introduction : La vie nouvelle dans le Christ
27. L'évangélisation est un processus aux aspects multiples. Elle commence par la proclamation de la vérité révélée par Jésus-Christ. À travers l'évangélisation, le Christ lui-même appelle les croyants à entrer en Son Église dans la communauté de foi pour être le nouveau Peuple de Dieu, Son Corps Mystique dans le monde. Les sacrements, en particulier la sainte Eucharistie, célèbrent et approfondissent la vie nouvelle «dans le Christ» commencée par le Baptême, qui rend enfants du Père, fils et filles de Dieu dans le Christ par la puissance du Saint-Esprit. En vertu de la rédemption en Christ, célébrée dans les sacrements de l'Église, l'existence humaine tout entière est, en puissance, capable d'être transformée par une conversion profonde du coeur. Saint Paul déclare : «On vous a enseigné qu'il vous faut abandonner votre premier genre de vie et dépouiller le vieil homme, qui va se corrompant au fil des convoitises décevantes, pour vous renouveler par une transformation spirituelle de votre jugement et revêtir l'Homme Nouveau, qui a été créé selon Dieu, dans la justice et la sainteté de la vérité» (Ep 4,22-24). Saint Paul insiste sur l'unité avec le Christ. «Pour moi, certes, la vie c'est le Christ, et mourir représente un gain» (Ph 1,21), et «si je vis, ce n'est plus moi qui vis, mais le Christ qui vit en moi» (Ga 2,20).
Le chrétien authentique est quelqu'un qui est activement pris dans l'expérience d'une relation aimante avec Dieu le Père par une union intime avec Son Fils dans une vie entièrement poussée et guidée par l'Esprit. Cet engagement total à Dieu vient d'une rencontre vivante avec la personne de Jésus-Christ, «qui fut livré pour nos fautes et ressuscité pour notre justification» (Rm 4,24). C'est une expérience qui implique un partage réel dans la mort du Christ (cf. Col 2,12) et dans la vie avec Lui (cf. Col 2,20), qui nous fait atteindre une maturité spirituelle en grandissant dans le Christ (cf. Ep 4,15). Dans ce processus de transformation, l'Esprit est l'agent du dessein aimant de Dieu pour la sanctification personnelle, pour bâtir la communauté de l'Église et pour transformer le monde. L'Esprit remplit d'amour le coeur des croyants (cf. Rm 5,5) en les irradiant de joie, de paix et de patience (cf. Ga 5,22). C'est le même Esprit qui, à la Pentecôte, enflamma les coeurs des Apôtres pour qu'ils proclament le Christ à travers le monde entier.
CHAPITRE I
LES SACREMENTS
Le renouveau au Concile Vatican II
28. Pour Vatican II, le point de départ du renouveau a été une prise de conscience nouvelle de l'Église et de son identité. Elle est la Lumière des nations, le nouveau Peuple de Dieu, un peuple pélerin conduit par le Christ, le Bon Pasteur, à sa demeure éternelle qui est au ciel. L'image de l'Église comme Peuple de Dieu a été spontanément bien accueillie par les fidèles. Une telle image suggérait la chaleur et l'intimité d'une famille et aidait à stimuler une plus grande participation de tous les membres de l'Église, des laïcs en particulier.
En même temps, dans la société civile ont eu lieu des changements qui ont eu des effets sur les dispositions envers l'Église, particulièrement dans les pays d'Océanie qui ont les valeurs occidentales. À la suite de quoi, certains ont commencé à recourir à des procédures et à des modèles démocratiques pour la vie de l'Église. Des membres de l'Église se sont demandés s'ils n'avaient pas été rendus libres dans l'Église de suivre les nombreuses formes de libération offertes par les sociétés modernes et en mutation. Par ailleurs, d'autres s'inquiétaient de ce que l'Église ait perdu, ou du moins compromis, son unicité devant le monde. En conséquence, dans certaines sociétés, l'Église s'essaye à examiner et à appliquer de nouveau les documents de Vatican II.
Le concept-clé conciliaire de l'Église comme sacrement de l'unité de Dieu avec l'humanité(31) est essentiel dans cette discussion. La sécularisation a obscurci et faussé l'idée de l'Église comme étant le lieu où Dieu réalise sa volonté et son dessein dans l'histoire pour le salut du monde. La baisse du sens du sacré dans la société est clairement démontrée par le manque de foi en l'Église comme moyen spécialement choisi par Dieu pour sauver l'humanité. Beaucoup cherchent à découvrir des formes de remplacement de la transcendance. Face à ces situations, fidèle à sa mission d'annonce de l'Évangile, l'Église proclame la vérité éternelle - le salut qui vient du Christ seul, et d'aucun autre nom (cf. Ac 4,12).
La Réforme liturgique
29. La réforme de la vie liturgique de l'Église, appelée par le Concile Vatican II, était déjà en route pour répondre à ce défi. Le Concile voulait surmonter la séparation entre la religion et la vie en montrant comment la célébration des sacrements sanctifie la vie à chaque étape du cycle de la vie, de la naissance à la mort. Les gestes et les actions accomplis dans la liturgie ont été réformés pour exprimer clairement qu'ils sont des instruments de grâce. Spécialement dans la liturgie Eucharistique, cette réforme a mis l'accent sur la structure de la parole-sacrament du rite liturgique et souligné le concept théologique du Mystère pascal du Seigneur, à savoir, la passion, mort et résurrection du Christ commémorées et rendues présentes à la Messe. Parallèlement à la dimension horizontale et sociale de fraternité et de communion par la liturgie, la dimension verticale ou transcendentale a été aussi présentée. Le culte célébré par l'Église sur terre est déjà une participation à la liturgie du ciel par l'action du Christ, le Grand Prêtre.
Sur le plan de l'inculturation de la liturgie, de nombreuses Églises locales en Océanie travaillent diligemment pour discerner de quelle manière des rites traditionnels comme, par exemple, la purification, l'offrande, la réconciliation, etc., peuvent être introduits ou reçus dans la liturgie, suivant les normes fixées par l'Église. Ces réformes liturgiques pourraient aider à exprimer et à signifier de façon plus appropriée, la vie nouvelle en Christ offerte à la communauté chrétienne et à ses membres, et célébrée par les sacrements.
La vie par les sacrements
30. L'initiation, dans la communauté chrétienne, se fait par le Baptême, la Confirmation et l'Eucharistie. En favorisant la célébration du Baptême pendant la Messe en présence de toute la communauté, l'Église démontre que les sacrements sont des actes qu'elle accomplit, non seulement pour la sanctification des individus, mais aussi pour la construction de toute la communauté en Corps du Christ. Le manque d'une juste compréhension des sacrements peut conduire à des abus. Par exemple, en ce qui concerne le Baptême, parfois les parents n'apportent pas volontiers leurs enfants pour qu'ils soient baptisés, prétendant - à tort - laisser le choix de la religion à l'enfant lorsqu'il aura grandi. De même, pour certains, la réception du sacrement de Confirmation, le sacrement de l'engagement adulte dans l'Église et dans sa mission dans le monde, marque souvent, hélas, l'étape où un nombre considérable de jeunes catholiques cessent tout contact actif avec l'Église. Des cours préparatoires aux sacrements du Baptême, à la première Confession et Communion, et à la Confirmation, sont des occasions de choix pour évangéliser non seulement ceux qui recevront le sacrement, mais aussi toute la famille.
L'Eucharistie est le sommet de la vie de l'Église. Le Christ y est présent dans Sa Parole, dans la personne du prêtre et dans la communauté adorante des fidèles.(32) Cette présence est réalisée au degré le plus haut et le plus complet dans le pain et le vin consacrés, le sacrement de Son Corps et de Son Sang, offerts en sacrifice et partagés dans la communion. Cette foi exige l'acceptation de certaines conséquences quant à la préparation, la participation, le comportement, les expressions, le culte dominical et la construction de l'Église. Le caractère sacré du dimanche, le Jour du Seigneur, pendant lequel la communauté catholique se réunit pour l'Eucharistie, est de plus en plus contesté, en certains endroits, par l'introduction du commerce dominical, le manque de clarté dans la catéchèse à propos de l'obligation dominicale, et le calendrier dominical d'évènements sportifs et de divertissements. Enfin, le sens de l'église comme lieu sacré de culte, où règne la prière silencieuse, n'est pas toujours évident.
Les sacrements confrontent avec réalisme la fragilité et l'échec humains, moraux et physiques. Les sociétés occidentales témoignent en général d'une pratique non fréquente du sacrement de pénitence. Il semble y avoir là nombre de notions erronées sur la nécessité de se confesser à un prêtre, sur les effets communautaires du péché, sur la grâce du sacrement, etc. Les facteurs principaux de la société liés à ce déclin sont entre autres : une attitude générale qui fait éviter la responsabilité personnelle de ses actions, une prise en compte excessive des facteurs psychologiques et sociologiques et un perte du sens du péché. Une catéchèse adéquate est importante pour aider à inverser cette tendance.
Des changements sont aussi survenus avec l'introduction de l'onction des malades, appelée autrefois «extrême onction», car elle était réservée aux mourants. Il est encourageant de constater que ce sacrement est reçu par un nombre croissant de personnes en situation où leur vie est menacée - par exemple en cas de maladie grave, d'opérations -, et souvent en groupe pour les personnes âgées. La célébration communautaire du sacrement est souvent une cause de vraie consolation pour les malades, leurs familles, leurs amis et ceux qui les soignent. La Messe des défunts et le rite funéraire renouvelé sont aussi une source d'espérance et d'inspiration pour les catholiques comme pour les non-catholiques.
La Messe de mariage et le rite nuptial présentent le mariage chétien comme une alliance d'amour, reflétant l'amour du Christ pour son Église. Ils offrent une excellente opportunité pour l'évangélisation, parce que, à ce moment-là, les gens sont mieux disposés envers le prodige et la bonté du message de l'Église. Toutefois, en certains endroits, le caractère sacramentel du mariage est menacé par des comportements courants dans la société civile comme, par exemple, l'acceptation d'une co-habitation sans mariage, celle de relations prématrimoniales, du divorce et du remariage, etc.
CHAPITRE II
LA VIE HUMAINE ET LA SANTÉ
La vie, don de Dieu
31. La vie est au centre même du message chrétien. Le Christ décrit ainsi sa mission rédemptrice : «Je suis venu pour qu'ils aient la vie et qu'ils l'aient en abondance» (Jn 10,10). Dieu le Créateur est la source de la vie et le maître de toute vie. Les personnes sont les gérants du don de Dieu. Ce don n'est pas simplement une réalité, physique ou biologique mais un don où le Donneur est rendu présent. L'humanité est crée à l'image de Dieu et appelée à la perfection à travers communion avec Dieu dans le Christ et par l'Église. La morale chrétienne donc, est une morale centrée sur la vie. Elle trouve joie dans la vitalité, dans le fait d'être vivant, ce qui devrait conduire la personne à un sens de gratitude envers le Créateur. Toute la loi morale n'est ni restriction ni entrave mises à l'énergie naturelle et à la vitalité spontanée; c'est une protection contre le mal et une indication, une boussole pointée vers le plein épanouissement humain.
Le passage suivant de l'Écriture est tout à fait explicite sur le lien qu'il y a entre la vie et la loi, entre la morale et le bonheur avec Dieu : «Vois, je te propose aujourd'hui vie et bonheur, mort et malheur. Si tu écoutes les commandements du Seigneur ton Dieu que je te prescris aujourd'hui, et que tu aimes le Seigneur ton Dieu, que tu marches dans ses voies [... ] tu vivras et tu multiplieras, le Seigneur ton Dieu te bénira dans le pays où tu entres pour en prendre possession. [...] Je te propose la vie ou la mort, la bénédiction ou la malédiction. Choisis donc la vie, pour que toi et ta postérité vous viviez, aimant le Seigneur ton Dieu, écoutant sa voix, t'attachant à lui; car là est ta vie, ainsi que la longue durée de ton séjour sur la terre» (Dt 30, 15-20).
La vie qu'offre Dieu est une vie nouvelle et éternelle, une vie en communion avec le Père. Chacun est appelé à cette vie par le Fils, dans et par la puissance de l'Esprit sanctifiant. C'est seulement en référence à la plénitude de vie en Dieu que les multiples aspects et les moments du développement de la vie humaine acquièrent toute leur vraie signification.
Attitudes culturelles envers la vie
32. En Océanie, les peuples qui ont conservé leur culture indigène évaluent la vie humaine non seulement comme une réalité physique individuelle ou actuelle, mais comme une plénitude dynamique offerte au sein de la communauté ancestrale. Ils conçoivent sans peine Dieu comme la vie en plénitude, partagée avec eux à travers les ancêtres de la communauté. Vivre en communauté c'est partager la vie. Selon ce point de vue, la morale est vue comme la réponse au désir de porter la vie à sa plénitude. La vie morale est un mouvement de la personne vers son accomplissement en Dieu. Pour ces peuples, la morale est vécue en communauté, et la responsabilité individuelle est assumée en vue de la vie et des valeurs communautaires. La liberté est comprise par rapport à la communauté, à sa floraison ou à son déclin. Il peut y avoir un sens si fort de communauté entre le peuple et Dieu que Dieu peut être conçu comme possédant cette vie qu'ils reçoivent de Dieu et partagent avec Lui.
La manière de comprendre la vie dans une société technologique est extrêmement différente. Dans ce cadre, les gens jouissent aussi de la vie, de la beauté, des arts et des sciences, du sport, d'une bonne santé, parfois même plus prisée que les talents intellectuels et spirituels. Cependant, dans une société de consommation, la vie peut facilement être réduite à une réalité purement biologique, un matériel vivant manipulable en laboratoire ou sur la table d'opération. Alors, ce qui est technologiquement possible est souvent fait sans aucune référence au merveilleux mystère de la vie humaine comprise comme destinée à fleurir dans l'éternité ni aux impératifs moraux établis par Dieu. L'«impératif technologique» signifie que ce qui peut être fait, doit être fait. Certains savants ont déclaré qu'on ne devrait mettre aucune limite morale à la recherche et à l'expérimentation, parce que cela nuirait au progrès de la science, et par là de la société. C'est une revendication pour une liberté absolue de la science, qui doit prévaloir sur toute autre liberté en société. Toute revendication morale impliquée en ces matières s'appuie généralement sur l'utilitarisme : le calcul du plus grand bien pour le plus grand nombre. Quelques-uns voient là, à tort, l'accomplissement du commandement chrétien de l'amour. Une telle revendication, cependant, rend douteuses toutes les conceptions morales acceptées quand celles-ci ne peuvent passer avec succès le test utilitaire. Avec une telle mentalité, la naissance et la mort perdent leur mystère. Elles ne manifestent plus la présence de Dieu comme le Seigneur de la création, personnellement présent à tout être humain. La personne humaine devient une autre entité matérielle à manipuler à volonté pour des fins matérielles.
Questions morales
33. Dans ses programmes sociaux planificateurs et législatifs, la société moderne est de plus en plus déterminée à appliquer la technologie et les découvertes de la science au plus grand nombre possible de ses activités. L'Église est mise au défi de trouver des moyens efficaces pour faire entendre et appliquer son message par les gouvernements, les savants et les gens en général.
L'Église s'intéresse à la vie en toutes ses étapes, sous tous ses aspects et s'en soucie depuis la conception jusqu'à la mort naturelle. Les Conférences épiscopales et les évêques individuellement ont parlé sur les questions de vie; ils ont fait des propositions aux gouvernements et se sont évertués à diffuser l'enseignement de l'Église dans les media. Leur enseignement est basé sur la dignité de la personne humaine et sur la destinée éternelle de toute personne. Ils ont défendu le caractère sacré de la vie humaine et le droit à la vie depuis le premier instant de la conception. Tout type d'avortement provoqué a été condamné comme l'un des crimes les plus horribles qui affligent la société. La contraception, parce qu'elle altère le sens réel de la sexualité humaine en séparant l'acte d'amour de sa fécondité, ne répond pas au critère de la parenté responsable. Les évêques ont protesté contre la manipulation volontaire de l'embryon et contre sa destruction. Ils ont fait connaître le refus de l'Église d'accepter la conception hors du corps de la mère sous la forme de fécondation in vitro (IVF) comme un moyen légitimement moral de traiter la stérilité.
L'euthanasie est le dernier thème qui émerge dans le débat public. Ce qui est en question n'est pas le retrait légitime d'un traitement médical qui ne peut plus bénéficier au patient, à qui il est alors permis de mourir avec dignité et dans la paix. «Par euthanasie au sens strict, on doit entendre une action ou une omission qui, de soi et dans l'intention, donne la mort afin de supprimer ainsi toute douleur».(33) Généralement, cela veut dire qu'une autre personne, habituellement un docteur, intervient directement et délibérément pour provoquer la mort du patient. Selon la loi de Dieu, une telle action ne peut être considérée que comme un meurtre ou un suicide assisté.
L'Église rend témoignage à la vie
34. Les problèmes soulevés par la pratique de la médecine dans un hôpital moderne ont incité à établir des comités d'éthique et des centres de bio-éthique et de conseil. Le système hospitalier catholique a beaucoup contribué à la solution des problèmes des services médicaux dans la communauté. L'enseignement et l'accomplissement du rite de l'onction des malades a été une source d'inspiration pour le soin pastoral des malades. De différentes manières l'Église a fait preuve de compréhension et de compassion dans son apostolat en aidant à guérir les blessures physiques et spirituelles d'une humanité brisée. La distribution de fonds et de ressources pour les soins sanitaires dans les communautés est une question brûlante de justice sociale. L'Église ne veut pas voir les pauvres, les faibles et les personnes âgées désavantagés dans la course aux rares services et installations de soins. Le fait que les hôpitaux sont souvent dirigés comme une entreprise fait craindre pour le sort de ceux qui ne peuvent payer les services qu'ils fournissent.
L'Église a encouragé les docteurs, les infirmiers et toutes les personnes de bonne volonté à s'organiser en défense du droit à la vie.(34) Ils doivent employer des méthodes non violentes, car «lorsque, conformément à leur inspiration authentique, ces mouvements agissent avec une ferme détermination mais sans recourir à la violence, ils favorisent une prise de conscience plus répandue de la valeur de la vie».(35) Néanmoins, certains législateurs et magistrats, malheureusement même quelques catholiques, cèdent aux pressions de la société en cherchant une respectabilité légale pour des actes qui sont moralement indéfendables. Il est bien vrai le principe selon lequel la violence engendre la violence. Parallèlement à l'augmentation des meurtres des enfants à naître ou des malades terminaux, il semble bien y avoir un accroissement proportionné de suicides, de crimes, d'agressions, de violence domestique, d'exploitation sexuelle d'enfants et d'autres types d'actes de violence.
Le Pape Jean-Paul II dans sa Lettre encyclique Evangelium Vitae a traité toutes ces questions dans le cadre de l'Écriture et de la tradition de l'enseignement moral de l'Église. Il dit: «L'un des aspects caractéristiques des attentats actuels contre la vie humaine, ainsi qu'on l'a déjà dit à plusieurs reprises, est la tendance à exiger leur légitimation juridique comme si c'étaient des droits que l'État, au moins à certaines conditions, devait reconnaître aux citoyens».(36) En signalant la conformité nécessaire de la loi civile et de la loi morale, le Pape montre que les lois qui légitiment l'avortement ou l'euthanasie sont injustes et cessent d'être des lois parce qu'elles violent le droit inviolable et inaliénable de chaque être humain à la vie. Ce droit a été obscurci par le relativisme moral, qui refuse d'admettre toute force universelle qui soit aussi contraignante pour les concepts moraux. Mais «il est difficile de ne pas voir que, sans un ancrage morale objectif, la démocratie elle-même ne peut pas assurer une paix stable».(37)
Le problème pratique survient quand des politiciens catholiques consciencieux doivent voter pour ou contre un projet de loi qui limiterait les effets, par exemple, d'une loi sur l'avortement déjà passée. Dans une société pluraliste, on peut penser que la distinction entre la coopération licite et illicite (38) avec les lois injustes sera un problème très réel pour l'Église à l'avenir. Les politiciens catholiques sont en première ligne pour assurer que les valeurs chrétiennes seront, et resteront, reflétées dans la législation. Leurs efforts méritent d'être encouragés et soutenus.
CHAPITRE III
MARIAGE ET FAMILLE
Effets culturels
35. L'Église définit la famille comme la première unité de la société dont la mission est d'être «le sanctuaire de la vie»,(39) où un époux et une épouse trouvent leur réalisation personnelle, où naissent les enfants, où ils sont élevés et instruits, et où les personnes plus âgées sont soignées. Le mariage et la famille sont des institutions qui ressentent la pression des rapides changements sociaux. En bien des endroits, ils sont aussi sujets à une intense activité législative de la part des gouvernements. Souvent, la législation n'est pas seulement une réaction et un ajustement à de nouvelles réalités sociales, mais une cause de changements encore plus frénétiques, généralement au nom de la liberté des personnes de choisir leur propre style de vie.
Dans l'ensemble, la famille et le mariage sont davantage soutenus dans les cultures traditionnelles indigènes, centrées sur la communauté, que dans les sociétés typiquement occidentales. Toutefois, quelques-unes de ces sociétés indigènes ont hérité de pratiques sexuelles et matrimoniales pas toujours en accord avec l'Évangile, par exemple, la pratique du «prix de la mariée», le fait qu'un mariage doit être fécond avant d'être socialement reconnu, l'asservissement des jeunes femmes dans la famille, etc. La facilité accrue des voyages et la croissance de la richesse, jointes au développement commercial et économique, ont souvent un effet négatif sur les institutions du mariage et de la famille.
La famille
36. De plus en plus dans la société occidentale, la famille en tant qu'institution sociale apparaît souvent peu sûre de son identité propre. Le monde dans lequel vivent les enfants tend de plus en plus à séparer ceux-ci de leurs parents et du foyer. L'éducation requiert du temps et des efforts déterminés comme toutes les autres activités de la vie. L'absence, physique ou psychologique, d'un parent est un trait frappant et douloureux de certaines sociétés contemporaines. Le fait que, souvent, le travail domine et prenne la majeure partie du temps des parents signifie que les enfants les voient peu à la maison. Quand les mères sont obligées de travailler, la difficulté augmente encore. Dans bien des sociétés aujourd'hui, il devient toujours plus difficile pour les parents et pour les enfants de se connaître suffisamment les uns les autres pour faire de la famille une communauté.
De plus, la situation de la famille est aussi menacée par des comportements et des pratiques de plus en plus acceptés par la société, qui rendent la famille, telle qu'on la connaissait, moins reconnaissable, ou qui lui donnent une nouvelle définition. Parfois, ces situations sont sanctionnées par la loi civile. De nombreux phénomènes sociaux ont conduit à ce stade : le grand nombre des naissances hors-mariage; les couples qui cohabitent sans être mariés; un taux élevé de divorces; les pressions pour que l'institution du mariage soit étendue aux couples homosexuels ou lesbiens, etc. Le caractère transitoire des institutions du mariage et de la famille est certainement l'un des «signes des temps» négatifs en plusieurs parties de l'Océanie aujourd'hui.
Les jeunes sont pleins d'énergie et d'idéalisme. Ils sont l'avenir de la société et de l'Église et donc, méritent d'être encouragés au mieux à développer pleinement leurs talents. Pour la plupart, les jeunes aspirent fortement à la justice et veulent travailler pour vaincre les préjugés, la pauvreté et l'inégalité dans le monde. Ils veulent participer à la construction d'un monde meilleur, plus juste et plus aimant, en dépit des divers dangers auxquels ils sont exposés, par exemple la drogue, les pressions sociales, le consumérisme, etc. En même temps, les moeurs sexuelles d'une partie de la jeunesse semblent devenir plus laxistes, spécialement en raison de la disponibilité des moyens de contraception et d'avortement. Dans de nombreuses sociétés en Océanie, la sexualité prématrimoniale est plus largement acceptée et se pratique sans aucune restriction sociale. En raison du grand impact qu'a la société sur les jeunes en leurs années importantes de formation, l'Église se trouve souvent en difficulté pour atteindre la jeunesse par ses programmes et ses services pastoraux.
La famille est une unité de base dont dépendent toutes les autres institutions sociales. L'Église reconnaît que la famille devient elle-même pour ainsi dire une «Église domestique»(40) d'adoration, de prière et de vie sacramentelle par son identification avec le Christ dans Son Corps Mystique.
Le lien du mariage
37. Pendant la dernière génération, l'enseignement de l'Église a insisté sur la grandeur de la vocation au mariage. Le mariage est décrit comme une union interpersonnelle du mari et de la femme, un partage de tous les aspects de leur vie. Le sacrement du mariage signifie que «les deux deviennent une seule chair» (Gn 2,24), de telle sorte que leur union reflète et réalise l'amour qu'a le Christ-Époux pour son Épouse, l'Église. «Maris, aimez vos femmes comme le Christ a aimé l'Église : il s'est donné pour elle» (Ep 5,25). Les évêques et les prêtres ont activement prêché ce message. Ils ont encouragé et souvent requis des couples leur participation aux cours de préparation au mariage. En maints endroits, il existe des mouvements, des programmes et des groupes en vue d'améliorer la qualité de la vie de couple dans le mariage. Des services sociaux catholiques offrent un large éventail d'assistance-conseils et de thérapies pour individus, couples et familles.
Cependant, malgré les efforts que fait l'Église, un nombre croissant de mariages se solde par un échec pour les raisons suivantes : mariage prématuré et immaturité du couple; manque de préparation pour élever et éduquer les enfants; crises affectives jointes à un manque de soutien de la part de la communauté, à l'intrusion injustifiée de parents et d'amis; stress causé par les difficultés financières et la tension dans le travail; le chômage; la transformation des rôles basés sur la différentiation sexuelle ; les moeurs sociales permissives, etc.
Face à la rupture d'un mariage, nombre de fidèles ont eu recours aux Tribunaux ecclésiastiques matrimoniaux : d'où les annulations de mariage sont devenues plus largement connues et discutées dans la communauté. Mais tout le monde ne comprend pas bien qu'une annulation n'est pas un divorce. Les curés se trouvent fréquemment confrontés à des cas pastoraux variés concernant le mariage : des cas qui demandent la vertu de compassion certes, mais qui nécessitent aussi que l'enseignement de l'Église sur le mariage et la vie familiale soit clairement affirmé. En répondant aux personnes et aux couples impliqués dans de telles situations, les prêtres, tout en rendant visible «le coeur du Christ», peuvent par une explication patiente et aimante de l'enseignement de l'Église être des instruments de paix et de réconciliation, en même temps qu'ils sont pour d'autres les témoins de la sainteté du mariage. C'est ainsi que l'Église peut aider la société et offrir aux jeunes un futur digne de leurs aspiration. En même temps, elle peut enseigner l'importance de la famille et son service à la vie, car, comme le dit le Pape Jean-Paul II, «l'avenir de l'humanité passe par la famille».(41)
CHAPITRE IV
VOCATIONS PARTICULIÈRES ET CHARISMES
Les vocations sacerdotales
38. Les vocations sacerdotales semblent être nombreuses en Papouasie - Nouvelle-Guinée et dans les Îles du Pacifique. Dans les sociétés plus occidentales cependant, les vocations s'amenuisent à un tel point qu'elles ne peuvent compenser le nombre des prêtres qui décèdent. Une telle situation signifie qu'un grand nombre de petites communautés n'ont désormais plus de prêtre résident, malgré une population en croissance. Certains pensent à tort que les laïcs pourront remplir le vide laissé par un clergé dont le nombre ne cesse de diminuer. Pareilles opinions indiquent peut-être qu'il faut y attacher une plus grande attention pour parvenir à une meilleure compréhension des rôles et des charismes propres aux prêtres et aux laïcs dans l'Église.
Le recrutement des vocations, qui a toujours été une activité pastorale délicate et exigeante, est devenu encore plus difficile depuis que des scandales impliquant des membres du clergé et des religieux sont largement divulgués par les médias. De telles situations ont des répercussions non seulement sur les vocations mais aussi, par exemple, pour les personnes impliquées, pour la réputation de l'Église, la moralité des prêtres, l'image que le fidèle a du prêtre, etc. Alors qu'en certaines régions de l'Océanie les vocations sont suffisantes, ailleurs le manque de vocations semble refléter la baisse qui existe en de nombreux pays développés. Pour ces raisons, l'Église en ces zones s'oriente vers la recherche de moyens aptes à promouvoir les vocations, en commençant par les familles et les paroisses - où ces vocations ont généralement entendu leurs premiers appels à travers l'encouragement et le soutien des parents et la vie exemplaire des prêtres.
Un autre élément du débat est constitué par une formation adéquate, ainsi que l'a souligné le Pape Jean-Paul II dans l'Exhortation Apostolique synodale Pastores dabo vobis.(42) Parfois, dans certaines régions en Océanie, le temps de formation dans les séminaires ne prépare pas suffisamment l'étudiant à entrer en dialogue avec la population et la culture qu'il devra évangéliser, le problème venant d'une part du candidat lui-même, et de l'autre de la qualité académique de l'éducation offerte. Dans d'autres cas, des cours et un apprentissage pastoraux ont été insérés dans les programmes de séminaires, souvent avec succès. La formation permanente est généralement sporadique. Il est souvent difficile pour les séminaires des zones de mission de pouvoir engager un personnel suffisamment formé. Envoyer des étudiants de ces séminaires faire des études spécialisées est parfois difficile aussi, parce qu'ils se sentent eux-mêmes peu préparés à être confrontés à des problèmes intellectuels qu'ils ne peuvent identifier dans leur propre culture. Le diaconat permanent a été introduit dans divers diocèses pour aider dans la liturgie, la catéchèse, l'administration et le ministère social de l'Église. Parmi ces diacres, un bon nombre est constitué d'hommes mariés.
La vocation des laïcs
39. Les laïcs ont de plus en plus conscience d'être une part intégrale de l'Église et ils se montrent enthousiastes de leur vocation de laïcs. Les prêtres les engagent comme collabo-rateurs dans l'administration des paroisses en tant que membres des conseils pastoraux, conseillers financiers et juridiques, catéchistes et agents pastoraux. Dans l'ensemble, les laïcs acquièrent une confiance nouvellement fondée dans leur mission et leur vocation ad intra pour l'Église. Ils sont aussi engagés ad extra dans le monde qui est leur vocation propre. Cet aspect central ou focal de leur vocation mériterait peut-être une plus grande attention dans les programmes de l'Église pour la nouvelle évangélisation en Océanie, particulièrement en soulignant le témoignage chrétien attendu des laïcs par leur vie et leurs convictions dans leurs professions séculières: dans le droit, la médecine, l'éducation et les sciences; dans le monde du travail, des loisirs et des médias; et dans le monde intime du mariage et de la famille. Tous dans l'Église - clergé, consacrés et laïcs -sont appelés à travailler ensemble, en se soutenant, en s'intéressant et s'encourageant mutuellement dans le programme d'évangélisation qui achemine au Troisième Millénaire.
Quand les missionnaires européens sont venus prêcher la foi, mais sans pouvoir parler le dialecte ou la langue locale, ou bien quand ils avaient la charge d'une ère très étendue comprenant de nombreuses communautés villageoises, naquit un groupe de ministres de l'Évangile : ils étaient les intermédiaires entre le missionnaire et le groupe local. Ces catéchistes, ainsi qu'ils étaient connus, devinrent presque une institution de droit propre, organisant et, en fait, conduisant l'assemblée locale ou le village en tout, excepté en ce qui était réservé à un prêtre. Aujourd'hui, dans certaines parties de l'Océanie, on cherche une reconnaissance plus officielle du rôle du catéchiste dans l'Église.
Une autre question qui retient l'attention en bien des parties de l'Océanie est celle de la position des femmes dans l'Église. Ceci vient d'une plus grande conscience du rôle qu'elles jouent dans la société et du nouveau statut qu'elles assument. L'Église de son côté a cherché à promouvoir et à améliorer le rôle des femmes en reconnaissant leurs nombreuses contributions à l'apostolat des laïcs et en continuant à trouver des voies pour les impliquer dans les différents services à l'Église et dans la mission de l'Église dans la société. Le renouveau liturgique leur permet d'avoir des fonctions qui ne leur étaient pas accessibles auparavant : elles participent souvent aux équipes d'aumônerie dans les hôpitaux, les universités, les écoles ou les prisons, ainsi qu'aux équipes pastorales dans les paroisses. Leur compétence professionnelle a été inappréciable dans le ministère social de l'Église et dans l'enseignement, les soins médicaux, le personnel soignant, le droit, etc.
Aujourd'hui dans l'Église en Océanie, il existe peu de structures officielles de dialogue avec les non-croyants. Toutefois, la récente fondation d'Universités catholiques en Australie, et des formes d'éducation supérieure ailleurs, sont un pas important dans le désir qu'a l'Église de dialoguer avec la culture contemporaine. Un groupe digne de mention spéciale est le corps de enseignants laïcs dans les écoles catholiques, primaires et secondaires. Ils travaillent aux côtés des religieux enseignants, leur succédant à mesure que diminue le nombre de religieux dans les écoles. Dans certains cas, leur travail est le ministère laïque le plus répandu dans l'Église. Ces enseignants exercent une influence positive sur les autres, non seulement par le rôle qu'ils jouent en tant que professeurs, mais par l'exemple chrétien de leurs vies. Toutefois, des problèmes peuvent survenir quand la vie privée d'un enseignant porte un contre-témoignage, ou quand les gens placent en eux des espoirs excessifs en tant que classe éduquée, ou encore quand ces enseignants assimilent de manière plutôt acritique les modes intellectuelles provenant d'autres pays, etc.
La politique est un domaine qui requiert l'attention des Pasteurs de l'Église.(43) Même si l'Église a une mission spirituelle et non politique, elle a un rôle dans la vie politique et dans les processus de décision de la société civile, parce que l'Évangile est destiné à l'humanité qui fait la société. Les Pasteurs de l'Église ont donc le devoir de proclamer le message de l'Évangile et sa vérité non seulement à la société en général, mais aux hommes politiques, aux parlementaires et aux leaders nationaux. C'est précisément à ce niveau que prend place le conflit le plus intense entre une «culture de vie» et une «culture de mort», ainsi que l'a expliqué le Pape Jean-Paul II dans sa Lettre Encyclique Evangelium vitae.(44) Le témoignage courageux rendu par des responsables d'Église aux valeurs de la foi contribue grandement à préserver le processus politique de la corruption, des préjugés et de l'injustice. Au contraire, les désaccords parfois ouverts entre les responsables d'Église sur les problèmes politiques et sociaux peuvent souvent conduire à la désunion dans la communauté ecclésiale comme entre les hommes politiques et la nation.
Les consacrés, les religieux et les religieuses
40. Certains symptômes indiquent qu'aujourd'hui le monde séculier est souvent un terrain vague, un vide spirituel. Même là où les chrétiens sont présents, le monde semble attendre et désirer un partage plus manifeste de la vie que Dieu offre en son Esprit. Ce désir s'exprime dans une recherche de spiritualité, sur laquelle on ne met pas parfois suffisamment l'accent. De par la riche expérience de son histoire, la richesse de sa doctrine, les exemples et le message de ses saints et de ses mystiques, l'Église - qui est Sainte - est, en Océanie, mise au défi de formuler et de répandre une spiritualité vraiment appropriée au temps présent et aux nombreuses cultures de ses populations. Souvent, aujourd'hui, les gens se demandent quelle voie, c'est-à-dire quelle «règle de vie» est propre aux évêques, aux prêtres, aux religieux et religieuses, aux laïcs mariés ou célibataires, dans leur activité dans l'Église et dans le monde.
Arriver à ce que le message chrétien soit vécu par les chrétiens dans leur vie quotidienne est probablement le plus grand défi posé à l'Église au seuil du Troisième Millénaire. Parfois, ce dont on a le plus besoin dans la célébration des sacrements, c'est d'un «sens de Dieu», c'est-à-dire, d'un témoignage que Dieu est intimement rencontré dans le silence de la prière contemplative. Parfois aussi, une perte du sens du sacré est décelé à la Messe, de même qu'une perte du sens du péché par la pratique non fréquente de la confession sacramentelle individuelle.
Dans la vie consacrée, le désir de spiritualité mentionné ci-dessus est réalisé à un haut degré et reçoit un témoignage puissant. Les Ordres contemplatifs - il y en a quelques-uns en Océanie - attestent d'une manière spéciale la transcendance de Dieu et témoignent de la profonde intimité et communion entre Dieu et la personne. Dans bien des cas, les Ordres apostoliques, à la lumière de l'aggiornamento appelé par le Concile Vatican II, ont acquis des moyens nouveaux et plus convaincants de témoigner de leur charisme par la prière, la vie communautaire et l'activité apostolique. Bien que les vocations religieuses en certaines parties de l'Océanie soient peu nombreuses, la Papouasie - Nouvelle-Guinée et les Îles du Pacifique font l'expérience inverse. L'élaboration de programmes de formation pour les nouveaux religieux, aptes à les équiper pour leur service tout au long de leur vie, est un grand défi. Dans la plupart des cultures traditionnelles de l'Océanie, les exigences fondamentales de l'Évangile sont un défi constant au système de valeurs en cours: la chasteté défie la trop grande importance donnée à la fécondité; la pauvreté, le désir de posséder et de partager la richesse comme signe de prestige; et l'obéissance, le désir de positions de pouvoir et d'influence. La vie religieuse comporte une consécration aux valeurs du Royaume, et par là un don spécial et spécifique à l'Église.
Malgré ces influences positives, la vie religieuse connaît des difficultés dans certaines régions de l'Océanie : par exemple, des interrogations sur le voeu de chasteté; un manque d'appréciation correcte du charisme de la vie religieuse par le clergé et le laïcat locaux; certaines tensions entre les évêques locaux et des religieux en raison de leur abandon de formes traditionnelles d'apostolat pour en expérimenter d'autres ou en raison des changements radicaux dans leurs styles de vie; parfois un manque d'appel à cette vocation unique auprès des jeunes; un trop-plein d'activités aux dépens de la vie de prière et de contemplation, etc.
La vraie manière de vivre un engagement apostolique à la vie consacrée n'est souvent pas facile à trouver aujourd'hui. Dans bien des endroits en Océanie, les difficultés imposent aux religieux non seulement de redécouvrir le charisme de leur fondateur, mais de chercher à l'exprimer sous de nouvelles formes de vie et de ministère.(45) Le fait que les religieux aient disparu en grande partie des institutions catholiques dans certains pays signifie que ces institutions, surtout les écoles et les hôpitaux, sont privées du témoignage unique donné par les religieux à la venue du Royaume. En même temps, quelques religieux ont fait preuve d'un grand sens de discernement spirituel dans une société séculière en entrant dans de nouvelles formes d'apostolat, comme par exemple : le soin des malades du Sida, l'apostolat auprès des sans-abri et des jeunes en crise, le choix d'aller vers les plus pauvres de la société.
CHAPITRE V
CONSTRUCTION DE LA COMMUNAUTÉ
ET MINISTÈRE DE COMMUNION
Structures favorisant la communion
41. Dans sa prière sacerdotale, le Christ supplie son Père afin que l'humanité puisse partager la vie même de la Trinité grâce à ce qu'il allait traverser dans le mystère pascal de Sa passion, mort et résurrection. «Comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi, qu'eux aussi soient un en nous, afin que le monde croie que tu m'as envoyé» (Jn17,21). Sa grande prière était : «qu'ils soient un comme nous sommes un» (Jn 17,22). Son commandement nouveau de s'aimer les uns les autres à son exemple est la norme et le critère de vie dans la communauté chrétienne.
En de nombreux endroits, les communautés chrétiennes de base ont été un bon instrument pour réunir les gens en de petits groupes dans lesquels la foi peut être approfondie et où ils peuvent assumer une plus grande responsabilité pour leur avenir en tant que communauté chrétienne. Florissantes dans des cultures plus traditionnelles, centrées sur la communauté, ces communautés sont un encourageant signe de croissance. Par moments, elles ont même pu organiser des services para-liturgiques et la vie communautaire, quand aucun prêtre n'était disponible.
Les paroisses restent le point de contact habituel des fidèles avec l'Église. En ce sens, le prêtre de paroisse a un rôle crucial de témoin de l'Église. Parfois, il est pour les fidèles le seul point de référence. Étant donné la variété des situations de chaque paroisse dans les divers diocèses de l'Océanie, le ministère paroissial aujourd'hui requiert l'ouverture du prêtre à la coopération avec des groupes variés, particulièrement avec les laïcs, pour l'organisation de la liturgie, du ministère social et de l'action dans la société. L'anonymat des larges assemblées dans les grandes villes pose des défis particuliers pour y construire un sens de la communauté. Des petits groupes, tels que les groupes de prière, les groupes d'étude biblique, les groupes Justice et Paix sont d'un grand secours. Les prêtres sont souvent confrontés au défi de devoir discerner quels mouvements conviennent à leur paroisse, ceux qui aident les fidèles à croître en sainteté et à devenir de meilleurs membres de la communauté ecclésiale diocésaine et universelle. Le centre de la paroisse est le sacrement de l'Eucharistie, âme et sommet de la communion, qui donne sens et force à la communauté et à toutes ses activités. La communauté paroissiale, dans l'esprit de l'évangélisation, est, dans les limites de son territoire, attentive au catholique et au non-catholique, au croyant et au non-croyant.
Un diocèse jouit de toutes les ressources nécessaires pour être une Église particulière dans la grande communion de l'Église universelle. Par les sacrements et la personne de l'évêque, il a le pouvoir d'engendrer sa propre vie de manière à pourvoir à tous les besoins essentiels des fidèles, tels que la vie sacramentelle, l'évangélisation, la catéchèse, les oeuvres apostoliques, etc. La cathédrale est «l'église-Mère» du diocèse où l'Ordinaire, dans sa fonction de Célébrant principal de la liturgie eucharistique,(46) est la source de l'unité pour la communauté diocésaine et le lieu où est placé la chaire épiscopale, symbole de sa charge d'enseigner. Dans bien des régions en Océanie, les diocèses ont aujourd'hui des groupes spécialisés de laïcs dans des domaines tels que justice et paix, la bio-éthique, etc. En règle générale, la plupart des diocèses ont au moins une maison de religieux contemplatifs sur leur territoire. Certains diocèses divisent leurs ressources en instituant des bureaux ou des groupes de travail au niveau de la région, de l'état ou de la nation. Le dialogue est ainsi plus effectif avec les autorités civiles et les gouvernements. Comme cela a été mentionné plus haut, les évêques dans la région collaborent dans les Conférences épiscopales, sur le plan national et international.
Les évêques et la Communion
42. Les Pasteurs de l'Église, le collège des évêques en union avec le successeur de Pierre, sont appelés à conduire, enseigner et sanctifier les fidèles qui leur sont confiés. Leur fonction est d'encourager, de coordonner et de discerner les vocations sacerdotales, religieuses et laïques dans l'Église. Ils sont les principaux agents et responsables du renouveau dans l'Église et de l'évangélisation du monde moderne. Pour cette raison, leurs décisions ont des conséquences importantes non seulement dans leur propre diocèse, mais souvent au dehors de lui. Pour être des responsables efficaces, ils ont besoin de prières, de la coopération et du soutien de la communauté ecclésiale locale. La désunion dans la communauté ecclésiale - par exemple, par le dissentiment public de l'enseignement officiel, les disputes entre individus et groupes dans l'Église, etc. - affaiblit le témoignage que l'Église doit donner au Christ et à son Évangile. Parfois ce manque d'unité est entretenu par la formation de groupes qui s'opposent les uns aux autres en raison de leurs divergences d'opinion sur le renouveau de l'Église. Pour être fidèle à sa mission, l'Église s'efforce d'enseigner les vérités éternelles d'une manière qui les rende compréhensibles aujourd'hui, pour aller à la rencontre des besoins et des sensibilités du temps. Dans cette oeuvre orientée vers une plus grande communion dans l'Église, les évêques exercent leur vocation de premiers agents de communion.
CONCLUSION
Marie, Reine de la Paix
43. Quand les missionnaires vinrent en Océanie, ils y portèrent une foi qui enseignait une profonde dévotion à la Vierge Marie. Pour ces missionnaires, la mère de Jésus était pour eux un soutien permanent dans leurs efforts d'évangélisation et un refuge dans leurs peines et leurs difficultés. Sa statue avait une place d'honneur dans de nombreuses chapelles et églises. Dans bien des régions de l'Océanie, elle était vénérée comme le Secours des Chrétiens. En réponse à la prédication des missionnaires, la dévotion à Marie a trouvé une résonance profonde et joyeuse dans la communauté catholique. Les missionnaires et leurs convertis racontaient comment Marie les a toujours guidés et assistés en raison de la relation unique qu'elle a avec Jésus, la Voie, la Vérité et la Vie. Plus récemment, les évêques l'ont nommée patronne de la région du Pacifique, sous le titre de Reine de la Paix.
L'évangile de Luc nous dit que Marie, tout de suite après avoir reçu le Verbe de Dieu dans son coeur et dans ses entrailles, sortit en hâte et marcha à travers la montagne pour visiter sa cousine Élisabeth. Quand les deux femmes se rencontrèrent, Marie, inspirée par le salut de sa cousine, proclama la Bonne Nouvelle de la venue de Dieu, annoncé par sa grossesse. Dans un chant d'allégresse, elle révéla l'extraordinaire vérité d'un monde nouveau, un monde dans lequel Dieu règnerait avec puissance, un monde de justice et de miséricorde. La nouvelle vie en elle, la vie de Jésus qu'elle nourrissait, allait naître comme le commencement promis d'un monde nouveau. En exerçant un rôle crucial dans l'Incarnation, en suivant les allées et venues prophétiques de Jésus et en restant souffrante au pied de la Croix, Marie devint la mère de tous les vivants. En elle, la Nouvelle Éve, est accompli ce qui avait été originellement promis dans le Livre de la Génèse (cf. Gn 3,15).
Marie, Femme de Foi
44. C'est en raison de sa foi que Marie peut être une telle mère. En tant que femme de foi, elle accompagne les membres de l'Église au cours de leur route et de leur vie dans la foi. La foi remplissait son coeur quand elle accueillit Jésus. Sa foi l'a soutenu dans Son ministère public, quand Il proclamait la Bonne Nouvelle et portait la guérison de Dieu. La foi de Marie l'a soutenue au pied de la Croix. Enfin, sa foi l'a fait prier avec les disciples rassemblés, qui attendaient et espéraient la venue de l'Esprit. De sa manière humble et cachée, elle a soutenu les débuts de l'Église.
Puisse Marie, le Secours des Chrétiens, aider l'Église universelle à réfléchir sur le présent et l'avenir de la communauté de foi catholique en Océanie. Elle est l'Étoile de la mer et la lumière qui guide la marche sur les pas de Jésus. Elle est un exemple encourageant pour annoncer la vérité révélée par Jésus. Elle est une mère nourricière pour vivre la vie de Jésus. Confiants en son affectueuse attention, les membres de l'Église chercheront à perséverer dans leur adhésion à Jésus, la Voie, la Vérité et la Vie.
Marie, Reine de la Paix , priez pour l'Église en Océanie.
QUESTIONS
PREMIÈRE PARTIE
CHAPITRE I
1. Décrivez la situation dans votre Église à la lumière de la conscience et de l'activié missionnaires. Que peut-on faire pour rendre les gens plus conscients de leur responsabilité de «parcourir le chemin de la mission», c'est-à-dire de témoigner du Christ en parole et en action, pas simplement dans leur communauté locale, mais aussi au-delà de celle-ci ? Que peut-on faire en Océanie pour assurer que l'Évangile y soit proclamé aux groupes et dans les lieux où il n'a pas encore été entendu, ou bien où il a besoin d'être entendu à nouveau ?
CHAPITRE II
2. Dans votre région d'Océanie, comment l'Église reflète et prend-elle en compte de la variété des cultures dans la société ? Décrivez comment l'Église est enrichie par cette variété et diversité des cultures, et quelle place celles-ci tiennent-elles dans son travail de planification pastorale ? Décrivez de quelle manière sont évangélisées les cultures locales et comment l'Évangile invite-t-il les gens à se convertir ? Quelle contribution spéciale les chrétiens apportent-ils à un plus grand dialogue entre ces cultures ?
3. En quelle mesure l'inculturation de l'Évangile prend-elle place dans votre Église ? Quels en sont les aspects positifs et les aspects négatifs ? Par quels moyens l'inculturation de la foi peut-elle être promue ? Quelle contribution l'Église en Océanie apporte-t-elle aux cultures de ses populations, spécialement dans les domaines tels que l'art, l'architecture, la science, la littérature, le cinéma, etc.? Comment les écoles et les Universités catholiques contribuent-elles à ce processus?
4. Décrivez la situation des minorités ethniques dans votre région d'Océanie, au regard des droits de l'homme, de l'éducation, du développement économique, des services de santé, du logement, etc.? Quelles mesures pastorales l'Église prend-elle pour assurer que les besoins spirituels des gens soient entendus ?
5. Comment le phénomène des migrations affecte-t-il votre région en Océanie ? Comment l'Église répond-elle aux besoins pastoraux des gens impliqués ? Décrivez les effets positifs et négatifs, s'il y en a, de l'augmentation du tourisme et ce que fait l'Église face à cette situation relativement nouvelle en Océanie ? Que peut faire l'Église à l'avenir ?
6. Comment l'Église répond-elle aux possibilités offertes et aux défis présentés par l'augmentation de l'urbanisation dans votre région en Océanie ? Décrivez comment l'Église répond aux besoins des gens, spécialement à ceux des jeunes ? De quelle manière l'Église peut-elle faire face aux problèmes d'injustice et d'immoralité dans les zones urbaines ? Comment les communautés chrétiennes pourront-elles à l'avenir porter un témoignage plus effectif dans les grandes villes ?
DEUXIÈME PARTIE
CHAPITRE I
7. Dans un programme de nouvelle évangélisation, comment, dans la communauté ecclésiale, l'Église «annonce-t-elle la vérité révélée par Jésus-Christ» en encourageant ses membres à un renouveau spirituel et en leur donnant des occasions de le faire : par exemple, sur les plans de la vie sacramentelle, de la formation du clergé, des religieux, des personnes consacrées et des laïcs, etc.? Comment l'Église peut-elle proclamer l'Évangile dans la société en tenant compte des circonstances culturelles particulières, telles que le pluralisme, le relativisme culturel et moral très répandus, l'éloignement de la foi, l'agnosticisme croissant, l'athéisme, etc.? Que faut-il faire à l'avenir pour amener les gens au Christ et à la foi catholique ?
8. Dans votre Église locale, quel est l'état actuel de la catéchèse? Que faut-il faire encore pour la rendre plus effective pour les divers secteurs de la communauté chrétienne : pour les enfants, les jeunes, les adultes, l'éducation catholique, les catholiques dans les institutions publiques d'éducation, etc. ? Comment peut-on mieux utiliser les masses-médias comme instrument pour la catéchèse ?
CHAPITRE II
9. Évaluez les progrès, les programmes et les effets du mouvement oecuménique dans votre région de l'Océanie ? Que fait l'Église dans ses relations avec les autres religions, par exemple avec les Juifs, les Musulmans, les Hindous, les religions traditionnelles ? Quels en sont les résultats ? Que peut faire l'Église à l'avenir pour faire croître la coopération dans ces relations, en vue d'un bénéfice mutuel en même temps que d'un bénéfice pour la société ?
CHAPITRE III
10. Décrivez la situation créée par la présence de sectes et de nouveaux mouvements religieux dans votre Église ? À votre avis, quelle est la cause de l'attirance qu'ils exercent : besoins des individus ? faiblesse de la foi chez certains chrétiens ? facteurs familiaux, de groupes ou de la société en général, etc. ? Comment l'Église peut-elle mieux répondre aux défis posés par ces sectes et ces mouvements religieux ?
CHAPITRE IV
11. Comment peut-on faire mieux connaître l'enseignement social de l'Église, particulièrement au regard des problèmes de justice et de paix ? Décrivez et évaluez comment l'Église applique ces enseignements aux problèmes sociaux, politiques, économiques et culturels ? Quel est le rôle de l'Église quand elle traite de ces questions au niveau international ? Quels défis spécifiques particuliers à l'Océanie existent à ce niveau - par exemple, globalisation et développement, peuples indigènes, poursuite de relations pacifiques entre les peuples, écologie, etc.? Comment l'Église peut-elle améliorer sa contribution dans ces domaines de justice et de paix ?
TROISIÈME PARTIE
CHAPITRE I
12. Du point de vue de l'Océanie et de votre Église locale, évaluez le processus de renouveau, commencé au Concile Vatican II, dans le but d'amener les chrétiens à «vivre la vie de Jésus-Christ», tant au niveau individuel qu'à celui de la communauté ecclésiale : par exemple vie sacramentelle, vivre le mystère de l'Église-communion, etc.? Comment le Concile Vatican II a-t-il été reçu en Océanie ? Comment évaluez-vous les changements qu'il a provoqués ? Qu'est-il encore besoin de faire ?
CHAPITRE II
13. En tant que gérants du don de la vie, qui a son origine et sa destinée en Dieu, comment les membres de votre communauté ecclésiale - individuellement et collectivement - éveillent-ils autour d'eux la conscience du caractère sacré et de la dignité de toute vie humaine ? Que peut faire l'Église en Océanie dans les secteurs de la société particulièrement touchés par ce problème, comme par exemple, l'avortement, la mentalité anticonceptionnelle, les comportements envers la sexualité, les soins médicaux, les hôpitaux, l'euthanasie, etc.? Comment l'Église répond-elle aux nouvelles bio-technologies ? Quelle ligne l'Église devrait-elle suivre à l'avenir dans son action pastorale dans les domaines cités ?
CHAPITRE III
14. Dans l'Église et dans la société, décrivez la situation du mariage et de la famille dans votre région de l'Océanie ? Comment l'Église peut-elle contribuer à renforcer l'institution du mariage et par là, faire de la famille un milieu stable et sain qui accueille la vie humaine, élève les enfants, guide les jeunes, bref, qui aide ses membres à s'épanouir et veille sur tous les besoins personnels de chacun dans la famille ?
CHAPITRE IV
15. Décrivez les vocations, charismes ou problèmes particuliers qui retiennent présentement l'attention dans votre communauté ecclésiale, spécialement à la lumière du moto «vivre la vie du Christ» dans une nouvelle évangélisation de l'Océanie en vue du IIIème millénaire- par exemple, le sacerdoce, les vocations sacerdotales, les séminaires, le laïcat, le rôle des catéchistes, les femmes dans l'Église, la vie politique, la vie consacrée, l'éducation et les écoles catholiques, les questions sociales, etc.?
CHAPITRE V
16. Comment l'Église dans votre région répond-elle, par ses membres et par ses structures, à sa vocation et à sa mission de constructeur de communion dans la communauté ecclésiale ? Comment accomplit-elle sa mission d'être le sacrement d'unité dans le monde ? Que peut faire de plus l'Église à l'avenir pour réaliser cette tâche ?
AUTRES THÈMES
17. Évaluez la situation de l'Église en Océanie par rapport à l'Église universelle ? Quelle contribution spécifique l'Église en Océanie peut-elle donner à l'Église universelle ? Et comment peut-elle bénéficier du don de communion avec l'Église universelle ?
18. À la lumière du thème de l'Assemblée Spéciale, faites quelques remarques ou suggestions sur les matières qui, à votre avis, n'ont pas été suffisamment traitées dans les Lineamenta, ou qui ne sont pas inclues dans la série des questions posées.
NOTES
(1) 1 Voir également «Blessed are the Peacemakers» (1991) («Bienheureux les artisans de paix»), Déclaration des évêques de Papouasie - Nouvelle-Guinée et des Îles Salomon, dans : Statements of the Catholic Bishops' Conference of Papua New Guinea and the Solomon Islands 1969-1992, Hohola, 1993, pp. 73-74. Voir aussi «Social Unrest in PNG Today» («Troubles sociaux en Papouasie - Nouvelle-Guinée aujourd'hui», Ibid., pp. 83-84).
(2) À l'exception de l'Irian Jaya qui a une frontière avec la Papouasie - Nouvelle-Guinée mais qui appartient à l'Indonésie, et des Îles Hawaï, qui appartiennent aux U.S.A.
(3) Les textes originaux des allocutions du Pape Paul VI au cours de sa visite de 1970 sont reportés dans AAS (1971) 46-73. Pour celles de Jean-Paul II à l'occasion de ses visites de 1984, voir AAS 76 (1984) 1003-1019 ; de ses visites de 1986, AAS 79 (1987) 929-983 ; de ses visites de 1995, AAS (prochaine publication).
(4) Cf. Paul VI, Allocution aux jeunes d'Australie (2.XII.1970) : AAS 63 (1971) 63.
(5) Cf. Paul VI, Allocution aux jeunes d'Australie (2.XII.1970) : AAS 63 (1971) 72 ; Cf. aussi Jean-Paul II, Allocution aux évêques de la CEPAC, à Suva (21.XI.1986) : AAS 79 (1987) 929-934 : «De par sa nature, l'Église est missionnaire (...) L'Église en Océanie montre de façon éloquent les fruits de l'esprit qui évangélise. Chaque membre de l'Église a le devoir d'évangéliser (...)».
(6) Cf. Paul VI, Allocution aux évêques d'Océanie à Sydney (1.XII.1970); AAS 63 (1971) 56.
(7) Concile Oecumenique Vatican II, Constitution dogmatique sur l'Église Lumen gentium, 17.
(8) Jean-Paul II, Allocution aux populations aborigènes à Alice Springs, Australie (29 novembre 1986) : L'Osservatore Romano, éd. Française, 13 janvier 1987, p. 6 : AAS 79 (1987) 977.
(9) Cf. Jean-Paul II, Lettre encyclique Redemptoris missio, 54 : AAS 83 (1991) 301.
(10) Cf. Jean-Paul II, Allocution aux populations aborigènes à Alice Springs, Australie (29.XI.1986) : AAS 79 (1987) 973-979.
(11) Cf. ibid.
(12) Jean-Paul II, Allocution aux évêques de Nouvelle-Zélande, 5 : L'Osservatore Romano, éd. Française, 9.XII.1986, p. 6.
(13) Concile Oecumenique Vatican II, Constitution pastorale sur l'Église dans le monde de ce temps Gaudium et spes, 22.
(14) Paul VI, Exhortation apostolique Evangelii nuntiandi, 3 et note 6 : AAS 68 (1976) 6.
(15) Concile Oecumenique Vatican II, Décret sur la formation des prêtres Optatam totius, 16.
(16) Paul VI, Exhortation apostolique Evangelii nuntiandi, 13: AAS 68 (1976) 12.
(17) Ibid., 24 : AAS 68 (1976) 21.
(18) Ibid., 2 : AAS (1976) 6.
(19) Jean-Paul II, Lettre encyclique Evangelium vitae, 24: AAS 87 (1995) 427.
(20) Cf. Jean-Paul II, Lettre encyclique Veritatis splendor, 100: AAS 85 (1993) 1211-1212.
(21) Saint Jérôme, Commentarium in Isaias, Prol. : PL 24, 17.
(22) Concile Oecumenique Vatican II, Constitution dogmatique sur la Révélation divine Dei Verbum, 21.
(23) Concile Oecumenique Vatican II, Décret sur l'Oecuménisme Unitatis redintegratio, Introduction.
(24) Jean-Paul II, Lettre encyclique Ut unum sint : AAS 87 (1995) 921-982.
(25) Cf. Jean-Paul II, Lettre apostolique Tertio millennio adveniente, 38 : AAS 87 (1995) 31.
(26) Cf. Conseil Pontifical pour le Dialogue Inter-Religieux, Conseil Pontifical pour la Promotion de l'unité des Chrétiens, Conseil Pontifical pour le Dialogue avec les Non-Croyants, Conseil Pontifical pour la Culture, Les sectes et les nouveaux mouvements religieux (Cité du Vatican : Typographie Polyglotte, 1986).
(27) Concile Oecumenique Vatican II, Constitution pastorale sur l'Église de ce temps Gaudium et spes, 42.
(28) Ibid., 40.
(29) Ibid., 42.
(30) Cf. Jean-Paul II, Lettre encyclique Sollicitudo rei socialis, 46 : AAS 80 (1988) 579.
(31) Cf. Concile Oecuménique Vatican II, Constitution dogmatique sur l'Église Lumen gentium, 1.
(32) Cf. Ibid., Constitution sur la Sainte Liturgie Sacrosanctum Concilium, 7, 9.
(33) Jean-Paul II, Lettre encyclique Evangelium vitae, 65 :AAS 87 (1995) 475.
(34) Cf. ibid., 90 : AAS 87 (1995) 503-504.
(35) Ibid., 27 : AAS 87 (1995) 432.
(36) Ibid., 68 : AAS 87 (1995) 480.
(37) Ibid., 70 : AAS 87 (1995) 483.
(38) Cf. ibid., 73 : AAS 87 (1995) 486-487.
(39) Ibid., 88 : AAS 87 (1995) 501.
(40) Paul VI, Exhortation apostolique Evangelii nuntiandi, 71 : AAS 68 (1976) 60.
(41) Jean-Paul II, Exhortation apostolique Familiaris consortio, 86 : AAS 74 (1982) 88.
(42) Cf. Jean-Paul II, Exhortation apostolique synodale Pastores dabo vobis, 42 ss. : AAS 84 (1992) 729-31.
(43) Cf. Concile Oecuménique Vatican II, Constitution pastorale sur l'Église dans le monde de ce temps Gaudium et spes, 76; Jean-Paul II, Lettre encyclique Evangelium vitae, 5 ; 82 : AAS 87 (1995) 406 ; 494.
(44) Cf. Jean-Paul II, Lettre encyclique Evangelium vitae, 28 : AAS 87 (1995) 432.
(45) Cf. Jean-Paul II, Exhortation apostolique synodale Vita consecrata, 96 ss. : AAS 88 (1996) 471-476.
(46) Cf. S. Ignace d'Antioche, Epistula ad Philadelphenses, III-IV : F. Funk, Patres apostolici, vol I, Tubingae 1901, p.266-67.
TABLES DES MATIÈRES
Préface
Introduction
Jésus-Christ et les Peuples d'Océanie
L'Océanie et ses populations
Un Synode pour l'Océanie
Jésus-Christ : le Chemin, la Vérité et la Vie
Première Partie
Suivre le chemin de Jésus-Christ
Introduction : suivre le chemin de la Mission
Chapitre I : Le chemin du Christianisme en Océanie
Premiers contacts et premiers efforts missionnaires
Initiatives du Saint-Siège
Activité des Congrégations et Instituts missionnaires
Les Océaniens en tant que missionnaires
Chapitre II : Le chemin vers les nombreuses cultures
Introduction
La diversité culturelle
L'Inculturation
Les minorités ethniques et les populations indigènes
Les migrations et le tourisme
Urbanisation et industrialisation
Deuxième Partie
Proclamer la vérité de Jésus-Christ
Introduction : le Christ, la Vérité
Chapitre I : L'Évangélisation
Proclamer l'Évangile
Les défis présents
Le Kerygme ou la première annonce de l'Évangile
Le Concile Vatican II
La Catéchèse : grandir dans la foi
Chapitre II : Oecuménisme et Dialogue Inter-religieux
L'Oecuménisme
Le Dialogue inter-religieux
Chapitre III : Les Sectes
Vision d'ensemble
Points spécifiques
Chapitre IV : Justice et Paix
Travailler pour instaurer le Royaume de Dieu
Responsabilité dans la Création
Troisième Partie
Vivant la vie de Jésus-Christ
Introduction : La vie nouvelle dans le Christ
Chapitre I : Les Sacrements
Le Renouveau au Concile Vatican II
La Réforme liturgique
La vie par les sacrements
Chapitre II : La vie humaine et la santé
La vie, don de Dieu
Attitudes culturelles envers la vie
Questions morales
L'Église rend témoignage à la vie
Chapitre III : Mariage et Famille
Effets culturels
La famille
Le lien du mariage
Chapitre IV : Vocations particulières et charismes
Les vocations sacerdotales
La vocation des laïcs
Les consacrés, les religieux et les religieuses
Chapitre V : Construction de la Communauté et Ministère de Communion
Structures favorisant la communion
Les évêques et la Communion
Conclusion
Marie, Reine de la Paix
Marie, Femme de Foi
Questions
Tables des Matières