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SYNODUS EPISCOPORUM

XIIIe ASSEMBLÉE GÉNÉRALE ORDINAIRE
DU SYNODE DES ÉVÊQUES
7-28 OCTOBRE 2012

MESSAGE AU PEUPLE DE DIEU

Frères et sœurs,

« Que la grâce et la paix soient avec vous tous, de la part de Dieu notre Père et de Jésus Christ le Seigneur » (Rm 1, 7). Nous, évêques venant du monde entier, réunis à l’invitation de l’évêque de Rome, le Pape Benoît XVI, pour réfléchir sur « la nouvelle évangélisation pour la transmission de la foi chrétienne », avant de rentrer dans nos Églises particulières, nous voulons nous adresser à vous tous, pour soutenir et orienter le service de l’Évangile dans les différents contextes où nous nous retrouvons pour témoigner.

1. Comme la Samaritaine au puits de Jacob

Nous nous laissons illuminer par une page de l’Évangile : la rencontre de Jésus avec la Samaritaine au puits de Jacob (cf. Jn 4, 5-42). Il n’y a pas d’homme ou de femme qui ne se trouve, à un moment de sa vie, comme la femme de Samarie, près d’un puits avec une cruche vide et l’espérance de trouver la réalisation de l’aspiration la plus profonde du cœur, la seule qui puisse donner sa pleine signification à l’existence. Aujourd’hui, nombreux sont les puits qui s’offrent à la soif de l’homme, mais un discernement est nécessaire afin d’éviter des eaux polluées. Il est urgent de bien orienter la recherche pour ne pas devenir la proie de désillusions destructrices.

Comme Jésus au puits de Sychar, l’Église aussi ressent le devoir de s’asseoir aux côtés des hommes et des femmes de notre temps, pour rendre présent le Seigneur dans leur vie, afin qu’ils puissent le rencontrer, car seul son Esprit est l’eau qui donne la vie véritable et éternelle. Seul Jésus est capable de lire jusqu’aux tréfonds de notre cœur et de nous dévoiler notre propre vérité : « Il m’a dit tout ce que j’ai fait », confesse la Samaritaine à ses concitoyens. Cette annonce, à laquelle se joint la question qui ouvre à la foi : « Ne serait-il pas le Messie ? », montre comment celui qui a reçu la vie nouvelle dans la rencontre avec Jésus ne peut manquer de devenir à son tour porteur de vérité et d’espérance pour les autres. La pécheresse convertie devient messagère du salut et conduit à Jésus tout son village. De l’accueil du témoignage, les gens passeront à l’expérience personnelle de la rencontre : « Ce n’est plus à cause de ce que tu nous as dit que nous croyons maintenant ; nous l’avons entendu par nous-mêmes, et nous savons que c’est vraiment lui le Sauveur du monde ».

2. Une nouvelle évangélisation

Conduire les hommes et les femmes de notre temps à Jésus, à la rencontre avec lui, est une urgence qui touche toutes les régions du monde, celles de récente tout autant que celles d’ancienne évangélisation. Partout en effet on ressent le besoin de raviver une foi qui risque de s’obscurcir en des contextes culturels qui en entravent l’enracinement personnel, le rayonnement social, la clarté de contenu et les fruits cohérents.

Il ne s’agit pas de tout recommencer à zéro, mais de s’insérer dans le long chemin de la proclamation de l’Évangile, avec le zèle apostolique de Paul, lequel en vient à dire : « Malheur à moi si je n’annonce pas l’Évangile ! » (1 Co 9, 16). Depuis les premiers siècles de l’ère chrétienne jusqu’à aujourd’hui, cette proclamation de l’Évangile a parcouru l’histoire et a édifié des communautés de croyants dans toutes les parties du monde. Qu’elles soient petites ou grandes, elles sont le fruit du dévouement de missionnaires et de nombreux martyrs, de générations de témoins de Jésus, vers lesquels se tourne notre mémoire reconnaissante.

Les scénarios sociaux, culturels, économiques, politiques et religieux, changeants nous appellent à quelque chose de nouveau: à vivre d’une manière renouvelée notre expérience communautaire de foi et son annonce, au moyen d’une évangélisation « nouvelle dans son ardeur, dans ses méthodes, dans ses expressions» (Jean-Paul II, Discours à la XIXe assemblée de la celam, Port-au-Prince 9 mars 1983, n. 3), comme le disait Jean-Paul II, une évangélisation, comme nous l’a rappelé Benoît XVI, « orientée principalement vers les personnes qui, tout en étant baptisées se sont éloignées de l’Église, et vivent sans se référer à la pratique chrétienne [...], pour favoriser chez ces personnes une nouvelle rencontre avec le Seigneur, qui seul remplit l’existence de signification profonde et de paix ; pour favoriser la redécouverte de la foi, source de grâce qui apporte la joie et l’espérance dans la vie personnelle, familiale et sociale » (Benoît XVI, Homélie de la célébration eucharistique pour l’inauguration solennelle de la XIIIe Assemblée Générale Ordinaire du Synode des Évêques, Rome le 7 octobre 2012).

3. La rencontre personnelle avec Jésus Christ dans l’Église

Avant de dire quelque chose concernant les formes que doit assumer cette nouvelle évangélisation, nous ressentons l’exigence de vous dire, avec une conviction profonde, que la foi se décide tout entière dans le rapport que nous instaurons avec la personne de Jésus qui vient le premier à notre rencontre. L’œuvre de la nouvelle évangélisation consiste à proposer de nouveau, au cœur et à l’esprit souvent distraits et confus des hommes et des femmes de notre temps, et avant tout à nous-mêmes, la beauté et la nouveauté de la rencontre avec le Christ. Nous vous invitons tous à contempler le visage du Seigneur Jésus Christ, à entrer dans le mystère de son existence, donnée pour nous jusqu’à la Croix et confirmée comme don du Père par sa Résurrection d’entre les morts et qui nous est communiquée par l’Esprit. C’est dans la personne de Jésus que se dévoile le mystère de l’amour de Dieu le Père pour toute la famille humaine qu’il n’a pas voulu laisser à la dérive d’une impossible autonomie, mais qu’il a réunie à lui en un pacte d’amour renouvelé.

L’Église est cet espace offert par le Christ dans l’histoire afin que nous puissions le rencontrer, parce qu’il lui a confié sa Parole, le Baptême qui nous rend fils de Dieu, son Corps et son Sang, la grâce du pardon du péché dans le sacrement de la Réconciliation surtout, l’expérience d’une communion qui est le reflet du mystère même de la Sainte Trinité, la force de l’Esprit qui suscite la charité envers tous.

Il faut favoriser des communautés accueillantes, dans lesquelles tous les exclus se sentent chez eux, des expériences concrètes de communion, qui, avec la force ardente de l’amour, — « Voyez comme ils s’aiment ! » (Tertullien, Apologétique, 39, 7) — attirent le regard désenchanté de l’humanité contemporaine. La beauté de la foi doit resplendir en particulier dans les actions de la liturgie sacrée, dans l’Eucharistie dominicale avant tout. C’est proprement dans les célébrations liturgiques que l’Église dévoile en fait son visage d’œuvre de Dieu et rend visible, dans les paroles et dans les gestes, le sens de l’Évangile.

C’est à nous aujourd’hui de rendre concrètement accessibles des expériences d’Église, de multiplier les puits auxquels inviter les hommes et les femmes assoiffés, pour faire rencontrer Jésus, véritable oasis dans les déserts de la vie. Les communautés chrétiennes en sont responsables et, en elles, c’est chaque disciple du Seigneur qui l’est aussi. C’est à chacun qu’est confié un irremplaçable témoignage, afin que l’Évangile puisse croiser l’existence de tous; c’est pourquoi la sainteté de vie est exigée de nous.

4. Les occasions de rencontre avec Jésus et l’écoute de la Parole

On se demandera comment faire tout cela. Il ne s’agit pas d’inventer on ne sait quelles stratégies, comme si l’Évangile était un produit à placer sur le marché des religions, mais de redécouvrir la façon dont, dans la vie de Jésus, les personnes se sont approchées de lui et ont été appelées par lui, afin d’introduire ces mêmes modalités dans les conditions de notre temps.

Rappelons-nous par exemple comment Pierre, André, Jacques et Jean ont été interpellés par Jésus dans le contexte de leur travail, comment Zachée a pu passer de la simple curiosité à un chaleureux partage du repas avec le Maître, comment le centurion romain lui a demandé d’intervenir à l’occasion de la maladie d’une personne chère, comment l’aveugle de naissance l’a invoqué pour être libéré de sa marginalisation, comment Marthe et Marie ont vu leur hospitalité, chez elles et dans leur cœur, récompensée par sa présence. Nous pourrions continuer à parcourir les pages de l’Évangile pour illustrer combien, dans des conditions variées, la vie des personnes s’est ouverte à la présence du Christ. Nous pouvons en faire autant avec ce que nous disent les Écritures concernant l’expérience missionnaire des apôtres dans l’Église primitive.

La lecture fréquente des Saintes Écritures, illuminée par la Tradition de l’Église qui nous les a transmises et en est l’authentique interprète, est non seulement un passage obligé pour connaître le contenu même de l’Évangile, c’est-à-dire la personne de Jésus dans le contexte de l’histoire du salut, mais elle nous aide aussi à trouver de nouveaux espaces de rencontre avec lui, des modalités vraiment évangéliques, enracinées dans les dimensions fondamentales de la vie humaine : la famille, le travail, l’amitié, la pauvreté, les épreuves de la vie, etc.

5. Nous laisser évangéliser nous-mêmes et nous disposer à la conversion

Ne pensons surtout pas que la nouvelle évangélisation ne nous concerne pas personnellement ! Ces jours-ci, à plusieurs reprises, des voix se sont levées parmi les évêques pour rappeler que, pour pouvoir évangéliser le monde, l’Église doit avant tout se mettre à l’écoute de la Parole. L’invitation à évangéliser se traduit en un appel à la conversion.

Nous sentons sincèrement le devoir de nous convertir avant tout nous-mêmes à la puissance du Christ, qui seul est capable de renouveler toute chose, surtout nos pauvres existences. Avec humilité, nous devons reconnaître que les pauvretés et les faiblesses des disciples de Jésus, en particulier de ses ministres, pèsent sur la crédibilité de la mission. Nous sommes, certes, conscients, nous évêques en premier lieu, de ne jamais pouvoir être à la hauteur de l’appel du Seigneur et de la garde qu’il nous a confiée de son Évangile pour l’annoncer aux nations. Nous avons conscience du devoir de reconnaître humblement notre vulnérabilité aux blessures de l’histoire et nous n’hésitons pas à reconnaître nos propres péchés. Cependant, nous sommes aussi convaincus que la force de l’Esprit du Seigneur peut renouveler son Église et la revêtir de beauté, si nous nous laissons modeler par lui. Les vies des saints en sont la preuve. C’est pourquoi en faire mémoire et les raconter est un instrument privilégié de la nouvelle évangélisation.

Si ce renouvellement était confié à nos forces, il y aurait de sérieux motifs de douter, mais la conversion, comme l’évangélisation, n’a pas dans l’Église comme premiers acteurs les pauvres hommes que nous sommes, mais bien plutôt l’Esprit même du Seigneur. C’est en cela que réside notre force ainsi que notre certitude que le mal n’aura jamais le dernier mot, ni dans l’Église ni dans l’histoire : « Que votre cœur ne se trouble pas et qu’il n’ait pas de crainte » a dit Jésus à ses disciples (Jn 14, 27).

L’œuvre de la nouvelle évangélisation repose sur cette certitude sereine. Nous sommes confiants dans l’inspiration et dans la force de l’Esprit, qui nous enseignera ce que nous devons dire et ce que nous devons faire, même dans les circonstances les plus difficiles. C’est notre devoir, par conséquent, de vaincre la peur par la foi, le découragement par l’espérance, l’indifférence par l’amour.

6. Recueillir les nouvelles chances d’évangélisation dans le monde d’aujourd’hui

Ce courage serein inspire également notre regard sur le monde contemporain. Nous ne nous sentons pas intimidés par les conditions des temps que nous vivons. C’est un monde plein de contradictions et de défis, mais il reste création de Dieu, blessé certes par le mal, mais toujours aimé de Dieu, dans lequel peut germer à nouveau la semence de la Parole afin qu’elle donne un fruit neuf.

Il n’y a pas de place pour le pessimisme dans les esprits et dans les cœurs de ceux qui savent que leur Seigneur a vaincu la mort et que son Esprit œuvre avec puissance dans l’histoire. Avec humilité, mais aussi avec détermination — celle qui vient de la certitude que la vérité vaincra à la fin — nous rejoignons ce monde et voulons y voir une invitation du Ressuscité à être témoins de son Nom. Notre Église est vivante et affronte, avec le courage de la foi et le témoignage de tant de ses fils, les défis que l’histoire nous lance.

Nous savons que, dans le monde, nous devons faire face à la bataille contre « les Principautés et les Puissances », « les esprits du mal » (Ep 6, 12). Nous ne nous cachons pas les défis des phénomènes de globalisation, ni ne les craignons. Ils doivent être pour nous une chance pour l’élargissement de la présence de l’Évangile. De même les migrations — avec le poids de souffrance qu’elles comportent et dont nous voulons sincèrement être proches par un authentique accueil des frères — sont des occasions, comme cela est déjà arrivé dans le passé, de diffusion de la foi et de communion à travers la variété des formes qu’elles prennent. La sécularisation, mais aussi la crise de l’hégémonie de la politique et de l’État, conduisent l’Église à repenser sa propre présence dans la société, mais sans renoncer à cette présence. Les nombreuses et toujours nouvelles formes de pauvreté ouvrent des espaces inédits au service de la charité : la proclamation de l’Évangile engage l’Église à être proche des pauvres et à faire sienne leur souffrance à la manière de Jésus. Même dans les formes les plus âpres de l’athéisme et de l’agnosticisme nous entendons pouvoir reconnaître, bien que sous la forme de contradictions, non un vide, mais une nostalgie, une attente qui espère une réponse adéquate.

Face à ces interrogations que les cultures dominantes posent à la foi et à l’Église, nous renouvelons notre confiance dans le Seigneur, sûrs que même dans ces contextes l’Évangile est porteur de lumière et capable de guérir chaque faiblesse de l’homme. Ce n’est pas nous qui conduisons l’œuvre de l’évangélisation mais Dieu. Comme le Pape nous l’a rappelé : « La première parole, l’initiative vraie, l’activité vraie, vient de Dieu et c’est seulement en nous insérant dans cette initiative divine, seulement en implorant cette initiative divine, que nous pouvons nous aussi devenir — par Lui et en Lui — évangélisateurs » (Benoît XVI, Méditation de la première Congrégation générale de la XIIIe Assemblée Générale Ordinaire du Synode des Évêques, Rome le 8 octobre 2012).

7. Évangélisation, famille et vie consacrée

Depuis la première évangélisation, la transmission de la foi dans la succession des générations a trouvé dans la famille un lieu naturel. À l’intérieur de celle-ci — avec un rôle tout spécial assumé par les femmes, sans oublier la figure et la responsabilité paternelle — les signes de la foi, la communication des premiers rudiments, l’éducation à la prière, le témoignage des fruits de l’amour ont été introduits dans l’existence des enfants et des jeunes par le soin que chaque famille réserve à la croissance de ses enfants. Dans la diversité des situations géographiques, culturelles et sociales, tous les Évêques du Synode ont confirmé ce rôle essentiel de la famille dans la transmission de la foi. On ne peut penser une nouvelle évangélisation sans ressentir une responsabilité spéciale pour l’annonce de l’Évangile aux familles et les soutenir dans leur devoir d’éducation.

Nous ne nous cachons pas le fait qu’aujourd’hui la famille, qui se constitue par le mariage d’un homme et d’une femme, faisant d’eux « une seule chair » (Mt 19, 6) ouverte à la vie, est traversée partout par des facteurs de crises, environnée de modèles de vie qui la pénalisent, négligée par les politiques de cette société dont elle est pourtant la cellule fondamentale, pas toujours respectée dans ses rythmes, ni soutenue dans ses engagements, parfois par les communautés ecclésiales elles-mêmes. C’est précisément cela qui nous pousse à dire que nous devons avoir un soin particulier pour la famille et pour sa mission dans la société et dans l’Église, en développant des parcours d’accompagnements spécifiques avant et après le mariage. Nous voulons aussi exprimer notre reconnaissance aux si nombreux époux et si nombreuses familles chrétiennes qui par leur témoignage continuent à montrer au monde une expérience de communion et de service qui est le germe d’une société plus fraternelle et plus pacifique.

Notre pensée va aussi vers les nombreuses situations familiales et de vie commune dans lesquelles n’est pas respectée cette image d’unité et d’amour pour toute la vie que le Seigneur nous a confiée. Il y a des couples qui mènent une vie commune sans le lien sacramentel du mariage, les situations familiales irrégulières construites après l’échec de mariages antérieurs se multiplient : douloureux événements qui se répercutent aussi sur l’éducation des enfants à la foi. À tous ceux-là nous voulons dire que l’amour du Seigneur n’abandonne personne, que l’Église les aime aussi et reste une maison accueillante pour tous, qu’ils demeurent membres de l’Église même s’ils ne peuvent recevoir l’absolution sacramentelle et l’Eucharistie. Que les communautés catholiques soient accueillantes envers ceux qui vivent ces situations, et qu’elles favorisent des chemins de conversion et de réconciliation.

La vie familiale est le premier lieu dans lequel l’Évangile se rencontre dans le quotidien de la vie et montre sa capacité à transfigurer les conditions fondamentales de l’existence sous le signe de l’amour. Il n’est pas de moindre importance pour le témoignage de l’Église de montrer comment cette vie temporelle s’accomplit au-delà de l’histoire des hommes et rejoint la communion éternelle avec Dieu. Jésus ne se présente pas simplement à la Samaritaine comme celui qui donne la vie, mais comme celui qui donne la « vie éternelle » (Jn 4, 14). Le don de Dieu, que la foi rend présent, n’est pas simplement la promesse de conditions meilleures dans ce monde, mais l’annonce que le sens ultime de notre vie est au-delà de ce monde, dans cette communion pleine avec Dieu que nous attendons à la fin des temps.

De cet horizon supraterrestre du sens de l’existence humaine, ceux qui ont été appelés à la vie consacrée par le Seigneur sont particulièrement témoins dans l’Église et dans le monde. Cette vie, justement parce que totalement consacrée à lui, dans l’exercice de la pauvreté, de la chasteté et de l’obéissance, est le signe d’un monde à venir qui relativise tout bien de ce monde. Que de l’Assemblée du Synode des Évêques parvienne à ces frères et sœurs notre reconnaissance pour leur fidélité à l’appel du Seigneur et pour la part qu’ils ont prise et prennent à la mission de l’Église, que leur parvienne aussi l’exhortation à l’espérance dans des situations difficiles pour eux aussi, en ces temps de changements; et enfin l’invitation à persévérer en tant que témoins et promoteurs de la nouvelle évangélisation dans les divers milieux de vie en lesquels le charisme de chacun de leurs instituts les a placés.

8. La communauté ecclésiale et les nombreux ouvriers de l’évangélisation

L’œuvre d’évangélisation n’est pas le devoir de quelques-uns dans l’Église, mais elle est l’œuvre des communautés ecclésiales en tant que telles, dans lesquelles s’ouvre l’accès à la plénitude des moyens de la rencontre avec Jésus : la Parole, les sacrements, la communion fraternelle, le service de la charité, la mission.

Dans cette perspective ressort avant tout le rôle de la paroisse, comme présence de l’Église sur le territoire où vivent les hommes, « fontaine du village » comme aimait l’appeler Jean XXIII, à laquelle tous peuvent s’abreuver et trouver la fraîcheur de l’Évangile. Son rôle reste irremplaçable, même si les changements des conditions peuvent en exiger l’articulation en plus petites communautés ou l’ouverture à des liens de collaboration dans un contexte plus ample. Nous sentons surtout le devoir d’exhorter nos paroisses à joindre à la charge pastorale traditionnelle du peuple de Dieu les nouvelles formes de missions réclamées par la nouvelle évangélisation. Elles doivent aussi être perméables aux différentes et importantes formes d’expressions de la piété populaire.

Dans la paroisse, le ministère du prêtre continue à être décisif, père et pasteur de son peuple. À tous les prêtres, les Évêques de cette Assemblée synodale expriment reconnaissance et proximité fraternelle pour leur difficile travail et les invitent à avoir des relations toujours plus étroites au sein du presbyterium diocésain, à une vie spirituelle toujours plus intense, à une formation permanente qui les rende aptes à affronter les changements.

À côté des prêtres, nous soulignons aussi la présence des diacres, ainsi que l’action pastorale des catéchistes et de tant de figures de ministres ainsi que d’animateurs dans le champ de l’annonce et de la catéchèse, de la vie liturgique, du service caritatif, ainsi que les diverses formes de participation et de coresponsabilité de la part des fidèles, hommes et femmes, pour le dévouement desquelles dans les multiples services de nos communautés nous ne serons jamais assez reconnaissants. À toutes ces personnes également nous demandons de mettre leur présence et leur engagement dans l’Église au service de la nouvelle évangélisation, en se souciant de leur propre formation humaine et chrétienne, de la connaissance de la foi et de la sensibilité aux phénomènes culturels d’aujourd’hui.

Pour ce qui est des laïcs, un message particulier va aux diverses formes d’associations anciennes ou nouvelles, aux mouvements ecclésiaux et aux nouvelles communautés, pour qu’ils manifestent la richesse des dons que l’Esprit fait à l’Église. Nous exprimons aussi notre reconnaissance à ces formes de vie et d’engagement dans l’Église, en les exhortant à la fidélité à leur charisme propre et à la communion ecclésiale sincère, spécialement dans le contexte concret des Églises particulières.

Témoigner de l’Évangile n’est le privilège de personne. Ainsi reconnaissons-nous avec joie la présence de tant d’hommes et de femmes qui par leur vie se font signe de l’Évangile au milieu du monde. Nous sommes aussi reconnaissants envers tant de frères et de sœurs chrétiens avec lesquels l’unité n’est malheureusement pas encore parfaite, mais qui sont eux aussi marqués par le Baptême du Seigneur et en sont les annonciateurs. Ces jours-ci, ce fut pour nous une expérience émouvante d’écouter les voix de tant de vénérables responsables d’Églises et de communautés ecclésiales qui nous ont témoigné de leur soif du Christ et de leur dévouement à l’annonce de l’Évangile ; eux aussi sont convaincus que le monde a besoin d’une nouvelle évangélisation. Nous rendons grâce au Seigneur pour cette communion dans l’exigence de la mission.

9. Pour que les jeunes puissent rencontrer le Christ

Les jeunes nous tiennent à cœur de manière toute particulière, parce que, tout en étant une part importante du présent de l’humanité et de l’Église, ils en sont aussi l’avenir. Également en ce qui les concerne, le regard des évêques est tout sauf pessimiste. Il est certes préoccupé, mais pas pessimiste. Préoccupé parce que les pressions les plus agressives de notre temps convergent principalement vers eux ; mais pas pessimiste. Avant tout parce que — nous insistons — l’amour du Christ est ce qui façonne l’Histoire en profondeur. Mais aussi parce que nous voyons chez nos jeunes une profonde aspiration à l’authenticité, à la vérité, à la liberté et à la générosité, aspiration pour laquelle seul le Christ est en mesure d’être une réponse satisfaisante, nous en sommes convaincus.

Nous voulons les soutenir dans leur recherche, et nous encourageons nos communautés à entrer sans réserve dans une attitude d’écoute, de dialogue et de proposition courageuse concernant la condition difficile des jeunes. Ceci afin de ne jamais décourager, mais de préserver la puissance de leur enthousiasme. Afin aussi de soutenir en leur faveur le juste combat contre les lieux communs et les spéculations intéressées des puissances du monde qui veulent capter l’énergie des jeunes et utiliser leurs élans pour leur propre avantage, en les privant de la mémoire reconnaissante du passé et de tout projet sérieux dans le futur.

Tout en demandant beaucoup d’attention, cette nouvelle évangélisation dans le monde des jeunes est particulièrement prometteuse, comme le montrent de nombreuses expériences, certaines plus visibles, comme les Journées mondiales de la jeunesse, certaines plus cachées sans être pour autant moins passionnantes, comme les différentes expériences de vie spirituelle, de service et de mission. Nous reconnaissons donc aux jeunes une part active dans l’œuvre d’évangélisation, en particulier envers la jeunesse elle-même.

10. L’Évangile en dialogue avec la culture, avec l’expérience humaine et avec les religions

La nouvelle évangélisation est centrée sur le Christ et sur l’attention à la personne humaine, en vue de permettre une rencontre réelle avec lui. Mais ses horizons sont aussi larges que le monde et ne se restreignent à aucune expérience humaine particulière. Cela veut dire que la nouvelle évangélisation veille avec un soin particulier au dialogue avec les cultures, dans la ferme confiance qu’elle trouvera en chacune d’elles les « semences du Verbe » dont parlaient les Pères. En particulier, la nouvelle évangélisation a besoin d’envisager un rapport renouvelé entre la foi et la raison, dans la conviction que la foi a assez de ressources pour accueillir tous les fruits d’une raison saine, éclairée et ouverte à la transcendance, et qu’elle possède le pouvoir de porter remède aux limites et aux contradictions dans lesquelles la raison peut tomber. La foi ne se voile pas davantage la face en présence des interrogations douloureuses que pose la présence du mal dans le monde et l’histoire mais elle puise dans la Pâque du Christ la lumière de l’espérance.

La rencontre de la foi et de la raison alimente aussi l’engagement de la communauté chrétienne dans le vaste champ de l’éducation et de la culture. Un rôle spécial est joué par les institutions de formation et de recherche: écoles et universités. Partout où se développent les connaissances de l’homme et se propose une action éducative, l’Église se réjouit d’apporter sa propre expérience et sa contribution pour une formation de la personne dans son intégralité. À cet égard une sollicitude particulière va aux écoles et universités catholiques, dans lesquelles l’ouverture à la transcendance, propre à chaque itinéraire culturel et éducatif sincère doit être complétée par des chemins de rencontre avec l’événement de Jésus Christ et de son Église. La gratitude des évêques rejoint ceux qui en ont la charge dans des conditions parfois difficiles.

L’évangélisation exige qu’on prête une attention particulière au monde des communications sociales, routes sur lesquelles, en particulier dans les nouveaux médias, s’entrecroisent tant de vies, tant d’interrogations et tant d’attentes. C’est un lieu où se forment souvent les consciences et où se rythment les temps et les contenus de la vie vécue. C’est une chance nouvelle pour rejoindre le cœur de l’homme.

Un domaine particulier de la rencontre entre foi et raison se situe dans le dialogue avec le savoir scientifique. Ce dernier n’est pas, en soi, éloigné de la foi dès lors qu’il manifeste le fondement spirituel que Dieu a déposé dans ses créatures et qui permet de discerner les structures rationnelles qui sont à la base de la création. Quand les sciences et les techniques ne prétendent pas enfermer la conception de l’homme et du monde dans un matérialisme aride, elles deviennent un allié précieux pour développer l’humanisation de la vie. Par conséquent notre gratitude se porte également vers tous ceux qui sont engagés sur le front délicat de la connaissance.

Nous voulons élargir l’expression de notre reconnaissance aux hommes et aux femmes engagés dans une autre manifestation du génie humain, celle de l’art en ses diverses expressions, des plus anciennes aux plus récentes. En tant qu’elles visent à donner forme à la tension de l’homme vers la beauté, nous reconnaissons dans leurs œuvres un mode très significatif d’expression de la spiritualité. Nous sommes reconnaissants aux artistes quand, par leurs créations de beauté ils nous aident à manifester la beauté du visage de Dieu et de celui de ses créatures. Le chemin de la beauté est une voie particulièrement efficace pour la nouvelle évangélisation.

Ce ne sont pas seulement les chefs-d’œuvre de l’art mais l’ingéniosité créative de l’homme qui attirent notre attention en tant que terrain favorable où celui-ci se fait coopérateur de la création divine grâce à son travail. Au monde de l’économie et du travail nous voulons rappeler quelques exigences émanant de la lumière de l’Évangile : préserver le travail des conditions qui, souvent, en font un fardeau insupportable et lui enlèvent toute assurance pour l’avenir, en raison des menaces de chômage frappant surtout les jeunes; mettre la personne humaine au centre du développement économique, penser ce développement lui-même comme une occasion de croissance du genre humain dans la justice et l’unité. L’homme est aussi appelé à travers son travail, par lequel il transforme le monde, et par sa responsabilité envers les générations futures, à préserver le visage que Dieu a voulu donner à sa création.

L’Évangile éclaire aussi le sens de la souffrance lié à la maladie. Les chrétiens doivent faire ressentir ici la présence de l’Église auprès des malades et sa reconnaissance envers tous ceux qui s’engagent avec professionnalisme et humanité dans les soins à leur donner.

Un domaine où la lumière de l’Évangile peut et doit jaillir pour éclairer les pas de l’humanité est celui de la politique. Il lui est demandé un engagement désintéressé et transparent pour le bien commun, dans le respect de la pleine dignité de la personne humaine, de sa conception jusqu’à sa fin naturelle, de la famille fondée sur le mariage entre un homme et une femme, de la liberté d’éducation ; dans la promotion de la liberté religieuse ; dans la lutte contre les injustices, les inégalités, les discriminations, les violences, le racisme, la faim et la guerre. Un témoignage clair est demandé aux chrétiens qui, dans l’exercice de la politique, vivent le précepte de la charité.

Le dialogue de l’Église enfin a un interlocuteur naturel dans les adeptes des religions. L’évangélisation se fait par conviction de la vérité du Christ, et non contre quelqu’un. L’Évangile de Jésus est paix et joie, et ses disciples sont heureux de reconnaître ce que l’esprit religieux de l’homme a su discerner de bon et de vrai dans le monde créé par Dieu, et a exprimé en donnant forme aux diverses religions. Le dialogue entre les croyants des diverses religions veut être une contribution à la paix, il refuse tout fondamentalisme et dénonce toute violence visant les croyants, en grave violation des droits humains. Les Églises du monde entier sont proches dans la prière et la fraternité de ces frères souffrants et demandent à ceux qui ont en leurs mains le sort des peuples de sauvegarder les droits de tous à la liberté de choisir et de professer de leur foi et d’en témoigner.

11. La mémoire du Concile Vatican ii durant l’Année de la foi et la référence au Catéchisme de l’Église Catholique

Sur le chemin ouvert par la nouvelle évangélisation nous pourrions aussi nous sentir parfois comme en un désert, au milieu des dangers et sans aucun repère. Le Saint-Père Benoît XVI, lors de l’homélie de la messe d’ouverture de l’Année de la Foi, a parlé d’une « désertification spirituelle » qui a progressé ces dernières décennies, mais il nous a aussi encouragés en affirmant que « c’est justement à partir de l’expérience de ce désert, de ce vide, que nous pouvons découvrir à nouveau la joie de croire et son importance vitale pour nous chrétiens. Dans le désert, on redécouvre la valeur de ce qui est essentiel pour vivre » (Benoît XVI, Homélie de la célébration eucharistique pour l’ouverture de l’Année de la foi, Rome 11 octobre 2012). Dans le désert, comme la samaritaine, on part à la recherche de l’eau, d’un puits auquel s’approvisionner : bienheureux celui qui y rencontre le Christ !

Nous remercions le Saint-Père pour le don de l’Année de la Foi, précieuse introduction au parcours de la nouvelle évangélisation. Nous le remercions également d’avoir relié cette Année de la Foi à l’heureux anniversaire des cinquante ans de l’ouverture du Concile Vatican ii, dont l’enseignement fondamental pour notre temps resplendit dans le Catéchisme de l’Église Catholique, reproposé 20 ans après sa publication comme référence sûre de la foi. Ce sont des anniversaires importants qui nous permettent de réaffirmer notre ferme adhésion à l’enseignement du Concile Vatican ii et notre engagement à continuer sa pleine mise en œuvre.

12. Contemplation du mystère et proximité avec les pauvres

Dans cette perspective nous voulons indiquer à tous les fidèles deux expressions de la vie de foi qui nous semblent d’une particulière pertinence pour en témoigner dans la nouvelle évangélisation.

Le premier est constitué du don et de l’expérience de la contemplation. C’est seulement avec un regard d’adoration sur le mystère de Dieu, Père, Fils et Saint-Esprit, c’est seulement de la profondeur du silence semblable au sein qui accueille l’unique Parole qui sauve, que peut jaillir un témoignage crédible pour le monde. Seul ce silence priant peut empêcher que le message du salut se perde dans les nombreux bruits du monde.

Un message de gratitude vient à nouveau sur nos lèvres pour tous ceux qui, hommes et femmes, consacrent leur vie à la prière et à la contemplation dans les monastères et les ermitages. Mais nous avons besoin que des temps de contemplation s’insèrent dans la vie ordinaire des gens: des lieux spirituels, mais aussi géographiques, qui rappellent le souvenir de Dieu, des sanctuaires intérieurs mais également des temples de pierre qui soient des croisements obligés pour ce flux d’expériences qui, sinon, risque de nous emporter. Des espaces dans lesquels tous puissent se sentir accueillis, même ceux qui ne savent pas encore bien ce qu’ils cherchent et qui ils cherchent.

L’autre symbole d’authenticité de la nouvelle évangélisation a le visage du pauvre. Se mettre à côté de celui qui est blessé par la vie n’est pas seulement un exercice de sociabilité, mais est avant tout un fait spirituel. Car dans le visage du pauvre resplendit le visage même du Christ : « Tout ce que vous avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Mt 25, 40).

Une place privilégiée est reconnue aux pauvres dans nos communautés, une place qui n’exclut personne, mais veut être un reflet de la façon dont Jésus s’est lié à eux. Leur présence dans nos communautés est mystérieusement puissante : elle change les personnes plus qu’un discours, elle enseigne la fidélité, elle fait comprendre la fragilité de la vie, elle appelle à la prière, et, pour tout dire, conduit au Christ.

Le geste de la charité exige d’être accompagné de l’effort pour la justice. C’est un appel qui s’adresse à tous, pauvres et riches ; d’où la nécessaire insertion de la doctrine sociale de l’Église dans les parcours de la nouvelle évangélisation et le souci de la formation des chrétiens qui travaillent à l’harmonie des rapports humains dans la vie sociale et politique.

13. Un message aux Églises des diverses régions du monde

Le regard des évêques réunis en assemblée synodale embrasse toutes les communautés ecclésiales répandues à travers le monde, un regard qui se veut unitaire, parce que l’appel à rencontrer Jésus est unique, mais aussi un regard qui n’oublie pas la diversité.

Une considération toute particulière, pleine d’affection fraternelle et de gratitude, est réservée par les évêques réunis en synode à vous chrétiens des Églises orientales catholiques, celles qui sont héritières de la première diffusion de l’Évangile, expérience gardée avec amour et fidélité, et celles qui sont présentes dans l’Est de l’Europe. Aujourd’hui l’Évangile se propose de nouveau parmi vous comme nouvelle évangélisation par le biais de la vie liturgique, la catéchèse, la prière familiale quotidienne, le jeûne, la solidarité entre les familles, la participation des laïcs à la vie des communautés et au dialogue avec la société. Souvent exposées à l’épreuve et à la tribulation, vos Églises sont appelées à témoigner de la participation à la Croix du Christ. Certains fidèles sont contraints à l’émigration. Tout en maintenant vive l’appartenance à leur communauté d’origine, ils peuvent donner leur propre contribution à la charge pastorale et à l’œuvre d’évangélisation dans les pays qui les ont accueillis. Que le Seigneur continue à bénir votre fidélité, et que se dégagent dans votre avenir des horizons de confession sereine et de pratique de la foi dans un climat de paix et de liberté religieuse.

Nous vous regardons vous les chrétiens, hommes et femmes, qui vivez dans les pays d’Afrique, nous vous exprimons avant tout notre gratitude pour le témoignage que vous rendez à l’Évangile, souvent dans des situations de vie humainement difficiles. Nous vous exhortons à redonner élan à l’évangélisation reçue en des temps encore récents, à vous construire comme Église « famille de Dieu », à renforcer l’identité de la famille, à soutenir l’engagement des prêtres et des catéchistes, spécialement dans les petites communautés chrétiennes. À quoi s’ajoute l’impérieuse nécessité de développer la rencontre de l’Évangile avec les anciennes et nouvelles cultures. Une attente et un appel vigoureux s’adresse aussi au monde de la politique et aux gouvernants des différents pays d’Afrique, pour que, grâce à la collaboration de tous les hommes de bonne volonté, soient promus les droits humains fondamentaux et que le continent soit libéré de la violence et des conflits qui le tourmentent encore.

Les évêques de l’Assemblée synodale invitent les chrétiens de l’Amérique du Nord à accueillir avec joie l’appel à la nouvelle évangélisation, en même temps qu’ils regardent avec reconnaissance comment, dans leur histoire encore récente, vos communautés chrétiennes ont donné des fruits généreux de foi, de charité et de mission. Il importe maintenant de reconnaître que beaucoup d’expressions de la culture ambiante des pays de votre continent sont aujourd’hui loin de l’Évangile. S’impose donc une invitation à la conversion, de laquelle naît un engagement qui ne vous place pas en dehors de vos cultures mais en leur sein même, afin d’offrir à tous la lumière de la foi et la force de la vie. Au moment où vous accueillez dans vos terres généreuses de nouvelles populations d’immigrants et de réfugiés, soyez disposés aussi à ouvrir les portes de vos maisons à la foi. Dans la fidélité aux engagements pris lors de l’Assemblée synodale pour l’Amérique, soyez solidaires de l’Amérique latine dans l’évangélisation permanente du continent commun.

Dans un même sentiment de reconnaissance l’Assemblée du Synode se tourne vers les Églises de l’Amérique latine et des Caraïbes. Il est particulièrement frappant de voir comment au fil des siècles se sont développées dans vos pays des formes de piété populaire, encore enracinées dans les cœurs de beaucoup, de service de la charité et de dialogue avec la culture. Aujourd’hui, face aux nombreux défis du présent, avant tout la pauvreté et la violence, l’Église en Amérique latine et dans les Caraïbes est invitée à vivre dans un état permanent de mission en annonçant l’Évangile avec espérance et avec joie, en formant des communautés de vrais disciples missionnaires de Jésus Christ, en montrant dans l’engagement de ses fils comment l’Evangile peut être source d’une nouvelle société juste et fraternelle. Le pluralisme religieux aussi interpelle vos Églises et exige une annonce renouvelée de l’Évangile.

À vous aussi chrétiens d’Asie, nous voulons offrir un message d’encouragement et d’exhortation. Vous êtes une petite minorité dans le continent qui recueille en lui pratiquement les deux tiers de la population mondiale. Votre présence est une semence féconde, confiée à la puissance de l’Esprit Saint, semence qui grandit dans le dialogue avec les différentes cultures, avec les antiques religions, avec les pauvres innombrables. Même si elle est souvent marginalisée dans la société, et même persécutée en certains endroits, l’Église d’Asie, avec sa foi ferme, est une présence précieuse de l’Évangile du Christ qui annonce justice, vie et harmonie. Chrétiens d’Asie, puissiez-vous ressentir la fraternelle proximité des chrétiens des autres pays du monde, lesquels ne peuvent oublier que Jésus est né, a vécu, est mort et ressuscité sur ce continent, en Terre Sainte !

Un message de reconnaissance et d’espérance des évêques s’adresse aux Églises du continent européen, aujourd’hui marqué en partie par une forte sécularisation, parfois agressive, et pour une part encore blessé par les longues décennies de pouvoir des idéologies ennemies de Dieu et de l’homme. La reconnaissance va vers le passé mais aussi vers le présent, dans lesquels l’Évangile a créé en Europe des prises de conscience et des expériences de foi bien caractérisées et décisives pour l’évangélisation du monde entier, débordant souvent de sainteté: richesse de la pensée théologique, variété des expressions charismatiques, formes multiples du service de la charité envers les pauvres, profondes expériences contemplatives, création d’une culture humaniste qui a contribué à donner un visage à la dignité de la personne et à la construction du bien commun. Que les difficultés du présent ne vous abattent pas, chers chrétiens d’Europe : qu’elles soient plutôt perçues comme un défi à dépasser et une occasion pour une annonce plus joyeuse et plus vivante du Christ et de son Évangile de vie.

Les évêques de l’Assemblée synodale saluent enfin les peuples de l’Océanie, qui vivent sous la protection de la Croix du Sud, et ils les remercient pour leur témoignage de l’Évangile de Jésus. Notre prière pour vous est que, comme la femme samaritaine auprès du puits, vous ressentiez vive vous aussi la soif d’une vie nouvelle et que vous puissiez entendre la parole de Jésus qui dit : « Si tu savais le don de Dieu ! » (Jn 4, 1-10). Recevez l’appel à vous engager encore à prêcher l’Évangile et à faire connaître Jésus dans le monde d’aujourd’hui. Nous vous exhortons à le rencontrer dans votre vie quotidienne, à l’écouter lui et à découvrir, par le moyen de la prière et de la méditation, la grâce de pouvoir dire : « nous savons que celui-ci est vraiment le sauveur du monde » (Jn 4, 42).

14. L’étoile de Marie illumine le désert

Arrivé à la fin de cette belle expérience de communion entre des évêques du monde entier et de la collaboration au ministère du successeur de Pierre, nous entendons résonner pour nous, dans toute son actualité, le commandement de Jésus à ses apôtres : « Allez et faites des disciples de toutes les nations [...]. Et voici que je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin du monde » (Mt 28, 19-20). La mission de l’Église ne concerne pas seulement une extension géographique, mais cherche à rejoindre les replis les plus cachés du cœur de nos contemporains, pour les porter à la rencontre avec Jésus, le Vivant qui se rend présent dans nos communautés.

Cette présence emplit de joie notre cœur. Pleins de reconnaissance pour les dons reçus de lui en ces jours, nous faisons monter un chant de louange : « Mon âme exalte le Seigneur [...] Le Puissant fit pour moi des merveilles » (Lc 1, 46.49). Les paroles de Marie sont aussi les nôtres : le Seigneur a vraiment fait des merveilles au long des siècles pour son Église dans les diverses parties du monde et nous le magnifions, certains qu’il ne manquera pas de prendre en charge notre pauvreté pour y déployer, aujourd’hui encore, la puissance de son bras et nous soutenir sur le chemin de la nouvelle évangélisation.

La figure de Marie nous oriente sur le chemin. Celui-ci peut nous sembler, comme nous a dit Be- noît XVI, un itinéraire à travers le désert, et nous savons qu’il faut le parcourir en emportant avec nous l’essentiel: le don de l’Esprit, la compagnie de Jésus, la vérité de sa parole, le pain eucharistique qui nous nourrit, la fraternité de la communion ecclésiale, l’élan de la charité. C’est l’eau du puits qui fait fleurir le désert. Et, comme dans la nuit du désert les étoiles se font plus brillantes, ainsi dans le ciel de notre chemin resplendit avec force la lumière de Marie, l’Étoile de la nouvelle évangélisation à qui nous nous remettons avec confiance.

   

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