Le monde contemporain évolue rapidement; des solutions urgentes pour ses problèmes s'imposent, dans un contexte où le phénomène de la mondialisation concerne non seulement la sphère du politique et de l'économie, mais aussi la dimension sociale, culturelle et spirituelle de l’être humain.
Dans un tel contexte, le secteur du tourisme joue un rôle considérable, secteur qui, bien qu’il soit, «à peine sorti de l'adolescence» et qu’il apparaisse comme une industrie encore fragile et changeante, représente aujourd’hui la troisième industrie d’exportation au niveau mondial. Le rôle que le tourisme joue à l'intérieur du phénomène de la mondialisation revêt encore plus d'importance lorsque l’on considère qu’il s’agit d'une industrie qui, au lieu d'exporter des marchandises, importe des consommateurs. Ce constat met en évidence le fait que, dans une optique purement économique pour ce secteur, c’est le lieu de production qui est le «facteur» le plus important, car c’est le lieu lui-même qui constitue le produit.
Toutefois, si l'on élargit le champ d'observation au-delà de la sphère économique et si l’on prend en compte les trois dimensions précédemment citées, les dimensions sociale, culturelle et spirituelle, on note qu’elles sont partie intégrante et essentielle du lieu; malgré cela, ces dimensions risquent de subir de profonds conditionnements et de profondes mutations si les flux dérivant du tourisme ne sont pas adéquatement orientés pour sauvegarder ces dimensions, avec le risque de provoquer des dommages irrémédiables à la «matière première» du tourisme et, ce qui est encore plus grave, de violer la dignité humaine des populations locales. On ne peut en effet oublier, comme l’a rappelé récemment le Saint-Père, «ces propositions touristiques de 'paradis artificiels', où sont exploités à des fins purement commerciales les populations locales, au bénéfice d'un tourisme qui, en certains cas, ne respecte même pas les droits humains les plus élémentaires des habitants du lieu» (Allocution du Saint-Père aux participants à l'Assemblée plénière du Conseil pontifical pour la Pastorale des Migrants et des Personnes en Déplacement, n. 2,29 avril 2002).
Un tel constat a poussé les experts et les personnes qui œuvrent dans ce secteur à définir des stratégies à court et à long terme, qui ont permis, entre autre, de faire apparaître une nouvelle typologie du tourisme: l’écotourisme, ébauché par le Code mondial d’Éthique du Tourisme, adopté par l'Organisation mondiale du Tourisme en octobre 1999.
Notre rencontre a précisément comme objectif de contribuer à la définition d’une meilleure compréhension de ce concept, encore sujet à des interprétations différentes.
Le souhait de nombreux participants est que le débat qui nous avons en ce lieu offre d’intéressants points de réflexion au Sommet mondial sur le Développement durable, qui aura lieu à Johannesburg du 26 août au 4 septembre 2002. De nombreuses imbrications existent entre l’écotourisme et le développement durable, qui, comme vous le savez, est fondé sur l’idée de relier entre elles trois dimensions du développement: économique, social et environnemental.
Pour sa part, le Saint-Siège veut contribuer lui aussi à ce débat, en indiquant quelques-uns des principes et des valeurs qui sont, ou devraient être, à la base de l’écotourisme. Ce dernier ne doit pas en effet se limiter à mettre en contact les touristes avec une nature non pollué ou avec les sociétés rurales; il doit aussi devenir un moyen concret pour sauvegarder le patrimoine naturel et surtout les traditions culturelles, spirituelles et religieuses.
Cela signifie que, pour le développement de l'écotourisme, il est indispensable d’avoir comme point de référence le caractère central de l’être humain, rappelant le principe premier adopté par la Déclaration de Rio sur l’Environnement et le Développement de 1992, principe selon lequel «l’être humain est au centre des préoccupations du développement durable». Une telle approche comporte inévitablement une révision et une réorganisation des systèmes opérationnels qui visent à obtenir des résultats économiques et financiers immédiats au détriment d’un écotourisme durable, qui requiert le maintien du patrimoine culturel commun. L’écotourisme offre en effet l’occasion de ne pas privilégier uniquement les initiatives commerciales, mais de réserver aux valeurs humaines, culturelles et spirituelles, leur juste place, avec le soutien de tous les protagonistes concernés.
On voit ainsi que, pour l’écotourisme, il est urgent, en raison du principe de subsidiarité, de pouvoir s’appuyer sur des normes et sur des initiatives toujours plus adaptées, pour garantir la participation des communautés locales et indigènes dans l’organisation, le contrôle et la gestion des activités touristiques, ainsi que dans les processus de décision qui leur sont liés. En fonction de ces comportements, il sera intéressant d’évaluer l’impact de l’écotourisme sur la protection de l’environnement et sur le développement socio-économique des communautés locales elles-mêmes.
Le point de départ doit donc être la sauvegarde de la base culturelle, spirituelle et religieuse indispensable pour sensibiliser à ce problème ceux qui veulent s’engager dans ce secteur. La population locale ne peut être tenue à l’écart de ce processus innovateur et productif, mais elle doit être partie prenante des nouvelles valeurs qui se présentent, y compris les bénéfices liés à un développement social équilibré. De cette façon, on pourra parvenir à une harmonieuse association entre le patrimoine culturel de ceux qui sont accueillis et les traditions locales. Cela requiert un processus prudent et équilibré d’ouverture réciproque et d’intégration, avec, au point de départ, des parcours adaptés d’éducation et de formation au respect de la sauvegarde de la création et des autres cultures et civilisations, parcours qui conduisent aussi à un changement progressif des modèles de production et de consommations qui sont insoutenables.
Afin qu’ils soient efficaces même pour un développement correct de l’écotourisme, de tels parcours d’éducation et de formation, proposés aux populations locales et plus particulièrement à celles qui arrivent, doivent être basés sur les exigences de la responsabilité, du souci du bien commun, de l’équité entre les générations et à l'intérieur de chaque génération, de la solidarité universelle et, comme cela a déjà été dit, de la subsidiarité.