HOMÉLIE DU CARD. TARCISIO BERTONE, Chapelle Pauline
Chers frères et sœurs! En cette importante fête liturgique de la solennité du Sacré-Cœur de Jésus, j’ai la joie de célébrer ce matin l’Eucharistie pour vous, qui formez la communauté de «L’Osservatore Romano». Je salue cordialement le directeur responsable, M. le professeur Giovanni Maria Vian, et le vice-directeur, M. Carlo Di Cicco, ainsi que le directeur général, mon confrère don Pietro Migliasso; je salue la rédaction, les responsables des éditions hebdomadaires, tous les journalistes, les photographes, les techniciens, toute votre grande famille, qui est cette année en fête pour le cent cinquantième anniversaire du journal. Le sentiment avec lequel nous célébrons cette Messe est donc précisément l’action de grâce à Dieu pour tout le bien qu’il a voulu diffuser dans l’Eglise et dans la société à travers «L’Osservatore Romano». Et cette reconnaissance profonde de l’esprit s’étend naturellement également aux typographes, s’adresse aux personnes qui, depuis les origines jusqu’à aujourd’hui, ont dirigé et réalisé quotidiennement le journal. J’offre volontiers ce sacrifice eucharistique pour les défunts, en rappelant leur parcours sur la terre au service de cette grande entreprise éditoriale. Je peux moi-même dire avoir été accompagné par «L’Osservatore Romano» au cours de toute ma vie. Avant que je naisse «L’Osservatore Romano» arrivait déjà chez moi, à Romano Canavese, une seule copie adressée à Pietro Bertone, organiste, l’unique abonné du village. Après quelques années, s’ajouta ensuite un prêtre, don Paolo Bellono, et «L’Osservatore Romano» m’accompagna au fil des ans. Je devins moi-même plus tard, collaborateur de «L’Osservatore Romano». Nous pourrions rassembler mes articles; «L’Osservatore Romano» ponctua un peu les étapes de ma vie jusqu’à l’étape actuelle de secrétaire d’Etat de Sa Sainteté. J’ai donc cheminé dans mon histoire personnelle, dans l’histoire de l’Eglise, aux côtés de «L’Osservatore Romano». En considérant les lectures bibliques de cette solennité du Sacré-Cœur de Jésus, je voudrais tirer un élément de réflexion pour les 150 ans du quotidien. Il y a le grand message du Pape, puis il y aura la visite pendant laquelle il vous adressera encore sa parole. La première lecture est tirée du septième chapitre du Deutéronome, où le Seigneur, par la bouche de Moïse, déclare à Israël son amour préférentiel et explique également le motif de cette élection. Nous pourrions dire que les Papes ont eu un amour préférentiel pour «L’Osservatore Romano» et l’ont exprimé à plusieurs reprises. Le Seigneur dit ainsi: «Tu es un peuple consacré à Yahvé ton Dieu. Si Yahvé s’est attaché à vous et vous a choisis, ce n’est pas que vous soyez le plus nombreux de tous les peuples: car vous êtes le moins nombreux d’entre tous les peuples (peut-être aussi le plus petit des quotidiens, je ne sais pas si vous êtes vraiment le plus petit des quotidiens du monde). Mais c’est par amour pour vous et pour garder le serment fait à vos pères». Cette Parole du Seigneur illumine le mystère de l’Eglise. Toutes proportions gardées, elle illumine également la réalité d’un journal comme «L’Osservatore Romano», qui est né et qui vit au sein de la réalité ecclésiale, ou mieux, auprès du Successeur de Pierre et à son service. La conséquence est donc que ce journal «très singulier», comme le définit le serviteur de Dieu Paul VI, d’une part se trouve «dans le monde», c’est-à-dire est un journal comme les autres, mais d’autre part est différent de tous les autres quotidiens, qu’il est unique, singulier. Cette singularité ne provient pas d’aspects techniques ou matériels, mais de sa mission spécifique, de regarder le monde du point de vue du Saint-Siège, comme le dit précisément son nom: «L’Osservatore Romano». Quiconque le lit, partout dans le monde, peut trouver le point de vue du Pape et du Siège apostolique dans chaque pays, dans chaque région, même la plus lointaine. J’ai reçu hier des représentants des Iles Maldives, du Malawi et d’autres pays et donc, où que l’on soit, on peut avoir le point de vue du Pape et du Siège apostolique, un point de vue pastoral, qui devient également culturel, moral, politique au sens élevé et ample. Cette situation particulière exige de la part de qui le dirige et de tous ceux qui y travaillent, une vigilance spirituelle et morale constante, pour pouvoir être — comme le dirait Jésus — dans le monde, mais non du monde. Nous pouvons nous référer, à cet égard, à l’exhortation de l’apôtre Paul aux chrétiens de Rome, et vous êtes à Rome, vous travaillez ici à Rome, même si vous n’êtes pas tous romains, mais nous pouvons tous nous dire romains: «Ne prenez pas pour modèle le monde présent, mais transformez-vous en renouvelant votre façon de penser pour savoir reconnaître quelle est la volonté de Dieu: ce qui est bon, ce qui est capable de lui plaire, ce qui est parfait» (Rm 12, 2). Je considère que cela représente pour les fidèles laïcs et pour tous, le défi le plus enthousiasmant, bien que le plus exigeant. Je crois, en effet, que cela constitue pour vous une motivation toujours renouvelée que de devoir chaque jour produire un journal comme «L’Osservatore Romano». Et lorsque je dis cela, je pense à chacun: du directeur jusqu’à celui qui prend une photographie, à celui qui écrit un article ou une chronique. «L’Osservatore Romano» n’est pas un journal grand et puissant selon les critère du monde, mais il est important aux yeux de Dieu et d’une grande partie de l’opinion publique, car il regarde les choses selon l’optique du Successeur de Pierre. C’est pourquoi je vous exhorte moi aussi à toujours renouveler votre mentalité selon les critères évangéliques et ecclésiaux, à partir d’une vie personnelle intense, conforme aux critères évangéliques et ecclésiaux. En effet, dans ce domaine il ne faut jamais penser que notre fidélité à la vérité soit une évidence. Etre proches du centre de la chrétienté demande au contraire une plus grande vigilance et un engagement à la cohérence. Le Saint-Père Benoît XVI est pour nous tous un modèle de ce que signifie communiquer de manière claire et profonde, raisonnable et fidèle le mystère, car il vit avant tout ce mystère. Vous avez entendu et lu au moins quelques passages de la très belle homélie qu’il a tenue le 29 juin sur l’amitié, l’amitié avec Dieu avant tout, l’amitié avec le Seigneur et l’amitié entre nous. Son exemple est vraiment entraînant et très précieux pour tous. Chers amis, restons dans le Cœur du Christ, restons dans son amour: Il nous a assurés que si nous restons unis à Lui, nous pouvons porter beaucoup de fruit. Avec le soutien constant de la Vierge Marie, je vous souhaite de vivre votre travail quotidien comme un service concret à la diffusion de la vérité et de la charité du Christ, avec l’humble conscience qu’en agissant de la sorte, vous travaillez avec efficacité à l’avènement du Royaume de Dieu.
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