Pontifical Council for the Pastoral Care of Migrants and Itinerant People People on the MoveN° 99, December 2005
Intégration - Communio Dialogue*
Réflexions concernant la rencontre avec les migrants dans les paroisses
Conférence Episcopale Suisse Introduction Nous connaissons actuellement les plus grands mouvements migratoires de tous les temps. On estime que quelque deux cents millions de personnes sont aujourdhui touchées par la migration dans le monde. Elles se poursuivront encore dans les années à venir. Le phénomène des migrations sest transformé ces dernières décennies en une réalité structurelle de la société contemporaine et constitue un problème dune complexité grandissante au niveau social, culturel, politique, religieux, économique et pastoral [1]. Les mouvements migratoires ont des répercussions incontestables dans les différents domaines de la vie, y compris dans notre pays. Mais les migrants sont un enrichissement pour la société qui les accueille. Par leur culture, leur mentalité et leur contribution en tant que travailleurs, ils contribuent à la diversité de notre pays marqué depuis des siècles par quatre cultures. Les migrants, une question posée à lEglise Les migrations sont aussi un défi pour lEglise en tant que communauté. En collaboration avec les instances administratives ecclésiastiques, les responsables de lEglise ont, très tôt, tenu compte des migrants en créant des postes pastoraux au service des migrants dans notre pays. Lengagement dagents pastoraux provenant du même milieu culturel ou du moins familiers de la langue, de lorigine et de la mentalité de leurs fidèles, est le signe visible que lEglise reconnaît les migrants comme appartenant pleinement à lEglise locale. Mais le processus daccueil des "étrangers" quils soient dorigine suisse ou étrangère ne se limite pas à cela. Lévolution incessante de la vie exige une ouverture croissante des uns pour les autres. Etant donnée la diminution des ressources financières, la suppression des Missions pour des migrants dites "anciennes" est souvent exigée. On le justifie en rappelant la présence de beaucoup dimmigrants depuis fort longtemps ainsi que lapparition de générations qui connaissent très bien les conditions, la langue et la vie ecclésiale locales. Alors que la deuxième génération est encore tiraillée entre la culture du pays dorigine et celle du pays daccueil, la troisième génération connaît mieux les réalités du pays dans lequel elle a grandi et passé la plus grande partie de la formation scolaire. Souvent, ce sont les deuxième et troisième générations qui marquent à présent la vie des Missions linguistiques qui sont des communautés actives de la vie de lEglise. Face à cette réalité, il est légitime de poser la question à savoir si, pour des raisons financières, ces communautés vivantes devraient réduire leurs activités en faveur des fidèles de toutes les générations, ou même si ces Missions correspondent encore à un besoin réel. En revanche, une meilleure pastorale est nécessaire pour les "nouveaux" immigrants catholiques en Suisse qui proviennent dautres pays et dautres cultures et qui expriment le désir dune prise en charge religieuse même sils ne forment quun petit groupe. Cest dans cette problématique qua lieu la discussion actuelle concernant lavenir de la pastorale des migrants dans notre pays. LInstruction publiée en mai 2004 par le Conseil pontifical pour la pastorale des migrants et des personnes en déplacement, "Erga migrantes caritas Christi", insiste sur trois notions essentielles, importantes en ce contexte, pour laccueil de l"étranger" dans la communauté ecclésiale locale: intégration, communio et dialogue. Intégration "Cette intégration doit se faire dans le respect total de leur diversité et de leur patrimoine spirituel et culturel, en dépassant les limites de luniformité et en distinguant le caractère territorial de la charge dâmes de celui qui est lié à lappartenance ethnique, linguistique, culturelle et rituelle."[2] Lintégration sociale signifie donc tout dabord la reconnaissance de la situation culturelle, sociale et économique des migrants, pour la sauvegarde de lidentité originelle, des caractéristiques culturelles et de la manière de vivre habituelle. Mais elle signifie en même temps la reconnaissance des données culturelles, sociales et économiques du pays daccueil de la part des migrants. Lintégration est un processus réciproque qui rend possible la participation des migrants à la vie de la communauté locale. Pour cela, une connaissance suffisante de la langue locale, des réalités sociales et des conditions politiques et ecclésiales des migrants est nécessaire, sans quoi une participation à la vie publique nest pas possible. Le terme "intégration" est fréquemment employé comme programme de réorganisation de loffre religieuse et pastorale pour les migrants; le terme est alors utilisé dans le sens de lassimilation. Quelques suggestions pratiques pour les paroisses:
Communio "Pour que la pastorale des migrants soit une pastorale de communion, il est indispensable quune étroite collaboration sétablisse entre Eglises dorigine et Eglises daccueil des courants migratoires. Cette collaboration devra naître en premier lieu de léchange dinformation réciproque concernant ce qui est dun intérêt commun."[3] Dans lInstruction pastorale la communio est comprise comme une collaboration entre Eglises locales. Elle devient le signe de la responsabilité commune des Eglises du pays dorigine et du pays daccueil pour les migrants, afin de favoriser en particulier la vie de foi grâce à une pastorale adaptée. Comme condition préalable à cela il faut mentionner une bonne connaissance de la piété populaire dans laquelle la vie religieuse des migrants senracine. Quelques suggestions pratiques pour les paroisses:
Dialogue Le dialogue est évoqué dans lInstruction pastorale sur trois plans: - Le dialogue à lintérieur de la communauté: "Cette entreprise de dialogue et de mission est le fait de tous les membres du Corps mystique, aussi les migrants eux-mêmes doivent-ils laccomplir..."[4] Linstruction demande "de construire et faire grandir lEglise", non seulement pour les migrants mais avec eux afin de les reconnaître comme membres réels de lEglise avec les mêmes droits et devoirs. Linstruction voue une attention particulière aux migrants catholiques de rite oriental qui sont plus nombreux en Suisse à la suite des migrations. Elle recommande aux évêques de se soucier dune pastorale appropriée pour ces fidèles, semblable à celle organisée pour les migrants de lEglise latine. - Le dialogue oecuménique: "La présence toujours plus nombreuse aussi dimmigrés chrétiens nétant pas en pleine communion avec lEglise catholique offre aux Eglises particulières de nouvelles possibilités de vivre la fraternité oecuménique dans le concret de la vie quotidienne..."[5]. Lcuménisme de la vie quotidienne devient une forme de respect mutuel particulier. Les moments importants de lengagement oecuménique sont les fêtes liturgiques des différentes confessions, les journées mondiales traditionnelles de la paix et les journées mondiales des migrants et réfugiés ainsi que la Semaine annuelle pour lUnité des chrétiens. La "Journée des Peuples", célébrée chaque année en Suisse, est appelée à devenir un signe de la pluralité de lEglise catholique dans notre pays, exprimant dans des célébrations eucharistiques multilingues la "catholicité" dans lEglise locale: pour la plupart des immigrants catholiques, la célébration eucharistique est le centre de la vie chrétienne paroissiale. - Le dialogue interreligieux: "LEglise est donc appelée à entrer en dialogue avec eux"[6] (cest-à-dire avec les migrants dautres religions). Dans les pays à tradition chrétienne ancienne le nombre de migrants appartenant à dautres religions a fortement augmenté. LEglise sengagera donc pour la promotion humaine dans un témoignage de charité. Les migrants dune autre religion seront soutenus dans leurs convictions religieuses afin quils gardent la dimension transcendante de la vie. Quelques suggestions pratiques pour les paroisses:
Conclusion Selon linstruction pastorale "Erga migrantes caritas Christi", laccueil des différents groupes de migrants dans une communauté locale ne peut signifier la suppression des diversités culturelles, des traditions, des coutumes ou de la vie religieuse des migrants, mais bien au contraire laccueil de la richesse que chaque personne apporte avec elle. Avec limmigration de fidèles dune autre langue, les paroisses se diversifient et gagnent en couleurs. Elles manifesteront ainsi la "catholicité" de lEglise visible dans les Eglises locales. Laccueil dans lEglise locale implique la liberté et le temps accordé au migrant daccepter les habitudes locales dans le domaine religieux. La protection des droits religieux oblige les migrants à prendre conscience de leur propre histoire et culture et des valeurs religieuses quils apportent avec eux, mais également à respecter lhistoire, la culture et les valeurs religieuses du pays daccueil. Pour lEglise cela constitue un grand défi exigeant un effort constant dacceptation réciproque. Laccueil mutuel des autochtones et des immigrés est ainsi la mesure concrète de la charité chrétienne. *Migratio Commission pour les migrations de la Conférence Episcopale Suisse. [1] Cf. Instruction, « Erga migrantes caritas Christi », 2004, présentation. [2] Erga migrantes caritas Christi", No. 89. [3] Erga migrantes caritas Christi", No. 70. [4] Erga migrantes caritas Christi", No. 38. [5] Erga migrantes caritas Christi", No. 56. [6] Erga migrantes caritas Christi", No. 59.
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